Le gros biturbine d’Eurocopter, l’EC225 Super Puma, très utilisé pour la desserte des plates-formes en mer, est cloué au sol après deux ruptures de la boîte de transmission principale. Les ingénieurs du constructeur européen sont confrontés à un casse-tête…
Sur la famille Super Puma d’Eurocopter, la boîte de transmission principale – un complexe jeu d’engrenages qui relie les moteurs au rotor principal – est en train de devenir le cauchemar des ingénieurs. Ils pensaient avoir trouvé la parade aux improbables mais redoutables pertes de lubrification. Las, en plus du circuit d’huile principal, le système de secours s’est montré défaillant deux fois en six mois. Résultat : aucun blessé mais deux amerrissages forcés en EC225. Et une industrie pétrolière handicapée, puisque les EC225 et AS332, aujourd’hui pratiquement cloués au sol, ont un rôle important dans la desserte des plates-formes en mer du Nord.
Dernier accident (selon les enquêteurs britanniques de l’AAIB) ou incident (selon Eurocopter) en date, l’amerrissage contrôlé d’un EC225 de la compagnie CHC. Le 22 octobre 2012 entre Aberdeen (Ecosse) et la plate-forme West Phoenix, ce sont 19 personnes qui ont dû être secourues. C’était la première fois que le système de lubrification de secours était utilisé. Le 10 mai 2012, la compagnie Bond Offshore Helicopters subissait un événement similaire. Un EC225 transportant 14 personnes s’était posé sur l’eau, à 45 km au large des côtes écossaises.
Sans huile, la boîte de transmission principale (BTP) casse, ce qui peut entraîner la désintégration de l’appareil. Bien que faible, le risque de perte de lubrification a conduit les autorités à exiger des constructeurs qu’ils trouvent des solutions. Il s’agit d’assurer 30 minutes de lubrification après la perte du circuit principal. Eurocopter a conçu un système de secours fondé sur un lubrifiant à base de glycol et d’eau. Il est utilisé en circuit ouvert (contrairement au circuit fermé habituel), avec un réservoir spécifique.
Selon ses promoteurs, ce système peut lubrifier la BTP pendant 52 minutes. L’enquête sur le premier accident a montré qu’il avait bien fonctionné… mais envoyé une fausse alarme au bout de 32 secondes. D’où la décision de l’équipage : amerrir. Dans le second accident, les pilotes ont vu s’allumer le même voyant de panne.
L’AAIB soupçonne donc une nouvelle fausse indication. Un capteur de pression d’air pourrait avoir déclenché la fausse alarme. Les enquêteurs notent d’ailleurs que, durant sa mise au point, le système de secours n’a jamais été testé en entier – ni sur banc d’essai, ni sur hélicoptère.
Reste qu’il n’est pas seul en cause. Sur chacune des deux BTP incriminées, l’AAIB a découvert une crique sur toute la circonférence d’un arbre vertical. Or cet arbre entraîne les pompes du circuit d’huile. D’où la panne initiale de lubrification, avant la mise en route du système de secours.
Devant le risque, l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) a étendu une précédente consigne de navigabilité. Davantage de Super Puma sont concernés. Les intervalles peuvent être ramenés à trois heures entre deux examens des enregistrements de vibration. Les survols maritimes sont interdits pour les appareils non munis du système VHM de surveillance des vibrations.
L’autorité britannique (UK CAA, l’équivalent de la DGAC) est même plus stricte encore : les survols maritimes sont à exclure, VHM ou pas. Seules les opérations de recherche et sauvetage sont tolérées.
Aujourd’hui, des exploitants majeurs comme Bond, CHC et Bristow ont suspendu les vols d’EC225 et d’AS332. Bristow, par exemple, a interrompu l’utilisation de ses 16 Super Puma – 11 EC225 au Royaume-Uni, trois EC225 en Australie, un EC225 en Norvège et un AS332 au Nigéria. Rien que pour l’industrie pétrolière et gazière britannique, ce sont 25 hélicoptères qui sont indisponibles. « C’est une proportion significative de la flotte », s’inquiète Paul Dymond, de l’organisation professionnelle Oil & Gas UK.
D’où une gêne considérable quand il s’agit de relever les équipes en mer. On peine à imaginer l’état d’esprit de ces passagers. Car la famille Super Puma n’est pas la seule à voir sa BTP défrayer la chronique. Le Sikorsky S-92, l’autre 19-places du marché, a connu son lot de problèmes et son constructeur a du mal à trouver une solution définitive.
Thierry Dubois
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Les Super Puma de l'industrie pétrolière cloués à terre
Autre point qu'il faut revoir dans l'article ...
votre schéma de BTP est celui du S92 ... or, au vu de l'accident fatal du 12 mars 2009 au Canada, l'amalgame est déplacé ...
ci-joint la version EC225, dont la configuration d'arbre a dépassé les 4,5 million heures de vol dont 150.000 heures sur cette variante avant que le premier incident ne se déroule ...
Les Super Puma de l'industrie pétrolière cloués à terre
Salut,
30 ans dans l'offshore (maintenant pensionné .. ouf .. !)
Plein d'entraînements aux accidents d'hélicoptères (principalement a RISK - Hollande et a Perth - Australie)
Tous les instructeurs et examinateurs sont unanimes sur un point:
Toutes ces instructions et pratiques sont utiles .. tant que l'amerrissage - atterrissage se passent sans chocs notables ...
Pour le reste .....
Pour ma part .. je n'ai été mouillé que dans de nombreux exercises .. :)
Bonne chance a tous les collègues
Les Super Puma de l'industrie pétrolière cloués à terre
Pour répondre aux questions et inquiétudes des familles, rien de tel que des photos et vidéos factuelles, dénuées de toutes élucubrations ...
http://local.stv.tv/peterhead/news/196160-second-helicopter-firm-grounds-helicopter-models-following-ditching/
http://local.stv.tv/peterhead/news/196436-helicopter-which-ditched-into-north-sea-brought-back-to-shore/
L'hélicoptère est donc remorqué puis "gruté" sur un supply boat, amené à quai pour "analyse & enquête", puis suivant l'état ... amené chez le constructeur pour être réparé, remis à neuf et re-validé pour à nouveau voler ...
Par ailleurs, il faut savoir que tous les équipages comme tous les passagers-travailleurs vers les plate-formes "subissent" et doivent réussir une formation spécifique bi-annuelle à l'évacuation des hélicoptères suite à un amerrissage stable ou instable, ainsi qu'à la survie en milieu maritime à bord de canots de sauvetage, pour obtenir l'autorisation de se rendre sur ce lieu de travail en environnement qualifié d' "hostile".
Enfin, tous les équipages réalisent annuellement des entrainements aux amerrissages contrôlés ou forcés, de jour comme de nuit, sur simulateur Full Flight.
Les Super Puma de l'industrie pétrolière cloués à terre
Dans tout amerrissage, il y a une limite de hauteur de vague.
Les flotteurs empêchent principalement l'immersion de l'appareil, ce qui permet sa récupération mais ils n'empêchent pas toujours son retournement .
Dans de bonnes conditions météo, l'équipage attend l'arrivée des secours dans l'aéronef.
Si les conditions météo sont trop mauvaises l'appareil peut chavirer et se retourner.
Dans les deux cas de sauvetage cités dans votre article les équipages ont eus malgré tout de la chance.
Les Super Puma de l'industrie pétrolière cloués à terre
Un problème qui trouvera sa solution dans quelques jours, voir 15 jours, car le problème est plutôt humain, mon fils est depuis deux rotation sur une plateforme, beaucoup trop, pour son équipe et les équipes au sol, en plus des familles et enfants qui attendent .
Il y a des bateaux de ravitaillement, mais pas conçu pour rapatrier un nombre de personnes en sécurité, et le nombre d'heures de navigation.
Mon fils se trouve en Norvège, et pour voir sa famille doit prendre un avion d'Oslo pour la France, entre son débarquement et son arrivée dans son foyer, 24 heures.
Je voulais souligner aussi cette approche, humain et économique, pour les sociétés, car un homme ne travaille pas à 100%, sans lien avec sa famille, car il faut comprendre la vie d'une plateforme en mer.
J'ai fais 15 ans sur des plateformes en Norvège, Ecosse, Afrique, USA.
Merci pour les schémas et autres détails sur cet article.
Bernard dit BIBI84
Les Super Puma de l'industrie pétrolière cloués à terre
Dans les deux cas, les occupants des hélicoptères ont eu de la chance. Dans le premier (10 mai), l'appareil ne s'est pas retourné. Les chavirages causent de trop nombreuses victimes, malgré l'entraînement imposé aux pilotes et passagers. Dans le cas de l'EC225 de Bond, les occupants ont donc pu facilement utiliser les radeaux de sauvetage. L'hélicoptère a pu être récupéré et devrait reprendre du service.
Dans le second événement (22 octobre), je ne sais pas si l'hélicoptère est resté "dans le bon sens". En tous cas, il avait pu se poser près d'un bateau, ce qui a facilité le sauvetage.
Le Super Puma de l'industrie pétrolière cloués à terre
Concrètement, comment ça se passe une fois qu'un hélico de cette taille a amerri ? La machine est perdue, ou on la récupère par bateau ?
Et les passagers ? Ils évacuent immédiatement dans un canot ?