Pour Airbus, il s’agit de réduire la voilure pour traverser la crise, qui peut durer deux, trois ou quatre ans, tout en préservant les ressources humaines qui seront indispensables à la remontée en cadence. Philippe Mhun, vice-président exécutif des programmes et des services d’Airbus détaille, ici, la stratégie de l’avionneur européen qui vise à sauvegarder le système industriel, supply chain comprise, le temps que durera la crise.
« C’est le pire que nous aurions pu imaginer », reconnaît Philippe Mhun, vice-président exécutif des programmes et des services d’Airbus, interrogé par Aerobuzz.fr sur la situation du groupe, au lendemain de l’annonce de 15.000 licenciements. Le « pire »… Il est sûr que le plus pessimiste des conseillers de l’avionneur n’ait un jour osé avancer un tel effondrement du marché. 40% de baisse des activités d’exploitation en l’espace de quelques jours. Du jamais vu.
« Le plan d’adaptation a été rapidement mené. Il fallait très rapidement s’adapter et se préparer à traverser la crise, sur une période, de deux, trois ou quatre ans ». Airbus table aujourd’hui sur un retour du trafic aérien au niveau d’avant Covid-19, entre 2023 et 2025. C’est loin et l’incertitude de l’estimation démontre la complexité de la situation…
Mi-février 2020, alors qu’il présentait les résultats 2019 du groupe, Guillaume Faury, le PDG d’Airbus évoquait la montée en cadence de production de l’A320 pour répondre à la forte demande des compagnies. Il sortait alors, chaque mois des huit chaines d’assemblage final réparties entre Hambourg (4) Toulouse (2), Tianjin (1) et Mobile (1), pas moins de 60 monocouloirs. La volonté était de pousser le curseur jusqu’à 67, soit 800 A320 par an à partir de 2023.
Février 2020 – Mars 2020 : un mois. La cadence de production est passée de 60 à 40. En un mois seulement ! Celle de l’A330 de 3 à 2 et celle de l’A350 de 10 à 6. Début juillet 2020, Airbus demeure réglé sur ces niveaux. Philippe Mhun ne repousse pas l’idée d’« ajustements marginaux » si nécessaire. « Nous sommes en contact avec nos clients qui sollicitent des ajustements des plans de livraisons. Nous suivons cela de près avec nos équipes de ventes. Nous sommes concentrés sur les livraisons à réaliser et nous anticipons ce qui pourraient être leurs attentes pour 2021 et 2022. »
Traverser la crise dont la durée est impossible à prévoir tout en préparant le retour aux niveaux de production antérieurs telle est la quadrature du cercle. Un défi pour Airbus, comme pour chaque maillon de la supply chain. Philippe Mhun note, au passage et s’en félicite, que « le support de l’Etat à la supply chain est au moins aussi important que celui apporté aux compagnies aériennes ».
Le 1er juillet 2020, c’est-à-dire au lendemain de l’annonce du plan de réduction des effectifs d’Airbus, Jean-Baptiste Djebbari, le secrétaire d’Etat aux Transports a souligné que le prolongement de la période d’activité partielle pendant deux ans pourrait permettre à l’avionneur de préserver 1.500 emplois en France, sur les 5.000 menacés. Les aides à la recherche devraient également sauver 500 emplois supplémentaires. Le jour même, sur France Inter, Thierry Baril, le directeur des ressources humaines modulait : « le dispositif de chômage partiel de longue durée pourrait sauver jusqu’à 1.000 postes et les activités soutenues par l’Etat en R&D pourraient nous permettre de sauver 400 à 500 postes ».
Même si à ce stade il y a encore des divergences, Philippe Mhun salue « la réactivité des gouvernements qui permettent de protéger le potentiel de l’entreprise ». Le plan d’adaptation des effectifs d’Airbus tend à réduire les coûts « pour sauvegarder l’entreprise », mais aussi à « protéger les compétences en interne » en s’appuyant sur toutes les mesures sociales disponibles. « Nous nous affranchissons ainsi des délais longs de formation », affirme le vice-président exécutif des programmes et des services d’Airbus..
Le problème se pose dans les mêmes termes pour les sous-traitants, mais de manière souvent plus radicale pour les entreprises les plus fragiles qui se sont endettées pour répondre aux injonctions de montée en cadence et qui se retrouvent aujourd’hui avec un outil de production surdimensionné et des prêts à rembourser. « Nous effectuons un travail de suivi de chacun de nos fournisseurs pour suivre leur santé financière », affirme vice-président exécutif des programmes d’Airbus. Certains sous-traitants avec lesquels nous sommes en contact régulier n’ont pas forcément le sentiment d’être épaulés comme ils le souhaiteraient…
Philippe Mhun se veut rassurant. Il compte sur le fonds créé par les quatre grands donneurs d’ordres (Airbus, Safran, Thales et Dassault) qui selon lui devrait permettre d’orienter les prêts vers les entreprises les plus en difficulté. Il n’exclut pas non plus des aides plus directes en cas de nécessité.
« Il faut que l’ensemble de l’écosystème puisse remonter les cadences quand la demande sera là. ». Or, l’industrie aéronautique doit gérer des cycles longs. Il faut prévoir 18 mois d’anticipation pour le cycle industriel d’un gros porteur. « Beaucoup moins pour les monocouloirs. C’est plutôt de l’ordre de 6 à 8 mois. »
« Les mesures prises jusqu’à présent par la société nous ont permis d’absorber le choc initial de cette pandémie. Nous devons maintenant assurer la durabilité de l’entreprise et garantir notre capacité à émerger de la crise en leader global du secteur aérospatial, tout en nous adaptant aux défis immenses que rencontrent nos clients. » a déclaré Guillaume Faury, PDG d’Airbus.
Gil Roy
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A l'extinction des dinosaures, il y a eu une grave crise sociale chez les tailleurs de silex !
Mais le génie humain a su prendre le virage du bronze...Depuis on le coule sous forme de médailles pour honorer l'innovation !
Quelle ...envolée!...
Finalement, après la chute de l'URSS, les Russes n'ont pas été si mauvais dans la conservation de leur potentiel technique: aucun okb n'a fermé.
Da ! Au fait, ils fabriquent quel avion de transport passagers vos amis ?
Ca va aussi faire mal dans la supply chain ou beaucoup de sous traitans de rang 2 et 3 ne pourront pas survivre.
C'est habituel: on les liquide sans sourcilier et après, on se plaint amèrement de ne plus trouver de sous traitants français!.
Ma petite société fabriquait sous microscope les clapets du train d'atterrissage du Rafale Marine: On l'a asphyxié malgré des prix de raves cuites: 70 euros l'heure de main d'œuvre pour des pièces en titane faites sous microscope, par exemple.
Quand j'ai fermé, mes clients m'ont déclaré: "Ah, mais qui va nous fournir maintenant?".