CFM International fête, en 2014, 40 ans de succès industriels et commerciaux. Le co-entreprise franco-américaine est un exemple unique de coopération industrielle internationale. La réussite est liée à la forte personnalité de deux visionnaires : l’américain Gerhard Neumann et le français René Ravaud.
Coentreprise à 50/50 de Snecma et General Electric, CFM International fête 40 ans de succès. Non moins de 36.000 moteurs CFM56 vendus, 700 millions d’heures de vol accumulées, la succession assurée par le LEAP en cours d’essais. Il s’agit, de loin, de la plus importante coopération industrielle franco-américaine, toutes disciplines confondues et, tout comme Airbus, elle est née de la rencontre d’hommes visionnaires qui ont forcé le destin. Deux motoristes étroitement complémentaires, en quête de reconquête, se sont trouvés, dans les années soixante-dix, sous la responsabilité de grands capitaines d’industrie, dissemblables au possible, mais bien décidés à reconquérir le marché de la propulsion aéronautique civile.
La branche Aviation de General Electric, groupe puissant, symbole fort de l’économie de marché pure et dure à l’américaine, était alors dirigée par une forte personnalité, Gerhard Neumann, meneur d’hommes talentueux d’origine allemande, tandis que René Ravaud, grand commis de l’Etat, responsable du groupe Moteurs du comité de l’industrie aéronautique et spatiale du VIe Plan, venait d’être nommé à la tête de Snecma. Laquelle, née en 1946 de la nationalisation de Gnome & Rhône et de Renault Aviation, se cherchait un destin civil tout en produisant les moteurs Atar des chasseurs Mirage de Dassault.
Un marché potentiel était été clairement identifié, celui d’un moteur civil de nouvelle génération de la catégorie des 10 tonnes de poussée, capable de propulser économiquement des court/moyen-courriers durement touchés par les conséquences économiques néfastes du grand choc pétrolier de 1973.
Pour atteindre son objectif, Snecma avait besoin d’un partenaire, idéalement américain. United Aircraft (futur groupe United Technologies) détenait à cette époque 10,9 % du capital de Snecma et semblait tout désigné. Mais l’osmose entre Neumann et Ravaud en décida autrement. D’où la décision pour le moins audacieuse de travailler ensemble, en bousculant les idées reçues. D’un côté, en effet, le géant G.E., de l’autre une entreprise nationale, « a state-owned company », le diable pour nombre d’observateurs et d’analystes américains.
Les règles du jeu ont privilégié la simplicité : une répartition des tâches à parts strictement égales, aucune duplication dans les fabrications (mais deux chaînes d’assemblage final, l’une aux Etats-Unis, l’autre en France), chacun des deux partenaires conservant la maîtrise de ses coût, sachant que le prix de vente du moteur était évidemment décidé en commun. Les bureaux d’études se sont bien entendus, les avant-projets GE13 et M56 ont été fusionnés et, d’entrée, le résultat commun est apparu comme un moteur bien né. Malheureusement, le démarrage commercial fut décevant, au point de susciter le découragement des deux équipes, voire des idées noires de renoncement.
Curieusement, c’est un projet de remotorisation de « vieux » DC-8 allongés qui a sauvé le programme, le premier de ces avions étant livré en avril 1982 à Delta Air Lines. La suite est connue : lancement en fanfare de l’Airbus A320 en 1984, modernisation et remotorisation du Boeing 737, applications militaires (ravitailleurs en vol KC-135, AWACS), pour construire un succès spectaculaire et profitable.
Le partenariat franco-américain a récemment été reconduit jusqu’en 2040, une simple formalité. Le bref séjour outre-Atlantique du président François Hollande, il y a quelques jours, a permis de fêter dignement les 40 ans de CFMI. Plusieurs ministres avaient fait le déplacement, heureux de participer à une célébration due à la réussite de leurs lointains prédécesseurs mais, surtout, du tandem Ravaud-Neumann. Lesquels, malheureusement, aujourd’hui, comptent bien peu de disciples.
Pierre Sparaco
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Le succès de CFM International ou la rencontre de deux visionnaires
Bien d'accord avec tous ces commentaires. C'est toujours agréable de commenter le succès !
Mais il ne faut pas oublier quelques chiffres fabuleux : Il y a déja plus de dix ans qu'un CFM 56 sur B 737 passait sa 40.000 eme heure de vol sans avoir été déposé .... Ah, les 30 heures de l'Hispano de Guynement !
Le succès de CFM International ou la rencontre de deux visionnaires
Le succès de ce moteur est aussi du au fait qu'il motorisait l' A320, un avion aussi innovant. S'il aurait apparut un peu plus tôt il pouvait aussi équiper le Mercure qui n'avait grand chose d'innovant par rapport au B737-200.
Le succès de CFM International ou la rencontre de deux visionnaires
Sans diminuer le mérite de mon camarade et ami René Ravaud, qui a mené à bien la difficile tâche de réussir le lancement de la famille CFM, je crois utile de rappeler que Gehrard Neuman avait, dès 1968, posé les bases sur lesquelles ce succès s'est établi, en croyant à Airbus et en se déplaçant personnellement pour établir la coopération avec SNECMA et MTU sur le CF6 lorsque mon choix technique et commercial (approuvé par Henri Ziegler) lui donnait la préférence sur Pratt et Rolls, mais que la "Politique" était contre. Sa proposition finale -de confier 25% du travail aux européens, non seulement sur les moteurs Airbus, mais aussi sur ceux des DC10, et de financer à la place d'Airbus l'acquisition des nacelles Rohr Douglas et les huit moteurs des avions d'essai - a résolu le problème. C'est le bon climat de cette coopération, maintenu quand Ravaud a pris les rênes, qui a contribué à ce développement remarquable.
Le succès de CFM International ou la rencontre de deux visionnaires
Il faut dire que les américains de GE ne risquaient pas grand-chose, ils ont mis dans la corbeille de la marié la partie chaude du moteur qui avait été développé pour le bombardier B-1 aux frais du pentagone. Les français ont du investir dans un tout nouveau développement qui était la souflante et la partie froide, « moins noble » si ont peut ainsi dire.
Le succès de CFM International ou la rencontre de deux visionnaires
Bonjour,
Je n'ai pas la prétention d'une compétence égale à celle de M. Sparaco, mais il me semble que pour évoquer cette alliance un nom est absolument incontournable : celui du président Richard NIXON. Car c'est lui, très francophile, qui a calmé les oppositions farouches venant essentiellement du milieu militaire américain. Et sans sa présence au bon moment et au bon endroit, je crois que le projet n'aurait pas abouti ou pour le moins délayé.
Le succès de CFM International ou la rencontre de deux visionnaires
Une petite precision tout de meme, GE a en charge la partie "noble" du moteur (partie chaude).
Ce qui a fait dire a l'epoque que l'association n'etait pas si egale que ce qu'il y paraissait.
Le succès de CFM International ou la rencontre de deux visionnaires
@ michael
Cela a peut être été vrai à une époque (et encore)... Mais si l'on considère les moteurs d'aujourd'hui, où le rôle de la soufflante est beaucoup plus important, le partage n'est certainement pas défavorable à Snecma. L'entreprise française a d'ailleurs mis au point pour le Leap une remarquable aube de soufflante, tissée en trois dimensions.
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J'ai même entendu dire que Ravaud et Neumann, qui s'entendaient très bien, ont d'abord décidé de "faire quelque chose ensemble" avant de décider que ce serait le CFM56 !