En 2016, l’industrie aéronautique et spatiale française a réalisé un chiffre d’affaires record de plus de 60 milliards d’euros, en hausse de +4,1%. Toutefois, 20 à 25% des membres du GIFAS affichent des pertes. Ce sont pour l’essentiel des PME-PMI impactées par la baisse des dépenses de défense ou par le marasme qui persiste sur les marchés de l’hélicoptère civil et de l’aviation d’affaires. Il faut serrer les rangs, d’autant qu’il va, aussi, falloir faire face aux conséquences imprévisibles du Brexit.
C’est l’une des ombres au tableau 2016 et le président du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS) ne cache pas sa préoccupation : près d’un quart des 376 membres du GIFAS ont affiché des pertes en 2016. Marwan Lahoud estime que cette situation « pourrait avoir des conséquences sur l’ensemble de la filière ». Tous les acteurs de cette filière, quelle que soit leurs tailles, sont en effet interdépendants.
Les ratés dans la montée en cadence des nouveaux programmes d’Airbus en sont une illustration. Quand les sous-traitants ne parviennent pas à suivre le rythme, l’avionneur ne peut pas livrer. L’exemple le plus retentissant est évidemment celui de Zodiac Aerospace, qui ne fait pourtant pas partie des plus petits, et qui a retardé les livraisons des livraisons d’A350-900, parce qu’il n’était pas en mesure de livrer dans les temps et en qualité les sièges. Après le temps de la remise en question du schéma industriel, est venu celui de la consolidation avec la prise contrôle par Safran en cours.
En 18 mois, la cadence de production du programme A350XWB a été multipliée par 3,5. Si les difficultés de Zodiac Aerospace, ouvertement mis en cause par la direction d’Airbus, ont défrayé la chronique, d’autres ont souffert en silence et continuent de souffrir. Ce que confirme Bertrand Lucereau, président du comité Aero-PME du GIFAS, tout en répétant que « les PME françaises sont trop petites et qu’elles ont besoin de se consolider ».
2016 a été une nouvelle fois une année record avec une progression du chiffre d’affaires à 60,4 Md€ (+4,1% à périmètre constant) avec une très forte composante exportation de 41,7 Md€ (+5,9%) qui représente 86% du chiffre d’affaires consolidé, un nouveau record. Le secteur civil représente 78% du chiffre d’affaires. En termes de commandes, 2016 est une très bonne année avec 73,1 Md€ (-6,6% par rapport à 2015 qui avait constitué une année record).
A travers son comité Aero-PME, le GIFAS mène une réflexion pour les aider à se diversifier, à aller vers d’autres marchés. « Celles qui sont sereines en 2017, sont celles qui sont aussi dans le médical et le militaire » souligne Bertrand Lucereau. Les entreprises qui accusent un déficit en 2016, soit environ un quart des PME du secteur, sont essentiellement celles qui travaillent dans la branche aviation d’affaires ou hélicoptère. « Le segment de l’aviation d’affaires n’a pas retrouvé son niveau pré-crise de 2008 et le segment des hélicoptères lourds est affecté par la chute du marché Oil & Gas », précise le président du GIFAS.
« Nous avons besoin d’ETI fortes », déclare Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation, vice-président et probable futur président du GIFAS à compter de 12 juillet prochain. « Il faut aider les PME à avoir plus de produits à leurs catalogues. Il faut les aider à préparer leur consolidation ». Bertrand Lucereau fait remarquer que « Les PME ont de la trésorerie et qu’elles peuvent faire face. C’est une opportunité pour aller vers d’autres marchés ».
Pour améliorer encore la compétitivité de ses PME, le GIFAS a mis en place en 2014 un grand programme d’amélioration de la performance opérationnelle: «Performances Industrielles » qui a déjà donné des résultats extrêmement positifs. « Avec un co-investissement Etat-Industrie, ce programme a permis à 97% des PME concernées de voir une amélioration significative de leur performance. », souligne Marwan Lahoud, « Nous passons désormais à la phase 2 pour approfondir l’excellence française avec 300 PME visées, dont 150 nouvelles. Les 13 nouvelles régions sont d’ores et déjà mobilisées et engagées comme partenaires de ce programme.»
« C’est juste un soupçon d’inquiétude. Personne ne sait comment les choses vont se passer », admet le président du Gifas, interroger sur les conséquences du Brexit. Une seule certitude : les industries françaises et britanniques sont très liées. « Le Royaume-Uni est notre deuxième partenaire commercial après l’Allemagne. Nos supply chain sont fortement intégrées ». Les ailes des Airbus sont fabriquées outre-Manche…
Une quarantaine de membres du GIFAS ont un lien capitalistique avec le Royaume-Uni, soit qu’ils sont filiales d’un groupe britannique, ou inversement. « Ce n’est pas avec l’Allemagne, mais bien avec la Grande-Bretagne que nous avons mis en œuvre des partenariats dans le domaine de la défense. Nos entreprises mettent en œuvre la déclinaison industrielle du Traité de Lancaster House », explique Eric Trappier
2016 est également une année record en termes d’emplois avec 187.000 hommes et femmes dans la profession (185.000 en 2015), 10.000 recrutements et donc 2.000 emplois nets créés. Les prévisions 2017 sont de l’ordre de 8.000 recrutements (légèrement en retrait par rapport à 2016) avec un solde de nouveau positif de créations nettes d’emplois.
Qu’elles portent sur le statut et les droits des salariés, la mobilité du personnel, la certification, les droits de douanes et bien d’autres points, les questions sont multiples et pour l’heure, elles n’ont pas de réponse. « Notre intérêt est que l’industrie aérospatiale du Royaume-Uni reste proche de l’Union Européenne et qu’elle puisse continuer à se développer », résume Marwan Lahoud. « Nous souhaitons une transition la plus douce possible ».
Gil Roy
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