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La recherche s’intensifie contre le givrage moteur

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Thierry Dubois

Une campagne d’essais en vol menée par Airbus se déroule en ce moment dans les nuages d’orages d’Australie. Aux Etats-Unis, la NASA dispose désormais d’une soufflerie capable de recréer le givrage moteur.

Afin de mieux comprendre le phénomène de givrage moteur, Airbus conduit actuellement une campagne internationale de recherches depuis Darwin, dans le nord de l’Australie. La zone est en effet favorable aux conditions givrantes à proximité des orages continentaux et océaniques. L’avion d’essais est un Falcon 20 Le Falcon 20 appartient au Safire, le service des avions français instrumentés pour la recherche en environnement. Le Safire est contrôlé par le CNRS, Météo France et le CNES. spécialement instrumenté.

Ces deux dernières décennies, plus de 200 incidents ont été répertoriés où des turboréacteurs perdaient de la puissance à haute altitude, selon la NASA. Les enquêteurs ont fini par comprendre que ces avions étaient passés dans des nuages à forte concentration en cristaux de glace. Et il semble aujourd’hui que ce type de givrage moteur survienne de plus en plus souvent. En cause : l’augmentation du trafic aérien, des altitudes plus élevées et des moteurs plus gros, à fort taux de dilution. Récemment, un haut responsable de l’AESA mentionnait aussi le changement climatique.

La campagne d’essais HAIC/HIWC (pour cristaux de glace à haute altitude et teneur élevée en eau) combine un projet européen et un projet américain. On fait voler le Falcon 20 dans diverses combinaisons de conditions givrantes afin que les chercheurs en étudient les caractéristiques. Parmi les paramètres microphysiques étudiés : la taille des cristaux, leur répartition et la relation masse-diamètre en fonction de la distance par rapport au centre de la cellule convective.

Des équipes travaillent notamment à analyser les données du radar météo du Falcon (qui n’est pas censé détecter les cristaux) ou à améliorer les algorithmes de prévision des concentrations en cristaux. « Ces recherches nous permettront d’approfondir nos connaissances sur le givrage… ou les remettront entièrement en question », estime Tom Ratvasky à la NASA.

Par ailleurs, l’agence américaine a mis au point une installation capable de recréer au sol le givrage à haute altitude – une première mondiale. A Cleveland, une soufflerie a été modifiée et produit des cristaux de glace à des altitudes simulées allant jusqu’à 12 000 m et des températures descendant jusqu’à -51°C.

Une seule campagne d’essais a eu lieu pour l’instant, avec un turboréacteur Honeywell de taille relativement modeste. L’installation ne peut pas accueillir de gros réacteur mais les chercheurs proposent aux motoristes d’utiliser seulement le corps haute pression (HP) du moteur. Le givrage se produit en effet dans le compresseur HP.

Attention, précise la NASA, la soufflerie ne peut être utilisée à des fins d’homologation. Néanmoins, « dans notre soufflerie, nous pouvons déterminer où et comment la glace s’accumule », indique un chercheur. Les résultats de recherche pourraient donc se montrer déterminants dans la mise au point d’un moteur.

Thierry Dubois

Un Falcon 20 équipé de sondes collecte des données sur les cristaux de glace présents dans les nuages d'orage.
Les incidents de perte de puissance à haute altitude sont de moins en moins rares.
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Thierry Dubois

Thierry Dubois est journaliste aéronautique depuis 1997. Ingénieur Enseeiht, il s’est spécialisé dans la technologie – moteurs, matériaux, systèmes — et la sécurité des vols. Chef du bureau français du magazine Aviation Week, il anime aussi des rencontres comme les tables rondes du Paris Air Forum. Pour Aerobuzz, Thierry Dubois couvre notamment les hélicoptères civils et des sujets techniques.

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  • La recherche s'intensifie contre le givrage moteur
    affirmatif, AT45= ATR45-500, idem pour les AT75.
    effectivement, on évolue généralement dans les couches les plus favorables aux conditions de givrage, et particulièrement en été et sous les tropiques en plus (MDG, zone océan indien), c'est certainement pour ça. Et d'autant plus que les prévisions MTO en route ne sont pas particulièrement précises. Donc la seule solution, c'est de choisir dès le départ un FL plus bas que l'optimal (là où on ne risque pas de givrer) mais alors au détriment de la charge offerte étant donné l'emport supérieur de carburant due à une consommation plus importante.
    maintenant concernant ma remarque comme quoi les ATR "attirent" les givres plus que d'autres, c'est par rapport à mes vols sur b737 où sur des très courtes étapes on évoluait aux même FL que les ATR, et je ne me souviens pas avoir eu la même sensibilité aux givrages (cellules) que sur ces derniers. c'est peu être très subjectifs, mais bon...
    et par ailleurs, avec un système APM (a/c Performance Monitoring) fonctionnel et actif, système Anti-Icing et De-Icing ON, les messages APM (alerte sur les dégradations de perfo) sont quasi-systématique en Icing Condition.

  • La recherche s'intensifie contre le givrage moteur
    On parle ici de phénomènes de givrage à haute altitude provoqués par des petits cristaux de glace. Ces cristaux rebondissent sur les parties froides de l'avion (sa structure par exemple), mais se fixent sur des parties chaudes (comme les moteurs). A cause de l'accumulation de glace dans les parties chaudes, le moteur peut subir une extinction par la quantité d'eau ingérée dans la chambre de combustion.

    Pour le givrage cellule, le danger vient surtout des gouttes de pluie surfondues,qui, suivant leur taille, peuvent de fixer sur la cellule froide, éventuellement en dehors des zones dégivrées dans les cas les plus extrêmes.

    A priori, les ATR sont donc peu sensibles aux cristaux de glace, ne volant pas assez haut.

    L'EASA travaille sur le sujet:
    http://www.easa.europa.eu/rulemaking/docs/tor/25/EASA-ToR-25.058-01-09072010.pdf

  • et les Turbo Prop alors?
    voila une bonne nouvelle!
    mais, je suis juste etonné que l'on ne parle pas du tout des givrages sur les avions turboprop.
    je vole sur ATR45 et ATR75, et je peux vous dire que c'est notre pire ennemi en été surtout que les ATR sont vraiments des avions extremement sensibles aux givres et givrages... c'est incroyable comment ces avions 'attirent' les givres!
    je noterai toutefois que les problèmes qu'on rencontre sont surtout des givrages sur la cellule et très rarement sur les moteurs.
    il faudrait peut-être aussi orienter les recherches sur les systèmes d'anti-icing et de-icing sur l'airframe et pas seulement sur les engines.

    • et les Turbo Prop alors?
      Les ATR "n'attirent" pas plus les conditions de givrage que les autres avions, puisque, sauf erreur de ma part, des systèmes d'anti-givrage et/ou de dégivrage existent sur quasiment tous les appareils de transport actuels, qu'ils soient civils ou militaires. En revanche, les avions de transport régionaux évoluent dans des couches de l'atmosphère plus propices aux conditions de givrage.
      Une analyse fine de la situation météo, une bonne connaissance des conditions de givrage et des systèmes avion, sont des aides efficaces pour lutter contre le givrage en vol.
      Pascal DAUSSIN
      ATR Test Flight Engineer

    • et les Turbo Prop alors?
      Merci pour votre commentaire. Pouvez-vous préciser ce que vous appelez ATR 45 et ATR 75 ? Vous voulez peut-être dire ATR 42-500 et ATR 72-500 ? Pouvez-vous aussi expliquer s'ils givrent davantage que d'autres turboprops de taille équivalente ?

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