SAFIRE, le « Service des avions français instrumentés pour la recherche en environnement » exploite un ATR42 pour une activité de recherche en environnement. Présentation du bimoteur le plus percé de France…
Les bureaux de SAFIRE sont installés dans des préfabriqués et l’ATR 42 est hébergé dans un ancien hangar de l’armée de l’Air, en bordure du terrain de Toulouse Francazal. Le service soigne sa discrétion et il a beau avoir trois autorités de tutelle, le CNRS, le CNES et Meteo France, on sent bien qu’il ne roule pas sur l’or. Budget annuel : 1,6 millions d’Euros pour une équipe de 28 personnes, avec comme outil de travail l’ATR42 secondé par un PA23 Aztec qui évolue dans l’ombre de son grand frère.
Avec sa petite équipe, SAFIRE reçoit les sollicitations des laboratoires de recherche, en France ou à l’étranger. Il met son avion à disposition, adapte les instruments scientifiques qui lui sont confiés, organise les missions, le recueil des mesures et fournit en fin de vol les données recueillies.
La mission première des avions transformés en laboratoires volants porte sur l’activité de recherche en environnement : études de l’atmosphère au-dessus des océans, des terres, étude des phénomènes météo. C’est moins connu mais pas moins passionnant, SAFIRE travaille aussi pour le domaine spatial en participant au développement, à la calibration et à la validation des instruments scientifiques embarqués dans les satellites.
« C’est une activité qui représente environ un tiers de notre activité suivant les années » explique Jean-Christophe Canonici, directeur adjoint du Service. « L’aide à la conception se fait en embarquant des démonstrateurs d’instruments spatiaux qui vont prouver le bien fondé des concepts et solutions techniques employés. L’étape suivante se fait avec un instrument de laboratoire représentatif de celui qui sera envoyé dans l’espace. On le fait voler à bord de l’ATR pour vérifier son bon fonctionnement et affiner le traitement des futures données par le segment sol. Troisième étape, nous participons à la calibration de l’instrument en volant sous la trace du satellite pendant des durées représentatives, pour comparer les données obtenues par l’avion avec celles envoyées par le satellite ».
Principal outil de travail, l’ARTR42-320 immatriculé F-HMTO sert la recherche scientifique depuis 2006. L’avion est sorti de chaine en 1988 et il a commencé sa carrière aux Etats-Unis sous les couleurs de Continental Express avant d’aller trainer ses guêtres en Asie du sud-est. Il a été racheté par Météo France pour renouveler les capacités de recherche aéroportée, en remplacement du Fokker 27 ARAT (F-BYAO) et du Swearingen Merlin IV (F-GMTO) auparavant utilisés dans ce rôle.
Après un chantier de deux ans, il est arrivé à Francazal, hérissé de hublots et autres points d’emport et constellé de prises d’air. Extérieurement, il se situe dans la grande échelle de l’évolution entre le hérisson et l’adolescent boutonneux. « Mais tout ce qui dépasse du fuselage ou de la voilure a une utilité » explique Benoit Cellou, jeune ingénieur de l’équipe informatique et traitement des données. « Les mâts instrumentés présents sur le fuselage et sous les ailes servent à la captation et à la mesure des gouttelettes, cristaux et aérosols présents dans l’atmosphère. De nombreux capteurs sont utilisés pour les prélèvements d’air et notamment l’étude de l’hygrométrie, un des paramètres les plus difficiles à mesurer dans l’atmosphère. A chaque taux d’humidité son type d’instrument particulier… »
Sur et sous le fuselage, des « bassines » abritent des capteurs de rayonnement. D’autres trappes permettent d’installer toute la ménagerie des radars, Lidars, radiomètres et autres caméras. A l’avant, des Pitots scientifiques, des fils fins et le nez modifié en radôme anémoclinométrique permettent d’accéder au vent turbulent. « Attention précise Benoit Cellou : la conduite de l’avion utilise les Pitots d’origine. Par mesure de sécurité, toutes les greffes liées à l’instrumentation scientifique se font sans jamais interférer avec instruments propres à l’avion de base».
SAFIRE est autorisé par la DGAC à intervenir sur l’avion dans les limites d’un STC global, qu’il s’agisse de remplacer les hublots par des capteurs ou d’installer des sondes sous la voilure ou sur le fuselage, sur l’un des nombreux emports existants. Mais à chaque intervention, son propre bureau d’études doit monter un dossier et prouver par le calcul que les modifications sont sans risque. « Après chaque modification, nous réalisons des tests au sol et en vol pour nous assurer qu’aucune interférence électromagnétique ne vient impacter les instruments de navigation de l’avion » précise Benoit Cellou.
On retrouve dans l’avion l’envers du décor visible à l’extérieur. Quelques paires de sièges ont été préservées pour accueillir les expérimentateurs. Mais l’essentiel de la place disponible est occupée par les baies d’instrumentation alignées sur le côté droit du fuselage, et par un véritable laboratoire permettant d’analyser l’atmosphère en temps réel.
Tout à l’arrière, la soute à bagage est occupée aux trois-quarts par une baie d’énergie capable de distribuer 20kVA en vol. L’avion est bien plein et surtout bien chargé avec environ 2,5 tonnes de charge scientifique (y compris les chercheurs) à bord.
A l’ombre de l’ATR42, SAFIRE exploite aussi un Piper PA23 Aztec qui appartient également à Météo France. Les pilotes de SAFIRE possèdent la double qualification pour passer d’un avion à l’autre. La charge utile du Piper est dix fois moindre que celle de l’ATR, mais le Piper joue un rôle actif en secondant le bimoteur sur des expérimentations ciblées.
Comme son grand frère, le Piper est équipé d’une centrale inertielle hybridée GPS et il peut recevoir des systèmes de mesure identiques à ceux de l’ATR. Un Falcon 20 (F-GBTM) a également fait partie de la flotte jusqu’en février 2022. Le biréacteur avait été racheté d’occasion à Dassault Aviation, qui l’avait autrefois utilisé comme avion d’essais.
Le Falcon volait peu, il était en très bon état mais le coût de son entretien devenait prohibitif en raison de l’obsolescence de certains équipements et du manque de rechanges, en particulier pour sa motorisation. L’annonce par Honeywell de l’arrêt de l’entretien des réacteurs Garrett TFE731 a signé la fin des opérations.
La réflexion en cours pour trouver un successeur au biréacteur d’affaires semble être en bonne voie, comme le précise Jean-Christophe Canonici : « Nous disposons maintenant du budget permettant d’envisager son remplaçant, avec même une meilleure capacité d’emport. Le marché d’acquisition pourrait être passé en fin d’année 2025, avec une mise en service après transformation autour de 2029 ».
Le marché portera sur l’acquisition d’un avion neuf ou d’occasion et sans doute des services d’accompagnement. Une seule certitude : intervenant en complément des ballons sondes et des drones du CNES, l’avion reste la meilleure solution pour obtenir des mesures in situ ou en télédétection, en tout lieu et avec la plus grande flexibilité d’emploi possible. L’équipe de SAFIRE est d’ailleurs une habituée des déplacements internationaux sous différentes latitudes nécessitant une préparation opérationnelle, logistique ou même diplomatique très fine.
Non pas que l’activité en France soit toujours simple : « C’est aux préfectures qu’il revient de nous accorder les autorisations de survol des zones habitées en basse altitude., explique Jean-Christophe Canonici. C’est souvent long et procédurier, et cela s’accompagne très régulièrement par l’obligation d’expliquer notre activité dans la presse locale pour que les habitants ne s’alarment pas de voir notre avion bizarre très bas au-dessus de leurs têtes… »
MBDA vient de finaliser le rachat des 50% de parts détenues par Safran et intègre… Read More
Les biplaces d’entrainement militaire UTS-800 sont livrés par le constructeur russe Ural Civil Aviation Plant… Read More
Les autorités chinoises (CAAC) ont annoncé le 2 janvier 2025, la certification du premier aéronef… Read More
Pendant un mois, en partenariat avec Azur Drones, l’aéroport de Bordeaux a mené une expérimentation… Read More
Bien que la production de carburant d’aviation durable (SAF) ait doublé entre 2023 et 2024,… Read More
Le Cessna SkyCourier, a obtenu la certification de type de Transports Canada, Aviation civile (TCAC), mi-décembre… Read More
View Comments
Bonjour,
Un très bon article.
Le Mystère 20 et le Swearingen Merlin sont chez Aeroscopia et c’est une excellente chose.
Savez vous ce qu’est devenu le Fokker ARAT?
Merci beaucoup
Bonne et heureuse année
Yves