La spécialiste de l’Algérie a-t-elle vu trop grand en se lançant sur le long-courrier ? Il aura fallu plusieurs faux départs et une recomposition de l’actionnariat avant que ne décolle le premier A330 aux couleurs d’Aigle Azur. Un an plus tard, la flotte est clouée au sol et les 1.150 salariés sont dans l’attente d’un hypothétique repreneur.
En 2001, alors que la flotte d’Aigle Azur ne comptait plus qu’un avion, GoFast (qui deviendra en 2017 Weaving Group) rachète Aigle Azur avec « l’objectif de développer le pavillon français sur des marchés affinitaires avec un positionnement de proximité. »
Sous l’impulsion d’Arezki Idjerouidene, puis de son fils Meziane Idjerouidene, Aigle Azur se redresse. En 2010, le Groupe décide d’ouvrir le capital de sa filiale afin d’étendre son modèle sur le secteur long-courrier. Le premier épisode de ce processus visant à renforcer et à diversifier l’actionnariat de la compagnie, débute dès 2012 avec l’entrée du groupe chinois HNA. L’ouverture du secteur A330 va être une longue suite d’annonces et de reports avant que le premier vol long-courrier ne décolle.
Le 10 août 2017, Frantz Yvelin est nommé président de la compagnie, en remplacement de Michael Hamelink, dans un contexte social dégradé. Aigle Azur est en conflit avec ses pilotes à propos des conditions de travail. Au cœur de la saison Eté 2016, deux grèves entraînent des annulations de vols. A cette époque, la compagnie dessert l’Algérie, le Portugal, le Mali, le Sénégal, la Guinée et le Liban au départ de 6 villes françaises, avec une flotte d’A319 et d’A320. Elle transporte près de 2 millions de passagers par an.
En novembre 2017, Weaving Group cède sa participation minoritaire qu’il détenait au capital d’Aigle Azur à David Gary Neeleman, un entrepreneur américano-brésilien, à l’origine de la création de quatre compagnies aériennes – Morris Air (USA), WestJet (Canada), JetBlue (USA) et Azul (Brésil) – et qui en 2015, est entré au capital de TAP Air Portugal. Frantz Yvelin est maintenu dans ses fonctions.
La quarantaine, Frantz Yvelin est à l’origine de la création des compagnies aériennes 100% Affaires « L’Avion » (2006) et « La Compagnie » (2013), spécialisées dans la desserte de New York au départ de Paris avec des avions offrant exclusivement une classe affaires. La nouvelle direction d’Aigle Azur décide d’ouvrir le réseau. Jusque-là spécialisée dans la desserte de l’Algérie, elle se lance sur Moscou et Berlin, fin 2017. Au salon IFTM-Top Resa, Frantz Yvelin déclare qu’« Aigle Azur sera désormais là où l’on ne l’attendait pas forcément. »
Le 5 juillet 2018, la compagnie française ouvre une ligne directe entre Paris-Orly et Sao Paulo Viracopos, en A330. Aigle Azur entre dans l’ère du long courrier. Les rebondissements n’auront pas manqué pour en arriver là…
La stratégie long-courrier d’Aigle Azur a, en effet, été annoncé fin 2012. Elle aurait dû se concrétiser avec le lancement de la ligne Paris – Pékin le 28 juin 2014. Reporté dans un premier temps à la fin 2014, le projet est finalement suspendu. Cédric Pastour, alors à la tête d’Aigle Azur, évoque l’impossibilité de survol de la Sibérie et l’échec des négociations avec ses pilotes. « Malgré les difficultés récurrentes que nous rencontrons sur l’interprétation des accords aériens avec la Fédération de Russie, Aigle Azur reste déterminée à se diversifier vers une activité long-courrier. » Au même moment, la compagnie arrête la desserte de Moscou, impactée par la guerre en Ukraine.
La flotte d’Aigle Azur se compose alors de 11 Airbus de la famille A320. Son capital est détenu à hauteur de 48% par le groupe chinois HNA. Elle continue d’afficher des pertes.
Il faudra attendre l’entrée dans le capital de la compagnie de David Gary Neeleman et la nomination à sa tête de Frantz Yvelin pour voir le projet long-courrier refaire surface. La compagnie française commande deux Airbus A330-200. Le premier est livré en avril 2018, et le second, en mai 2018. Ils sont loués à AerCap. Faute d’avoir obtenu les autorisations des autorités pour ouvrir ses lignes sur Pékin et Sao Paulo, ils assurent la desserte de Porto et de Bamako dans un premier temps, puis l’Algérie.
Finalement, le 5 juillet 2018, un A330-200 aux nouvelles couleurs d’Aigle Azur décolle d’Orly à destination de Sao Paulo. Le 5 septembre suivant, la compagnie ouvre sa seconde ligne long-courrier sur Pékin. Le choix de ses deux destinations a été dicté par les actionnaires. Les vols sont connectés aux hubs d’Azul à Sao Paulo et à celui d’Hainan Airlines (filiale de HNA) à Pékin.
Dans le même temps, la compagnie française met en place des partenariats avec Corsair, Air Caraïbes, Azul Brazilian et Tap Portugal pour assurer le remplissage de ses long-courriers de 282 places, configurés en bi-classe, Affaires (19 sièges) et Eco (263 sièges). Sur Pékin, le prix d’appel est de 195 € TTC l’aller simple.
Au terme d’une première année d’exploitation, le bilan de Sao Paulo est nettement meilleur que celui de Pékin. Au printemps 2019, Aigle Azur annonce « l’augmentation du nombre de ses vols direct » vers le Brésil et suspend temporairement la Chine « dans l’attente de la réorganisation de sa desserte de Pékin ».
En août 2019, le ton est différent. « La stratégie passée d’Aigle Azur était adaptée à sa situation d’antan. Lorsque son nouveau management en a pris la direction il y a deux ans, l’entreprise avait une structure trop lourde doublée d’une activité trop faible pour celle-ci. Avec l’appui et surtout les assurances de ses partenaires : le chinois Hainan Airlines (filiale de son actionnaire de référence le groupe HNA) et le brésilien Azul, le développement des vols longs courriers sur ces destinations était la meilleure réponse à apporter car garanti par ces partenariats et donc sans risques. Imprévisible, des évolutions récentes dans le soutien apporté à Aigle Azur par ses actionnaires a mis à mal cette stratégie. »
Cette déclaration est faite le 8 août 2019 par communiqué de presse suite à un article du Figaro, du même jour, faisant état de graves difficultés au sein d’Aigle Azur. A l’occasion de ce démenti, la compagnie déclare quelle « affiche près de 25 millions d’euros de trésorerie à date. ». La réalité de la trésorerie sera différente et va accélérer la cessation d’activité d’Aigle Azur, le 6 septembre 2019, au soir. Pour les repreneurs potentiels le délai pour déposer leurs offres est fixé au 9 septembre 2019, en milieu de journée. Pour les 1.150 salariés de la compagnie française les semaines à venir s’annoncent éprouvantes.
Gil Roy
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La réalité est celle-ci :
En 25 ans la quantité de passagers a augmenté suivant une croissance qui à fait doubler leur nombre tous les quinze ans.
En revanche les couts d'exploitation d'un avion n'ont pas évolués dans ces proportions mais plutot à l'opposé.
Depuis 25 ans en Europe les voyagistes et les compagnies aériennes veulent faire croire que l'on peu voyager en avion comme en acheter un simple ticket de metro bon marché.
C'est partiellement vrai, mais à une seule condition : faire diminuer les couts d'exploitations des avions dans un cadre d'effet d'echelle. En clair il faut une flotte pour diluer d'avantages de couts d'exploitation directs et indirects.
Consequences : celui qui possede la plus grosse, flotte, volera pour moins cher.
Pour que les compagnies concurentes s'alignent sur ces prix : ce n'est pas possible à flotte de taille inferieure.
Les marchés de niches Algériens de ZI du temps de l'Algérie corrompue se sont taris avec le depart en chaise en roulante de Bouteflika.
De même qu'exploiter 2 A330 uniques sans couverture commerciale et financiere à long terme derriere est suicidaire.
Conclusion : ces compagnies concurentes vendent à des prix déraisonnables pour devenir attractives aux yeux du passager, jusqu'a ce que mort s'en suive faute de resultats suffisements positifs puis de tresorie insuffisante.
CQFD
Conclusion : n'achetez pas votre billet d'avion n'importe ou.