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L’industrie aérospatiale américaine craint « des vents contraires »

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Pierre Sparaco

Les remarquables résultats des avions commerciaux ne sauraient occulter les problèmes latents de l’industrie aéronautique et spatiale américaine. L’absence de grands programmes militaires risque d’affaiblir le secteur à long terme. Et cela, sans compter sur la montée en puissance de nouveaux acteurs, notamment asiatiques

L’Aerospace Industries Association of America, très puissant groupement professionnel de l’industrie aérospatiale américaine, peine à contenir de sérieuses inquiétudes pour l’avenir de ses membres. Les statistiques 2013, déjà publiées, ne sont bonnes qu’en apparence mais le niveau de l’emploi subit une lente érosion et les perspectives à long terme sont maussades, avions commerciaux mis à part.

Cette tendance est d’autant moins inattendue que les dépenses militaires subissent des contraintes budgétaires croissantes, un mouvement que l’on retrouve aussi à l’étranger. Et cela à un moment où la concurrence se fait plus sévère, avec l’apparition de nouveaux intervenants très ambitieux, notamment asiatiques. Qui plus est, les industriels américains souffrent de l’absence de programmes nouveaux alors que quelques valeurs sûres traditionnelles approchent de leur fin de vie. En témoigne, par exemple, la sortie d’usine prochaine du dernier C-17A Globemaster III, la fin programmée du F-16A (lancé il y aura bientôt 35 ans !) ou encore l’omniprésence budgétaire du Lockheed Martin F-35 Joint Strike Fighter, qui ne laisse guère de place à d’autres initiatives. Du coup, disent les responsables de l’AIA, « nous nous préparons à rencontrer des vents contraires dans les années à venir ».

A première vue, il est pourtant difficile d’entériner une telle inquiétude, le secteur ayant enregistré, en 2013, un impressionnant chiffre d’affaires de 220,1 milliards de dollars. Mais, par rapport à 2012, la progression est minime, ce que confirme le recul de l’emploi : 13.000 postes ont été supprimés et, avec un effectif de 618.200 personnes, l’industrie aérospatiale américaine est désormais bien loin de son pic de 1999, 798.500 personnes.

En examinant de près les statistiques qui viennent d’être publiées, force est de constater que ce sont les avions commerciaux de Boeing qui pèsent très lourd dans l’évolution du secteur tout entier, qu’il s’agisse des prises de commandes, des livraisons ou encore du niveau des exportations. Le carnet de commandes de l’avionneur de Seattle atteint actuellement 344 milliards de dollars, soit 4.787 avions correspondant à sept ans et demi de production aux cadences actuelles. Les autres volets du secteur affichent des résultats nettement moins brillants, par exemple les hélicoptères (596 livraisons au cours de l’année qui se termine) et les avions privés et d’affaires, 1.661 appareils, bien loin des records passés.

Les grands industriels rejoignent ainsi les préoccupations de leurs collègues et concurrents européens : ils se demandent comment maintenir les compétences de leurs bureaux d’études. Certes, quelques initiatives spectaculaires ont retenu l’attention au cours de ces derniers mois, comme le concept SR-72, mais aucun avion de combat nouveau n’est en développement, F-35 mis à part. Tout comme aucun programme n’est actuellement envisagé pour prendre la relève du C-130J.

C’est en quelque sorte pour tenter de forcer le destin que l’on assiste aux efforts du groupe Textron qui, sur fonds privés, a conçu et fait voler le biplace d’appui léger et d’entraînement avancé Scorpion, en dehors de tout appel d’offres du Pentagone. Bien que rien de tel ne soit prévu, on imaginerait volontiers Textron faisant alliance avec Dassault Aviation pour en faire le successeur de l’Alpha Jet…

Textron vient par ailleurs de décider de racheter Beechcraft, dont la gamme est complémentaire de celle de Cessna. Ce qui fait dire aux analystes de New York que de nouvelles grandes manœuvres sont susceptibles de prendre forme en 2014, pour le plus grand bonheur des spécialistes en fusions et acquisitions. Mais ce serait pour mieux gérer la pénurie.

Pierre Sparaco

Le Boeing 777, dont le millième exemplaire a récemment été livré, va entamer une seconde carrière grâce au 777-X, ici aux couleurs de Cathay Pacific, client de lancement.
Préfiguration du Lockheed Martin SR-72, capable de voler à Mach 6, un projet à très long terme
Un F-16 de l'Air National Guard. La production de ce monoréacteur polyvalent a été lancée en 1975
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Pierre Sparaco

View Comments

  • Pierre Sparaco a raison
    Je suis vos articles depuis de nombreuses années, et vous avez une nouvelle fois mis dans le mille...Cette idée de jumeler pour un projet Textron et Dassault pour un projet d'avion d'entrainement est évident, mais les jalousies sous-jacentes des directeurs industriels des sociétés respectives seront elles muselées?
    Il est évident aussi en ces temps de disettes que les seuls avions qui peuvent intéresser les pays "émergents" et les vieux pays sont des avions d'entrainement moins onéreux proposés par des groupes qui oseront réduire leurs marges
    Il y a de l'avenir de ce coté la

  • L’industrie aérospatiale américaine craint « des vents contraires »
    Tout cela est vrai.
    Maintenant, nos ingenieurs doivent se servir "on shelves", c'est a dire utiliser des composants deja en service (meme dans le civil) pour reduire les couts de developpement.
    Le personel des bureau d'etudes fond comme neige au soleil.

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