L’infusion des composites est une ancienne technologie remise au goût du jour dans la construction amateur d’un ULM, démonstrateur technologique. Si les essais en cours se révèlent concluants, l’infusion pourrait devenir une alternative aux méthodes actuelles de production des composites préimprégnés, et, à terme, révolutionner la production des avions légers.
Dans son nouvel atelier, Bernard Stervinou qui a choisi de recourir à l’infusion des composites pour construire son ULM Nijal, va pouvoir apporter une conclusionpositive à ce concept. Cet expert convaincu et qui essaie de convaincre, s’est mis en tête de démontrer, sur un exemple concret, les avantages de cette technologie sur les trois thèmes récurrents que sont la qualité (caractéristiques mécaniques), le prix de revient (coûts de production, coût de l’acquisition des matériels dédiés et de la technologie) et la cadence de production. Les constructeurs de bateaux qui ont franchi le pas ne le regrettent nullement. Mais passer d’une technologie à une autre suppose une prise de risque qui peut paraître incertaine. D’autant plus que la situation économique ou industrielle n’est pas favorable.
Sans entrer dans les détails, pour réaliser, selon le procédé classique, des pièces de structure en composites par la technologie des tissus préimprégnés (dans la « grande aéronautique »), la procédure consiste :
– à polymériser sous vide (pression de 1 bar) ou en autoclave (de 2 à 15 bar)
– à température (de 70 à 180 °C)
– un empilement de tissus préimprégnés (imprégnés de résine époxy contenant un durcisseur)
– dans un moule (à la forme extérieure de la pièce)
– éventuellement séparés par un matériau sandwich (nida ou mousse) rigidificateur
– la mise sous vide ou en pression suppose d’intercaler, en surface de la pièce un certain nombre de films étanches.
Les avantages de ce procédé [Le process décrit ci-dessus est volontairement simplifié, [le lecteur intéressé pourra se reporter à une nombreuse littérature sur internet.[/note] sont notamment liés aux caractéristiques mécaniques du matériau de base (à titre d’exemple, l’AU4G, l’alliage d’alu le plus fréquent en structure est donné pour 400/500 Mpa en résistance à la rupture, la fibre de carbone unidirectionnnelle/époxy pour 1200/1800 Mpa) et la légèreté (AU4G : 2.7 kg/dm3, fibre de carbone époxy : 1,5 kg/dm3). Ses inconvénients sont en rapport avec le coût des matériaux, le coût de l’expertise (mise en œuvre, contrôle), la faible automatisation, le coût des outillages (master, moule), et encore le coût de l’utilisation de l’autoclave. Les entreprises ont donc besoin d’amortir cette technologie et le savoir-faire associé sur de nombreuses années.
Très schématiquement, l’infusion consiste à réaliser dans un moule identique au cas précédent, un empilement de tissus secs. Une fois la mise sous vide réalisée, l’objectif est de faire migrer la résine sur l’ensemble de la pièce grâce à des produits (films, tissus) poreux qui accélèrent ou freinent la résine. Donc pas de pression (pas d’autoclave) et température ambiante.
Bernard Stervinou a les pieds sur terre : s’il est fermement convaincu de l’avenir de ce procédé, il sait qu’il lui faut le prouver concrètement, d’où le choix technologiquement difficile de l’ULM, qui doit respecter une certaine masse et un coût de production modéré.
La structure du Nijal :
– Le longeron de voilure est réalisée classiquement en préimprégnés en autoclave.
– Les extrados en sandwich comprenant le longeronnet sont infusés en une fois.
– Les intrados en sandwich sont aussi infusés
– Le fuselage complet, y compris la cloison pare feu, la dérive et les raidisseurs de fuselage, est réalisé en infusion « one shot ».
Bernard Stervinou a reçu, pour cette réussite, un « Award » au Salon des Composites, le renommé JEC de la porte de Versailles. Son pari : répondre aux 3 critères : Qualité, Prix de revient, Cadence
Qualité
+ Les qualités mécaniques des composites infusés sont égales ou parfois supérieures à celles des préimprégnés du fait du taux volumique de fibre de l’ordre de 60% et du fait du plus faible taux de porosité.
(+) Facilité de réalisation de très grandes pièces.
(+) Possibilité de monolithique complexe et épais.
(+) Possibilité de sandwich complexe.
(+) Hygiène de travail
(-) Gel coat compliqué dans certains cas, voir impossible, donc peinture.
Prix de revient
(+) Outillage économique (travail à froid)
(+) Pas de passage en autoclave.
(+) Bonne rentabilité dans le cas des sandwichs.
(-) Coût des consommables (identiques au préimprégnés)
(-) Expertise complexe
Cadence
(+) Possibilité d’intégration de fonctions impossible en préimprégnés
(+) Pas de limite de péremption des produits.
(-) Cadence faible.
Bernard Stervinou possède déjà les réponses à de nombreuses questions, le Nijal est un démonstrateur de cette technologie. Verdict quand l’aéronef sera terminé.
Jean-Marie Klinka
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Bonjour,intéressé pour faire un Gazaile 2en infusion carbone, je recherche un contact téléphonique de celui qui c'est filmé lors d'une infusion de ce modèle sur Youtube.
Merci et bonnes fêtes.
Philippe
Bonjour
J ai le même intérêt
Avez vous obtenu les coordonnées pour les moules de gazail 2?
Merci
Marc
Bonjour,
Un plan Gazaile d'un autre brestois Serge Pennec en infusion.
Et on ne le regrette pas. Ce qui fait peut dans l'industrialisation c'est l'ensemble des certifications nécessaires pour "vendre". Alors qu'au niveau amateur, nous n'avons pas ces préoccupations.
Dommage pour le projet de Bernard Stavinou, nous de notre coté nous souhaiterions monter un projet collaboratif en mettant à disposition des constructeurs les moules, matériaux, périphériques et autres. Ceci à terme car d'abord terminons nos Gazaile.
La vidéo succincte retraçant les opérations : https://www.youtube.com/watch?v=MUZlyEELdZ0
Eric MARTIN
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
Bonjour Jean Marie
Il existe un certain nombre d'avions infuses a ce jour, aussi des petits.
Nous avons en 1997 infuse des ailes de modèles réduits, étant dans la région de Seattle en ce moment j'ai visite un constructeur bien connu qui infuse ses éléments.
Les constructeurs d'éoliennes infusent leurs pales, que ce soit au Danemark ou en Allemagne il existe meme un constructeur qui infuse moule ferme
Les ailes du prototype du planeur ETA ont été infusées pour le numéro un.
Jaro Muller infuse les ailes de ses F 3 B aussi depuis très longtemps.
Philippe
Merci de me faire parvenir le Pdf de la conference a mon e mail
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
Bonjour
En réponse à Moltobaleze .
Le titre de la présentation de JMK aurait peut être dû préciser "quel avenir pour l'infusion des composites dans l'aviation légère"? Car la comparaison preg et infusion s'adressait surtout aux avions légers. Dans la "grande aéro" l'infusion est bien sûr employée et de plus en plus de pièces sont là pour le démontrer. Expliquer l'infusion classique dans un article pour tout public est déjà une gageure mais expliquer l'intérêt, les difficultés et les limites du LRI s'adresse dans ce cas à un public de professionnels. .
Comme pour les matériaux il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises technos il faut comme vous le soulignez que le couple matériaux/procédés soit adapté au besoin. Adopter un process de type LRI pour l'aviation légère serait ruineux, l'utilisation à chaud des résines monocomposants , les membranes microporeuses, les tissus poudrés, les contre formes d'outillages et le savoir faire associé sont réservés à des sociétés comme Airbus, Dassault ....Dans ce cas certaines caractéristiques mécaniques sont comparables au preg autoclave et "parfois supérieures".
Dans l'infusion à froid les caractéristiques mécaniques sont presque toujours inférieures à celles obtenues par du preg autoclave mais cet écart peut être assez faible comparé à celui du coût .L'infusion à froid est une alternative économique au preg dans beaucoup de pièces d'avions légers ou l'automatisation est difficile . (Coriolis vend ses robots à des sociétés de type Airbus)
BS
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
Pour ceux que l'infusion pourrait intéresser, ci-joint une conférence intéressante de B. Stervinou.
JM Klinka
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
les constructeurs français d'aeronefs en composites, ne sont ( helas ) pas nombreux, personne ne veut bouger, ni investir , ce qui fait que nous allons continuer de nous faire manger par les autres pays Européens...est-ce la fin de note construction aero de loisirs, comme cela a été le cas pour la machine outils, ou plus près de nous,les planeurs.
ce que l'on appelle la contribution à la fabrique de chomeurs, même,si dans l',aero, ils ne ont pas nombreux, dans l' industrie, ce n'est pas pareil
bonne chance à Bernard Stervinou
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
Je suis tout à fait d'accord avec la conclusion sur le couple matériau-procédé et je regrette que le pdf trop lourd de la conf. de B. Stervinou ne soit pas passé car cet aspect, non évoqué car difficile à résumer, est capital.
Trés intéressant aussi: la cloison de fuselage de l'A350 infusée. Celle de l'A380, un chef d'oeuvre, était en preg. Le progrès. Le temps.
En résumé, ce n'est pas une révolution mais seulement une évolution qui va se propager vers la construction amateur, comme pour les bateaux.
Jean-Marie Klinka
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
en réponse à motobaleze...
comparter Airbus et Dassault aux petites constructeurs aero, c'est pour le mois original et certainement une mauvaise vision des choses !
pendant que certains distriibuent des dividendes à leurs actionnaires, les autres courent après les fins de mois avec le banquier à la porte, qui, lui, ne fait pas que des sourires !
demandez à Bernard Stervinou qui a dû mettre sont projet en sommeil après s 'être faire virer du local qu'il utilisait.
une petite question à notre ami, pourrait -il aider, d'une façon ou d'une autre , Bernard Stervinou ? ce serait mieux que de nous faire une litanie qui me rappelle celle de mes bons professeurs quand j' allais à l' école !
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
Bonjour
C'est vrai que les constructeurs Français d'Aeronefs sont peu nombreux.
Mais il existe tout de même quelques constructeurs qui "osent" le composite.
Je pense à un petit constructeur qui s'appelle Airbus (...) qui commence à envisager le composite ... (depuis les années 80 en fait ... et aujourd'hui l'A350 ne comporte qu'environ 50% - tout dépend comment on compte .. en masse ou en références ...).
Les moteurs LEAP de CFM comportent des aubes fan en carbone développées et fabriquées en France.
Pour des constructeurs de moindre envergure, la structure du Cabri de Bruno Guimbal est largement composite, celles de APM de Philippe Moniot de même, celles des avions de Dynaero ...
Certes New Robin semblent avoir pris une autre position.
Pour continuer dans le domaine de l'aviation générale, ni Dassault ni Airbus Hélicoptères ne sont en reste.
Le mot composite est un mot enveloppe qui regroupe de nombreux matériaux : des carbones (différents selon leurs caractéristiques) sous forme de fibre, de nappes, de tissus, des hybrides verre-carbone, des verres (moins utilisés aujourd'hui), des aramides (Kevla est une marque), des nidas, des mousses, des résines (thermodurcissables, thermoformables, ...)
Mais aussi de nombreux procédés tels que la cuisson en autoclave (classique pour les grands avionneurs et moins accessibles -économiquement- aux plus petits, quoique Guimbal (par la sous-traitance) et Moniot ont tendance à démontrer le contraire), le formage des composites thermoplastiques, les technologies hors autoclave telles que le transfert de résine (RTM) auxquelles l'infusion appartient.
Il faudrait aussi ajouter les collages, les technologies de dépose de fibre, de nappe, ...
La filière composite Française n'a pas à rougir de sa position.
Avec de nombreux acteurs en pointe de la techno. Airbus-Avions à Nantes, Daher-Socata à Nantes et Tarbes, Airbus-Helicos à Marignane et La Courneuve, Stelia (Ex Sogerma et Composites Aquitaine) à Bordeaux, Corse Compostes, Duqueine, ...
Il faudrait aussi parler des entités de R&D comme le Pole de Plasturgie de l'Est, des fabricants de machines de déposes de fibres comme Coriolis ...
Ne pas oublier les fabricants de matériaux parfois intégrés aujourd'hui à des grands groupes transnationaux : Brochier (intégré dans Hexcel) ou Chomarat.
Tous contribuent à la fois au progrès des technologies et des process.
Cette liste ne peut être ici exhaustive et les oubliés me pardonneront.
Alors que l'infusion nous soit présentée comme une innovation majeure va probablement faire sourire les connaisseurs : l'A350 comporte probablement la plus grande pièce en infusion sur un avion certifié : la cloison étanche arrière (et bien sur de nombreuses autres pièces).
Et c'est une bonne chose qu'elle puisse être utilisée pour un ULM
Mais l'affirmation que l'infusion serait meilleure que les technologies classiques (pre-imprégnées) est un peu rapide; car en technologie composite la technologie ne peut se juger sans parler des matériaux utilisés. C'est pour cela que l'on parle chaque fois de couple matériau-procédé.
Chacune de ces technologies a ses intérêts : face au pré-imprégné "monopolistique" depuis près de 20 ans), la place des technologies "hors autoclave" ne peut qu'être croissante.
Mais nous arrivons à un point d'équilibre ou chacune des solutions a ses avantages et inconvénient et selon les caractéristiques mécaniques, économiques, de masse, de production, ... nous aurons un choix matériau-process qui s'imposera.
En attendant qu'un nouveau couple matériau-procédé démontre son intérêt.
Quel avenir pour l’infusion des composites ?
" Les constructeurs de bateaux qui ont franchi le pas ne le regrettent nullement " : constructeurs tant industriels, qu'artisanaux ("chantiers") et qu'amateurs.