Air Caraïbes expérimente « la formation aux différences » pour ses pilotes d’A330 sur A350-900

Air Caraïbes est la première compagnie française à exploiter l’A350XWB. Elle est aussi la première à former ses pilotes d’A330-200/300, aux différences, selon les préconisations du constructeur. Airbus a en effet obtenu des autorités qu’une seule et même qualification de type couvre les deux avions appartenant pourtant à deux générations distinctes. Sous la loupe de la DGAC, Air Caraïbes est en train de réaliser un tour de force pour que ses 80 pilotes soient aptes à voler indifféremment sur A330 et A350 d’ici le démarrage de la haute saison.

Il faut aller vite. C’est la raison pour laquelle, la réception du premier A350-900 d’Air Caraïbes (28 février 2017) suivie, le lendemain par le vol inaugural, se sont transformés en sauts de puce à l’intérieur de l’hexagone. Pour être aptes à voler aussi bien sur A350XWB que sur A330, les pilotes d’Air Caraïbes doivent non seulement avoir suivi avec succès une formation au sol sur A350-900, mais aussi totaliser huit étapes sur A350-900. Et c’est là que la direction des opérations en vol joue serré.

Deux décennies d’écart entre l’A350 et l’A330

La formation aux différences n’est pas une nouveauté. Elle est mise en œuvre, par exemple, entre l’A330-200 à l’A330-300. Mais là, il s’agit quasiment du même avion. En revanche, deux décennies séparent l’A350 de l’A330, notamment au niveau de l’avionique. « Au niveau du pilotage et de la gestion du vol, cela reste un Airbus et un bimoteur », résume Jean-Paul Julia, directeur des Opérations en vol d’Air Caraïbes, pour qui, « une seule et unique qualification de type est donc logique ».

Alors que pour le passage de l’A330-200 à l’A330-300, ni séance au simulateur, ni entrainement en vol ne sont nécessaires, juste un rappel des différences minimes qui existent entre certains systèmes, pour le passage de l’A330 à l’A350XWB, deux fois cinq jours de formation initiale théorique sont nécessaires. La première des deux semaines est consacrée à l’étude des différences entre les systèmes des deux avions. « Tous les systèmes sont différents », résume Jean-Paul Julia.

Air Caraïbes assure

La deuxième semaine se déroule sur simulateur fixe pour passer en revue toutes les procédures normales et anormale. « Au regard de la réglementation, le pilote peut voler sur A350 dès le lendemain. Pour notre part, nous avons considéré qu’il fallait passer par une séance de simulateur « Full Flight » supplémentaire. » explique le directeur des opérations en vol d’Air Caraïbes.

Cette séance permet de revoir les procédures normale et anormales et de positionner le pilote dans sa fonction. Ensuite, il doit effectuer au minimum quatre étapes avec un instructeur. « Il doit enchainer huit étapes exclusivement sur A35XWB avant de pouvoir faire du mix ». Air Caraïbes a ajouté une restriction supplémentaire que ne prévoit pas la réglementation.

Le retour d’expérience de Finnair

« Nous estimons qu’un pilote doit voler sur les deux machines dans les 45 jours pour conserver une certaine aisance. Sinon, il doit refaire une séance au simulateur avec un instructeur. », précise Jean-Paul Julia qui explique qu’Air Caraïbes s’est rapproché de Finnair qui possède une expérience sur la gestion d’une flotte mixte d’A330 et A350. « Nous reviendrons peut-être sur cette restriction si nous nous rendons compte que ça passe bien. Le cadre que nous nous sommes donné va évoluer à la réalité des faits. Les deux avions sont suffisamment proches l’un de l’autre pour que les pilotes soient rapidement à l’aise ».

Au jour de l’entrée en service du premier A350-900 d’Air Caraïbes, cinq pilotes étaient aptes à voler et à instruire sur les deux avions. « Nous allons les laisser sur A350 au début afin qu’ils acquièrent de l’expérience ». La compagnie est épaulée par six instructeurs d’Airbus pour se faire aider au quotidien : « ils accompagnent le temps d’avoir familiarisé suffisamment d’équipages pour que nous soyons autonomes ». Bien évidemment, la DGAC suit à la loupe l’entrée en service du premier A350-900 sous le pavillon français.

Air Caraïbes recrute sur long courrier

Initialement, les deux nouveaux A350-900 étaient destinés à remplacer deux A330. Mais face au développement de son activité, Air Caraïbes a décidé de conserver ses cinq A330. Elle en a même récupéré un sixième en renfort. « Nous allons passer de 40 équipages à l’été 2016, à 60 en fin d’année ». Autant dire que l’outil de formation tourne au maximum et qu’Air Caraïbes n’a pas fini de recruter.

Elle recherche des pilotes expérimentés (3 à 5.000 heures de vol). Elle prend en charge la qualification de type (amortissement sur deux ans). Entre la croissance du transport aérien mondial et les départs en retraite, Jean-Paul Julia ne cache pas ses difficultés à trouver les profils qu’il recherche. La compagnie française est exigeante. La manière dont elle gère l’entrée en service de l’A350-900 dans sa flotte en est la démonstration.

Gil Roy