A Hambourg, l’avionneur a dévoilé ce 1er octobre 2019 une nouvelle chaîne d’assemblage « fortement automatisée » pour les structures de fuselage de la famille A320. 20 robots sont à l’oeuvre. Airbus affirme vouloir gagner en efficacité et en qualité sans pour autant remplacer l’homme…
« Nous entrons dans une nouvel ère pour produire nos avions, celle du numérique. » a déclaré Michael Schoellhorn, Chief Operating Officer d’Airbus. « Cette nouvelle chaîne d’assemblage de structure va favoriser la montée en cadence de la Famille A320. L’utilisation de la robotique nous permet de mettre en place des processus de fabrication plus rapides et plus efficaces, tout en continuant à nous concentrer sur la qualité… »
Tous sites confondus, l’avionneur européen vise une production de 60 appareils par mois de la famille A320 d’ici fin 2019 et 63 en 2021. A titre de comparaison, Airbus en produisait 34 chaque mois il y a 10 ans. Au total, entre 880 et 890 avions (toutes gammes confondues) devraient être livrés en 2019.
« Au vu de l’immense succès de la famille A320 et de notre carnet de commandes, nous prenons les mesures nécessaires pour porter notre système de production à un niveau d’excellence comparable à celui de nos produits…» a expliqué Michael Schoellhorn. Il faut dire qu’à ce jour, 14.789 Airbus type A320 ont été commandés et 8.979 livrés (selon les données de l’avionneur au 30 septembre 2019). Rien que pour la gamme Neo, 6.654 appareils ont été commandés, et Airbus mise visiblement gros sur le marché monocouloir long-courrier.
La nouvelle ligne du Hangar 245 sur le site de Finkerwerder (Hambourg) est en effet spécialement conçue pour les longues sections de l’A321LR. « C’est avec le XLR, l’avion le plus avancé de la gamme, que l’on veut augmenter nos parts de marchés sur ce segment où la demande est massive », précise André Walter, le directeur du site Airbus à Hambourg. La part des livraisons d’A321 au sein de la famille A320 a triplé depuis le début du siècle pour atteindre aujourd’hui 16 %. Airbus espère à terme la porter à 50 %.
Le site de Hambourg est en partie dédié à l’assemblage des coques de fuselage en sections et l’assemblage final des sections pour former des fuselages d’aéronefs. Les composants des sections 15, 17, 18 et 19 fabriqués à St Nazaire (et qui constitueront les tronçon central et arrière, ainsi que l’empennage du futur fuselage de l’A321 LR) sont livrées directement dans le hangar 245 par des monorails surélevées ou « shell tower ».
La capacité d’accueil correspond à quatre fuselages. Les différentes parties sont entreposées dans une zone d’intégration et de préassemblage appelée la mezzanine, avant leur transfert vers les stations robotisées situées à un étage inférieur du hangar.
En outre des véhicules autoguidés assurent la livraison et les déplacements des matériaux et pièces entre les différents postes. A leur sortir du Hangar 245, les sous-ensembles assemblés sont équipés de systèmes électriques et mécaniques avant d’être transférés vers les chaines d’assemblages final en France (deux lignes à Toulouse), en Chine (une ligne à Tianjin), aux Etats-Unis (une ligne à Mobile). Quatre lignes sont situées à Hambourg d’où sort environ 50% de la production de la famille A320.
Pour l’assemblage initial de la section centrale (section 15), Airbus utilise un système modulaire léger et automatisé appelé « Flextrack » composé de huit robots qui percent et fraisent entre 1.100 et 2.400 trous par joint longitudinal.
A l’étape de production suivante (composée de trois stations ou lignes parallèles), 12 robots Kuka à sept axes percent, fraisent, scellent et intègrent 3.000 rivets par joint orbital pour assembler les tronçons central et arrière et la queue du fuselage. Les sections sont positionnées automatiquement avec une précision de 0,2 mm grâce à des systèmes de visée laser sur chaque ligne. Des technologies déjà utilisées chez le principal concurrent d’Airbus. Les robots Kuka sont en effet déployés depuis 2015 sur les lignes d’assemblages du 777 et aujourd’hui du 777X d’Everett. Ces machines travaillent sur les sections avant et centrale du bimoteur où quelques 60.000 rivets sont posés de manière entièrement automatique pour chaque fuselage…
Ces technologies constituent un pas supplémentaire vers l’usine du futur, automatisée, entièrement numérique et connectée (du design à la « supply chain » et la fabrication) imaginée par Airbus, à l’instar de l’industrie automobile. Pour les dirigeants du groupe, la comparaison n’est pas évidente : « En ce qui concerne la robotique, notre industrie est plus complexe, le design, le poids, la taille des pièces sont différents de celles que l’on trouve dans l’automobile ! La technologie d’automatisation évolue très vite… Certes il faudra songer à généraliser cette transition un jour. Pour l’heure la priorité c’est le tout digital, pouvoir partager les données, corriger les problèmes avant la production proprement dite », explique Michael Schoellhorn.
Il n’est en revanche pour l’heure pas d’actualité d’ouvrir une telle station d’assemblage sur un autre site. En d’autres termes, l’avionneur ne souhaite pas aller trop vite dans l’automatisation… D’ailleurs, il ne dévoile aucun chiffre sur le gain escompté de la robotisation, en terme de rendement et de productivité. Airbus estime toutefois le gain de temps de préassemblage d’un fuselage entre 20% et 30%, comparé à un atelier dit classique.
« Notre priorité n’est pas d’être plus rapide, mais d’être encore plus précis, gagner en efficacité et en qualité. Il faut être performant autant en cadence qu’en qualité. Nous augmenterons ainsi nos parts de marchés.», explique Michael Schoellhorn. L’avionneur justifie aussi la robotique comme moyen de fournir un environnement de travail « plus sûr, moins épuisant et moins répétitif pour les employés, notamment en terme d’ergonomie. »
Alors qu’il faut entre 4 et 6 techniciens pour poser les quelques 6.000 rivets sur un assemblage de même type que dans la Hangar 245, un seul homme suffit pour piloter et contrôler un robot du bout des doigts à l’aide d’une tablette digitale. Airbus se défend pour autant de vouloir sacrifier de la main d’œuvre au profit des machines… « Il y aura au final autant d’employés sur une station de production car ils seront affectés au digital, et au pilotage des machines, des tâches à plus haute valeur ajoutée » d’après Airbus.
Alors que le site emploi déjà quelques 13.000 personnes, les 1.000 embauches de l’année en cours sont destinées à soutenir la montée en cadence de la production de la famille A320. « Et il en faudrait 200 de plus, que nous recrutons actuellement » précise André Walter, le directeur du site Airbus à Hambourg. « Nous recherchons des profils formés au numérique. Cela concerne autant la production que la logistique ».
Car outre l’utilisation des robots, Airbus applique de nouvelles méthodes et technologies dans la logistique des matériaux et des pièces « afin d’optimiser la production, d’améliorer l’ergonomie et de réduire les délais. Celles-ci incluent notamment la séparation de la logistique et des niveaux de production, le réapprovisionnement axé sur la demande et l’utilisation de véhicules autoguidés ».
Selon l’avionneur, un technicien est capable après 3 mois de formation de travailler dans un environnement tout digital. Hambourg se veut d’ailleurs avant-gardiste en terme de formation avec la mise en place dans le Hangar 245 d’une initiative inédite qui vise à tester de nouvelles technologies.
Baptisée Airbus Learning & Exploration Factory (LEF), sorte de laboratoire HR 4.0, qui offre aux employés, qu’ils soient expérimentés ou apprentis, de s’investir dans le développement d’un projet pour se préparer au passage vers le tout numérique. Ils peuvent ainsi tester de nouvelles technologies telle la réalité virtuelle et augmentée. « Tout ce que nous apprenons et expérimentons dans le Hangar 245 en matière de robotique servira sans aucun doute aux autres sites », assure Michael Schoellhorn. Avant de rajouter « les autres pays où nous assemblons l’A320, les Etats-Unis et la Chine, ne sont pas ou plus, des pays low-cost en terme de main d’oeuvre… »
Jérôme Bonnard
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C'est quand même la 4è FAL A320 à Hambourg, et l'an dernier il a fallu embaucher plus 1 500 compagnons pour atteindre les objectifs de livraison car la FAL robotisée n'était pas du tout au top (cf papier de Tom Williams)...
Bonjour à tous
Lu sous le titre : " Airbus affirme vouloir gagner en efficacité et en qualité sans pour autant remplacer l’homme… "
Est ce que cette affirmation peut être référencée " Fake news " ? J'ai déjà une petite idée ...... !
Salutations
Moi aussi, j'ai ma petite idée ... Un robot, contrairement à un ouvrier, ne mange pas, ne dort pas, et ne revendique pas (encore soit peu qu'il ait conscience de sa valeur).
Ah, si l'on ne compte que la valeur pour l'actionnaire (drôle de nom pour icelui qui n'a fait qu'acheter un bout de papier pour recevoir du fric)
Un robot n'arrive pas en sifflotant dans l'atelier sur ses petites pattes !
Il ya du développement et des activités support.
Par contre l'automatisme est capable de régularité, ce qui n'est pas la moindre des qualités dans l'aéro, où l'erreur coûte cher.
On peut regarder du côté de la cobotique.
Cela donne une idée des bénéfices pour l'homme, sa santé et la modernisation des métiers "ingrats".
La spécialité s'invite dans le maraîchage par exemple... pour désherber, quand on supprime les phytosanitaires.
La machine au service de l'homme, plutôt que le fantasme d'un monde dominé par la techno.
Levons nous de nos fauteuils, pour observer ce vrai monde, celui qui rempli les rayons et qui nous permet d'obtenir le confort issu des indispensables services d'aujourd'hui !
Et pour fabriquer tout cela il faut du "fric", pour financer en prenant de vrais risques. Entre autre payer des talents, cad. des hommes.
Communication is everything :-) a mon avis le nombre d'employé reste, mais le nombre d'employé par avion diminue... un des problèmes majeurs de toute industrie d'aujourd'hui est de trouver du personnel qualifié. Faudrait qu'ils augmentent les salaires... mais voilà, la concurrence étant...
Aborder le sujet de cette manière me semble pas suffisant car il n'intègre pas la performance globale de l'entreprise qui est évaluée in fine par le marché.
Le prix de vente est un élément clé car personne ne souhaite payer ses billets d'avion plus cher.
Aussi les coûts de production autant que d'exploitation sont des points critiques de la qualité des produits.
Avec le 737 MAX, nous voyons comment les choix technologiques sont déterminant quant à la pérénité de l'entreprise. Choix d'autant plus stratégiques que l'efficacité se révèle dans le temps long, celui des parcours de R&D, avec une part d'incertitudes sur les résultats.
Les emplois sont dans un premier temps déplacés vers la R&D, puis vers d'autres besoins.
Désolé c'est pas glamour pour les nostalgiques, le véritable enjeu des entreprises - et de l'emploi - reste la capacité d'adaptation des équipes à la situation, à la montée en compétences...