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Industrie

GE et Safran en ordre de bataille pour le moteur de demain

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Thierry Dubois

GE Aviation et Safran, les deux partenaires de la coentreprise CFM, lancent un programme de recherche et technologie d’où devrait naître le successeur du Leap. Inspiré du démonstrateur CROR de turbopropulseur à hélices contrarotatives rapides, le moteur Open Fan à soufflante non carénée vise une réduction de la consommation de 20 % par rapport au Leap. En ligne de mire : les monocouloirs Airbus et Boeing qui entreront en service vers 2035.

C’était la première fois qu’ils se voyaient physiquement depuis leurs prises de fonction respectives, les 1er septembre 2020 et 1er janvier 2021. John Slattery, directeur général du motoriste GE Aviation, et Olivier Andriès, son homologue chez Safran, ont marqué leur rencontre en région parisienne par deux annonces spectaculaires. D’une part, un effort de démonstration technologique dont l’enjeu n’est rien moins que la compatibilité du transport aérien avec l’accord de Paris sur la lutte contre le changement climatique. D’autre part, une prolongation de la collaboration au sein de CFM jusqu’en 2050 : c’est la confirmation, sur le long terme, d’un lien transatlantique majeur dans l’aviation.

Le programme Rise, pour « innovation révolutionnaire pour des moteurs durables » (revolutionary innovation for sustainable engines), devrait contribuer à structurer l’industrie des moteurs dans les décennies à venir.

Car les 500 et bientôt 1.000 ingénieurs mobilisés sur ce projet feront feu de tout bois : la liste des technologies employées donne le tournis par leur niveau de complexité. Elle offre une idée de la difficulté à améliorer encore le rendement des turbomachines en matière de propulsion aéronautique.

Pour commencer, l’architecture la plus prometteuse est celle de la soufflante non carénée (« open fan »), affirme Delphine Dijoud, en charge de l’ingénierie des systèmes pour le programme Rise chez CFM. L’open fan ressemble au CROR mais la deuxième rangée d’aubes est fixe, hormis le pas variable. Non seulement on simplifie la conception, mais on se rapproche de la configuration d’un turboréacteur classique. CFM affirme ainsi que la vitesse de croisière sera maintenue, alors que les architectures à hélices rapides sont d’ordinaire associées à des allures légèrement réduites.

Cet objectif s’inscrit dans une tentative plus large de maintenir le transport aérien dans son offre actuelle.

Certains dirigeants prétendent que l’avion respectueux de l’environnement ne coûtera pas plus cher au passager. L’avenir dira si ces souhaits sont réalistes.

Plusieurs configurations sont possibles sur l’avion : moteurs placés sur le fuselage arrière, sous une voilure haute ou sous une voilure basse. © CFM International

En attendant, GE et Safran vont s’atteler à l’hybridation du moteur. Aucun détail n’a encore été révélé mais le principe est bien de fournir de la poussée via un système électrique.

Autrement dit, l’arbre de la soufflante pourrait en partie être entrainé, dans certaines phases de vol demandant une poussée élevée, par un moteur électrique.

La turbomachine peut alors être légèrement sous-dimensionnée et donc plus proche de son optimum en croisière. On peut aussi imaginer récupérer de l’énergie en descente. Il faut alors que l’avion entier tienne compte de ce critère. Ce sera possible avec la soufflante non carénée, qui de toute manière demande une intégration plus avancée avec la cellule et donc un travail approfondi avec l’avionneur.

Dans le programme Rise, il est aussi question de récupération de chaleur.

Il s’agit de capter la chaleur là où elle est inutile : en aval de la chambre de combustion, dans les turbines. Et de l’envoyer là où elle peut augmenter le rendement : à l’entrée de la chambre. Le principe thermodynamique est connu mais sa mise en œuvre difficile, puisqu’on ajoute un circuit dans le moteur.

Comme si ces défis ne suffisaient pas, Safran et GE veulent concevoir un moteur capable de fonctionner au biocarburant durable et à l’hydrogène. La combustion de ce dernier est qualifiée de « relativement sympathique » chez Safran. Le moteur resterait le même à 90 %.

Des essais sur des sous-systèmes ont déjà eu lieu. En outre, GE aussi a de l’expérience sur les hélices rapides. A travers des essais en vol dans les années 1980, d’une part, et des évaluations en soufflerie il y a une dizaine d’années, d’autre part.

On n’en est pas encore au lancement d’un programme de nouveau moteur. GE et Safran ont néanmoins un calendrier, afin de proposer des technologies mûres à Airbus et Boeing. Les essais au sol devraient débuter dès le milieu de la décennie.

Thierry Dubois

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Thierry Dubois

Thierry Dubois est journaliste aéronautique depuis 1997. Ingénieur Enseeiht, il s’est spécialisé dans la technologie – moteurs, matériaux, systèmes — et la sécurité des vols. Chef du bureau français du magazine Aviation Week, il anime aussi des rencontres comme les tables rondes du Paris Air Forum. Pour Aerobuzz, Thierry Dubois couvre notamment les hélicoptères civils et des sujets techniques.

View Comments

  • Et le Tupolev 95 ?
    Un truc qui a largué les jets américains venu les escorter quand Kroutchev est venu en visite aux USA... de mémoire...

    • Vous parlez du TU-114, la version civile du Tu-95, à turbopropulseurs NK-12. Ça c'est un turboprop normal, bien que le plus puissant du monde et à hélices contra-rotatives.

      • Et il y a de très bonne raisons à cela. Entres autres le niveau sonore de la "chose", la raison la plus spectaculaire, mais également un problème plus sournois: la statistique catastrophique des fuites de pales non confinées. Essayons de nous rappeler que tout dossier d'assurance échoue un jour où l'autre sur le bureau d'un pailleux de la LLoyd. (La compagnie d'assurance qui assure toutes les compagnies d'assurance.) Et ces gens sont des statisticiens purs et durs, point barre. Donc les pales non confinées ils n'aiment pas avec quelques raisons quand même. Bien sûr on pourrait réinventer l'architecture des avions pour que la fuite de pale ne soit pas catastrophique, mais ça va être notoirement plus cher que de travailler un peu plus les moteurs à fort taux de dilution finalement... Pfff dans les années 70 ils ont commis un méfait bien plus grave, tordre le bras à Kawasaki pour arrêter la production du H2. L'année où ils en ont vendu le plus. Une merveille démoniaque, jugez en: 13000 RPM à 170 on tombait la 5 et la roue avant se levait. Bien sûr fallait pas trop espérer se livrer à des fantaisies comme virer ou surtout freiner avec ce truc, surtout avec les premiers modèles. La plupart des accidents ont eu lieu pendant des dépassements d'automobiles criminellement trop lentes (on a pas idée aussi). Mais le taux d'adrénaline était garanti par contrat. S****ds d'assureurs va.

      • Certes, mais premier vol en 1952...
        Ancêtre des "open rotor" qui visaient à répondre un peu plus tard aux problèmes des grandes hélices à grande vitesse pour les descendants de ces mêmes avions très rapides. Problème en phase d'être résolus (?) par le projet CFM, mais toujours pas en service malgré 40 ou 50 ou 60 ans d'études, avec un nouveau projet et démonstrateur tous les 20 ans ... (oups...)

  • UDF sur DC-9, c'est sans parler du Progress D-27, le propfan de l'Antonov 70 qui d'ailleurs ressemble beaucoup à ce nouveau projet !

  • Tiens, le retour du concept de "fans", dont un premier pas avait été fait il y a quelques années (sur un DC8 de mémoire... les véritables historiens ajusteront au besoin), dont la date ne me revient pas.
    Malheur, mais c'est vrai : mes tempes grises et mes souvenirs, je suis un zinodaure de l'actu aéro industrielle ! Je vais faire attention à ne pas être perçu comme un ancien combattant ronchon.
    Après ce choc émotionnel je reviens au sujet :
    Peut-être que le retour d'expérience de l'A400M dont les impressions des équipages et de la PAF en traversant l'Atlantique est passée par là..., Qui sait ?

    • Bonjour,
      On est pas sur la meme chose: sur l'A400 on est sur une architecture de turbo-propulseur alors que sur ce projet on garde une architecture de moteur a reaction (fan+GTF+corps central+turbine) et les pales sont montees sur le fan, en enlevant le corps de celui-ci.
      A plus
      Alain

    • Bonjour,
      Ca n'est pas la meme chose que l'UDF: ce dernier avait ses pales montees sur la partie arriere (turbine), alors qu'ici on est plutot sur la partie avant (fan). L'idee est aussi d'augmenter le diametre des pales pour augmenter le taux de dilution, ca n'etait pas le cas sur l'UDF.

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