Le RACER (Rapid and Cost-Effective Rotorcraft) d’Airbus Helicopters promet de voler aussi vite qu’un avion à hélice, tout en restant économiquement pertinent. L’appareil est en cours d’assemblage à Marignane. Nous l’avons touché !
Assister à l’émergence d’une nouvelle race de machine volante est un événement rare et précieux. C’est cette expérience troublante que nous a offert Airbus Helicopters mi-février 2022, avec la présentation du RACER en assemblage. Installé au rez-de-chaussée du « Marignane Development Center » , bien posé sur son train d’atterrissage, le RACER est un beau bébé avec un regard intelligent.
Les Américains sont aujourd’hui en pointe dans la conquête de la vitesse avec des hélicoptères hybrides destinés à des emplois militaires. Les dollars coulent à flot et donnent naissance à des appareils lourds, débordant de puissance et de complexité. Très bien.
Des objectifs environnementaux ambitieux sont en outre attendus pour cet appareil, avec notamment la mise au point d’un « éco-mode » autorisant la mise en veille d’une des deux turbines pendant la phase de croisière puis son retour rapide et automatique à sa puissance maximale via un nouveau type de moteur électrique. Ce n’est donc pas un hasard si le programme RACER est en partie financé par le programme de recherche H2020 de la Commission européenne, dans le cadre de Clean Sky 2.
Mais revenons à Marignane où Julien Guitton (directeur de programme) et Brice Makinadjian (ingénieur en chef) nous présentent les innovations portées par l’appareil. A commencer par cette voilure biplan si particulière, qui a été installée sur le fuselage en fin d’année dernière.
Cette voilure sert tout autant à donner de la portance à grande vitesse qu’à héberger le train d’atterrissage et les ensembles dynamiques transmettant la puissance vers les deux hélices latérales. « Si la voilure est biplan, c’est pour limiter l’exposition au souffle du rotor dans les phases de vol lent » résument d’une phrase nos interlocuteurs.
Les hélices permettent d’aller vite tout en ralentissant le rotor principal dans les hautes vitesses, ce qui permet de réduite la trainée.
Un résultat spectaculaire qui est obtenu en multipliant les astuces aérodynamiques, avec notamment l’emploi de volets sur le bord de fuite de la voilure, commandés par le pilote automatique, qui permettent de régler finalement l’assiette de l’appareil en vol. « La poutre de queue présente également une asymétrie en coupe transversale qui réduit son soufflage par le rotor principal, tout en générant un effort latéral dans le sens de l’anti-couple » précise Brice Makinadjian. « Cet effort nous permet d’économiser 10% de puissance sur les hélices propulsives qui participent également à l’anti-couple ». Le rotor bénéficiera également d’un carénage très profilé.
Autre morceau de bravoure, et clef de voute des performances attendues, les arbres de transmission logés dans les demi-voilures supérieures. Des pièces de 3m de long tournant à 3.000 tours/minute et qui font le lien entre la BTP et les boites de transmission raccordées à chaque hélice. La qualification de ces arbres attendue prochainement permettra de lever définitivement une des plus grandes interrogations techniques du programme.
L’appareil visible à Marignane ne dispose pas encore de sa BTP, de son rotor à cinq pales (emprunté au H175, en cours d’assemblage), ni de sa motorisation (deux turbines Aneto de Safran Helicopter Engines, livrées en 2021) et des hélices latérales hexapales fabriquées par MT-Propellers. Mais il repose en revanche sur son train et il est équipé de son système carburant.
La BTP, fabriquée par le partenaire Avio, sera livrée chez Airbus Helicopters en juin 2022. D’ici là, le RACER recevra également l’hydraulique du train d’atterrissage, l’arbre de transmission de puissance et les boites de transmissions latérales, logées en extrémité de voilure, et qui sont également en cours d’assemblage chez Avio. Le compte à rebours est déjà bien lancé pour un premier vol qui pourrait intervenir avant la fin de l’année.
Frédéric Lert
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