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Biomimétisme ou quand la Nature préfigure les avions de demain

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Aerobuzz

C’est en observant les oiseaux qu’à l’approche du 20ème siècle, les précurseurs comme le breton Jean-Marie Le Bris ou le lyonnais Louis Mouillard ont montré la voie aux constructeurs de planeurs puis d’avions du monde entier. Au 21ème siècle chercheurs et ingénieurs aéronautiques sont plus que jamais persuadés que non seulement les oiseaux, mais aussi les requins ou encore les végétaux peuvent les aider à amorcer une rupture technologique. La Nature n’a pas encore livré tous ses secrets.

C’est après avoir passé des heures à regarder voler des albatros que Jean-Marie Le Bris (1817-1872) construisit sa « barque ailée » avec laquelle il effectua son premier vol plané, en 1856, sur la plage de Douarnenez. Intuitivement, il avait établi une relation entre l’incidence et la portance. C’est aussi après avoir étudié le vol des oiseaux de mer, que Louis Mouillard (1834-1897) publiera en 1881 « L’empire de l’air », l’ouvrage de référence qui éclairera des précurseurs.

La réponse est dans la Nature

Un siècle et demi plus tard, les chercheurs sont à nouveau convaincus que la Nature peut les aider à imaginer et à concevoir l’aéronautique de la deuxième moitié du 21ème siècle. « En plus de la science, c’est dans la Nature qu’il nous faut puiser l’inspiration afin de dessiner les avions de demain, des avions plus performants et respectueux de l’environnement » confirme Denis Darracq, ingénieur en charge des recherches technologiques chez Airbus.

« Prenez l’exemple de la chouette harfang : quand cet oiseau de proie nocturne s’élance pour saisir une musaraigne au pied d’un arbre, elle réussit à atteindre en quelques secondes une vitesse phénoménale au ras du sol, sans produire le moindre bruit. C’est une performance comme celle-ci que nous essayons de comprendre avant de voir comment nous pouvons l’appliquer aux avions. »

Biomimétisme et rupture technologique

En attendant que les chercheurs percent le secret de la chouette harfang, les ingénieurs des bureaux d’études des constructeurs aéronautiques continuent d’optimiser l’existant. Mais aussi puissants soient-ils, leurs ordinateurs ne leur permettent que de grappiller une poignée de pourcents à la fois. Or les objectifs que s’est fixée l’industrie aéronautique tendent à une réduction de 20% de la consommation et de l’empreinte écologique

Le défi est d’autant plus ambitieux que les schémas de pensée actuels avec un avion composé d’un fuselage, de deux ailes et d’empennages semblent marquer le pas… Pour Denis Darracq, ce n’est pas tout à fait vrai. « L’étude du vol de l’aigle, nous a appris que cet oiseau adaptait en permanence le profil de son aile en fonction des caractéristiques de vol souhaitées et de l’aérologie environnante. »

Les Sharklets de l’A320

« Ainsi la courbure de l’aile ou la position des rémiges, les extrémités des ailes, varient tout au long du vol pour assurer la meilleure vitesse ou le meilleur vol plané, gage de performance et d’économie d’énergie, le tout dans un silence presque parfait. » Les rémiges des Airbus A320 se nomment Sharklets ! Ces dispositifs d’extrémité de voilure permettent de gagner 4% sur la consommation de carburant, si bien que désormais plus aucun opérateur de l’appareil n’envisage de se passer de cette amélioration aérodynamique.

« Lors de nos recherches sur le vol de l’aigle, nous avons cru prendre la Nature en défaut, car des déformations parasites se formaient sur l’extrados du rapace dans certaines phases du vol… comme des plumes qui se décoiffent. Nous savons aujourd’hui que ces déformations que nous ne comprenions pas jouent un rôle important dans la performance du vol… Déjà l’aile de l’A350 s’inspire de cette science que nous appelons le biomimétisme puisqu’elle est capable d’adapter automatiquement son profil aux conditions dans lesquelles elle évolue. » Une caractéristique qui contribue largement aux performances remarquable du biréacteur long courrier d’Airbus souligne Denis Darracq.

Aigle, requin, oie…

Dans un futur plus ou moins proche, les avions seront probablement recouverts d’une peau de requin artificielle. La peau du squale est rugueuse, elle présente cependant des qualités de pénétration dans un fluide remarquables. Airbus pense gagner au moins 1% sur la consommation de carburant des avions grâce à cette solution. Ce gain en apparence modeste se traduit sur la durée de vie d’un avion par une économie de milliers de tonnes de carburant, et une diminution, dans la même proportion, des rejets de NOX et CO2. « Nous avons déjà testé avec succès cette solution sur un prototype, et les résultats sont très encourageants » poursuit Denis Darracq.

La résistance du nénuphar réside dans sa structure, une source d’inspiration pour les chercheurs en aéronautique. © Airbus

« Nous étudions aussi les oies dont le vol en formation serrée permettrait des gains de consommation substantiels. La disposition particulière en vol des oiseaux migrateurs induit des mouvements d’air qui font que les ailiers consomment 10% d’énergie en moins que les oiseaux situés en tête…» L’idée serait de faire voler en croisière, à la manière des oies, des groupes d’avions lors de longues traversées maritimes par exemple. « C’est une solution tout à fait intéressante du point de vue de l’efficacité énergétique », conclut Denis Darracq.

La Nature inspire les chercheurs, non seulement dans la manière de faire voler les avions, mais aussi de les construire. Des recherches sont actuellement menées chez Airbus pour transposer à la conception des avions, la structure des nénuphars qui allie légèreté et solidité. « La structure des avions dans lesquels nous volerons dans trente ans seront semblables à des squelettes aux formes complexes réalisés en impression 3D ».

La Nature est la solution parce qu’elle est la vie.

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