Le gouvernement français a lancé, le 14 février 2023, un groupe de travail pour favoriser le développement des carburants d’aviation durables. Il regroupe des acteurs de haut niveau de l’aérien, de l’aéronautique et de l’énergie. L’objectif qui est loin d’être nouveau, est de créer en France une filière de carburants d’aviation durables.
A-t-il fallu vraiment trois ans et trois ministres pour décider d’installer un groupe de travail ? Pour mémoire, le 27 janvier 2020 à Toulouse, l’actuelle première ministre qui était alors ministre de l’Environnement lançait un Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI). L’objectif était d’identifier les projets d’investissement dans des unités de production de biocarburants durables pour l’aviation de deuxième génération en France. Il y avait sur la photo, outre le ministre des Transports, le PDG d’Airbus, le directeur de l’innovation de Safran, la directrice générale d’Air France, et des représentants de Suez Recyclage et de TotalEnergies Aviation. Que du beau monde et des déclarations d’intention.
Trois ans plus tard, les ministres de la Transition énergétique, de l’industrie et des Transports resservent les mêmes éléments de langage. « Les carburants durables, biocarburants issus de biomasse ou carburants de synthèse (e-fuels), peuvent permettre des gains d’émissions de gaz à effet de serre de 70% à 95% sur l’ensemble de leur cycle de vie par rapport au kérosène fossile. Il s’agit d’un levier de décarbonation indispensable pour le secteur aérien, à la fois à court et moyen terme mais aussi à plus long terme, notamment pour les vols long-courriers. »
Et d’ajouter que « L’atteinte de ces objectifs ne pourra se faire qu’à travers une parfaite coordination de tous les acteurs de la filière : producteurs de carburants durables, constructeurs d’aéronefs, acteurs aéroportuaires et compagnies aériennes. » Il est donc décidé que cette « parfaite coordination » passe par la création d’un groupe de travail présidé par les ministres chargés de l’Energie, des Transports et de l’Industrie. « Ce groupe de travail a pour objectif de rassembler régulièrement l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur, afin de partager des objectifs communs, à la fois en termes de production de carburants durables, d’incorporation effective de biocarburants et de construction d’aéronefs certifiés pour voler avec 100 % de carburants d’aviation durables. »
Dire qu’il ne s’est rien passé depuis trois ans serait évidemment faux. Les ministres ont présenté les lauréats de l’appel à projets « Développement d’une filière de production française de carburants aéronautiques durables« , lancé en 2021 dans le cadre de la Stratégie nationale « Produits biosourcés et biotechnologies industrielles – Carburants durables » de France 2030. Il s’agit de « projets de démonstration de procédés de production de carburants aéronautiques durables et des travaux de pré-ingénierie de processus nécessaires pour engager un projet de production dans la phase de décision d’investissement industriel. » Nous ne sommes pas encore entrés dans le vif du sujet…
Les ministres ont aussi annoncé qu’ « Afin de passer désormais à une phase d’industrialisation et de création d’unités de production de biocarburants, a été décidé le lancement d’une consultation flash des acteurs afin d‘identifier les freins à lever et d’élaborer des modalités d’accompagnement adaptées, d’ici le salon du Bourget au mois de juin. »
A défaut de filière française des carburants d’aviation durable dont le démarrage est laborieux, la filière aéronautique est passée à l’action. La FNAM (Fédération nationale de l’aviation marchande), le GIFAS (Groupement des industries françaises de l’aéronautique et du spatiale) et l’UAF(Union des aéroports français) ont – en étroite collaboration avec les principaux acteurs du secteur et les représentants de la filière énergétique – travaillé 6 mois, dans le cadre de l’article 301 de la loi climat et résilience, à l’élaboration d’une feuille de route de décarbonation détaillée, précisant les actions à mettre en œuvre afin d’atteindre les objectifs de baisse des émissions de CO2 fixés par la stratégie nationale de développement bas-carbone (SNBC). Cette feuille de route a été remise officiellement le 14 février 2023 aux Ministres de la Transition Énergétique, de l’Industrie et des Transports. Histoire de leur faire gagner un peu de temps…
Comme l’ont déclaré les trois fédérations professionnelles, « le secteur aérien français s’engage désormais de nouveau à prendre toute sa part dans la nécessaire transition écologique. » Elles ont aussi rappelé aux ministres que le secteur s’était engagé à atteindre la neutralité Carbone en 2050, conformément à l’Engagement LTAG (Long Term Aspirational Goal) pris en octobre 2022 par l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) et ce, dans la continuité de la déclaration de Toulouse de février 2022 sous la Présidence française de l’Union européenne.
« Sur la base de travaux scientifiques, la feuille de route remise ce jour démontre que ces objectifs sont réalistes, crédibles, et à portée de main, en activant plusieurs leviers dont la conception et le déploiement d’avions de nouvelles technologies, plus économes sur le plan énergétique et moins bruyants et d’un usage massif de nouveaux carburants décarbonés. Le soutien de l’État sera indispensable au regard des investissements nécessaires. Il conviendra par ailleurs de conduire également les efforts opérationnels indispensables en matière de navigation aérienne ainsi que la nécessaire adaptation des infrastructures aéroportuaires. »
Pour la FNAM, le GIFAS et l’UAF, « La France doit saisir, faute d’être distancée, cette double opportunité que constituent le développement d’une filière souveraine de carburants décarbonés et l’industrialisation en France et en Europe d’une nouvelle génération d’avions bas-carbone commercialisés dans le monde entier ».
« Distancée ». Et c’est effectivement là que réside la principale menace. Les Etats-Unis n’ont pas eu besoin ni de grand-messe ni de groupes de travail présidés par des ministres pour se mettre en ordre de bataille. Ils sont déjà en train de construire des raffineries. La filière française à rendez-vous au salon du Bourget. Espérons que les ministres viendront avec du concret.
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