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» C’est aux utilisateurs de convaincre les élus locaux de l’intérêt de ces aérodromes « .

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Martin R.

Au sein de la DGAC, Michel Maman, a en charge le dossier du transfert de propriété des aérodromes de l’Etat vers les collectivités locales. Il détaille ici le processus de la décentralisation et présente les enjeux. Un point sans langue de bois.


Combien d’aérodromes français sont concernés par le transfert de propriété de l’Etat vers les collectivités locales ?

Actuellement, en France, un peu plus de 300 aérodromes sont ouverts à la circulation aérienne publique. La moitié environ appartient à l’Etat. Tous ne seront pas transférés. La loi prévoit en effet une partition entre ceux qui resteront de la vocation de l’Etat et ceux qui seront décentralisés.

Quels sont, donc, les aérodromes qui resteront dans le giron de l’Etat ?

Ceux qui ont une vocation dite nationale ou internationale. Une trentaine est concernée. Il s’agit en premier lieu de tous les aéroports actuellement exploités par Aéroports de Paris. Outre Roissy-CDG, Orly et le Bourget, il y a aussi une dizaine d’aérodromes dédiés à l’aviation générale. Il y a ensuite l’aéroport Bâle-Mulhouse, du fait de son statut binational, et quatre aéroports des départements d’outre-mer : Fort de France, Pointe-à-Pitre, St-Denis-de-la-Réunion et Cayenne. Les huit principales plates-formes régionales resteront également sous le contrôle de l’Etat : Nice, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Strasbourg et Montpellier. Enfin, ce sera aussi le cas de quatre petits aérodromes fonctionnant en binôme avec des grands aéroports régionaux : Aix-les-Milles, Cannes-Mandelieu, Saint-Nazaire-Montoir et Lyon-Bron.

En définitive, combien d’aérodromes vont être effectivement décentralisés ?

151 au total. De toutes tailles et de caractéristiques diverses. Cela va de la simple bande en herbe jusqu’à l’aéroport de Beauvais qui a traité 1,4 million de passagers en 2004. Les enjeux pour les collectivités locales sont, à l’évidence, très différents.

Est-il possible de connaître précisément la liste des terrains concernés ?

Cette liste sera publiée prochainement au Journal Officiel.

Quels sont les différents cas de figure ?

Les 151 terrains se répartissent en trois cas de figure différents regroupant chacun, environ un tiers des aérodromes. Il y a, tout d’abord, ceux dont l’exploitation est actuellement déléguée, soit via une concession, soit via une convention d’occupation temporaire. C’est, notamment, le cas des plus grands aéroports. En général, la gestion est assurée par une chambre de commerce. Pour ces plates-formes, il ne devrait pas y avoir de changement à court terme. La collectivité au bénéfice de laquelle se fera le transfert de propriété, se substituera à l’Etat. Le contrat perdurera. C’est ce qui s’est passé en Corse, en 2002, où la Collectivité territoriale Corse s’est vue transférer les quatre principaux aéroports de l’île et a pris le relais de l’Etat dans les contrats en cours avec les CCI. A l’échéance de ces contrats, elle a choisi de reconduire les chambres consulaires.

Quel est le deuxième cas de figure ?

Il s’agit de celui qui regroupe une cinquantaine d’aérodromes ayant déjà fait l’objet ces dernières années, d’un transfert de compétence à une collectivité locale ou à un groupement de collectivités. Nous pouvons citer, Biarritz, Rouen, Grenoble ou encore Chambéry. Ces collectivités locales ont en quelque sorte anticipé la loi. Celle-ci achève le processus de transfert : après le transfert de compétences vient celui du patrimoine. Je tiens à préciser que l’Etat conserve, dans tous les cas, ses compétences régaliennes telles que les contrôles sur la sùreté et la sécurité aéroportuaires ainsi que le contrôle de la navigation aérienne. Relèvent en revanche des collectivités locales tous les choix d’opportunité, notamment le choix du régime d’exploitation et les stratégies de développement et d’investissement. Prenons l’exemple de Grenoble et de Chambéry. Ces deux aéroports sont désormais de la compétence des conseils généraux. Avant le transfert de compétences, ils étaient exploités par une chambre de commerce. Après ce transfert, lorsque les contrats sont arrivés à leur terme, les conseils généraux ont lancé des appels d’offres et ce sont des sociétés privées qui les ont remportées.

Initialement, la CCI était exploitante et maître d’ouvrage des investissement. Désormais, la société privée est exploitante et doit assurer le gros entretien. Le Conseil général, pour sa part, est maître d’ouvrage des investissements. On le constate, les collectivités locales ont la possibilité de modifier les conditions d’exploitation si elles le souhaitent.

Jusque-là, il n’a été question essentiellement que d’aérodromes de taille moyenne ou grande. Qu’en est-il des plus petits ?

Pour la plupart d’entre eux, ils constituent la troisième catégorie des terrains exploités en régie directe par l’Etat. Une grande partie d’entre eux est située dans le nord et le nord-est de la France. Les collectivités qui vont en devenir propriétaires auront la possibilité de les gérer en direct, comme le fait actuellement l’Etat, ou de déléguer la gestion à un tiers. Elles se verront dotées de moyens en crédit ou en nature, équivalents à ceux mis en œuvre actuellement par l’Etat.

Quel est le calendrier du transfert ?

L’échéance est le 1er janvier 2007. A cette date, tous les aérodromes auront été transférés aux collectivités locales.

Le délai est court.

C’est pour cette raison que tous les services de l’Etat sont mobilisés très fortement pour expliquer les enjeux et les modalités de cette réforme et susciter l’intérêt des collectivités locales. Il y aura des candidatures spontanées. Mi-2006, les aérodromes qui n’auront pas trouvé preneur seront affectés par le préfet à une collectivité locale. Notre objectif est d’éviter cette extrémité. Il s’agit donc d’identifier, en amont, les collectivités susceptibles d’être intéressées par le transfert. A nous de leur expliquer ce qu’est un aérodrome.

Il peut être tentant pour une commune d’accepter le transfert pour récupérer des hectares de terrains dans le but de les transformer en zone pavillonnaire ou industrielle. Ce risque existe-t-il ?

Même si, en principe, la collectivité locale ne devrait pas avoir de charges supplémentaires qui ne seraient pas compensées par des dotations, elle peut estimer que la poursuite de l’exploitation de la plate-forme ne se justifie plus et décider de la fermer. Il n’est pas exclu non plus qu’elle puisse envisager de valoriser son patrimoine autrement…

La loi prévoit-elle ce cas de figure ?

Nous sommes là, dans la logique de la décentralisation qui veut que les décisions se prennent, par les élus locaux, au plus près des populations concernées. Dans les cas extrêmes où la fermeture est envisagée, les services de l’Etat auront comme soucis que soit prévu un préavis suffisant pour permettre aux utilisateurs de trouver des solutions de substitution. Dans son rapport sur l’aviation générale, le sénateur Belot, propose ainsi un délai de 3 ans. C’est une possibilité que nous examinons.

Qu’entendez-vous par  » solutions de substitution  » ?

Nous pensons, évidemment, moins à la création d’un nouvel aérodrome que, par exemple, au regroupement d’activités sur une même plate-forme.

L’aviation générale vit un moment crucial.

L’intérêt des utilisateurs de ces petites plates-formes est de ne pas rester passifs. Plutôt que d’ attendre que les collectivités soient désignées, ils auraient, au contraire, intérêt à solliciter des candidatures de la part des collectivités les plus à même d’entendre leurs arguments. C’est aux utilisateurs de ces plates-formes de convaincre les élus locaux de l’intérêt de ces aérodromes.

Propos recueillis par Gil Roy. Aviasport N°604 / Mars 2005

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Martin R.

Martin R. est le développeur et webmaster d’Aerobuzz depuis sa création en 2009. Développeur de formation, il a fait ses classes chez France Telecom. Il lui arrive d’oublier ses codes le temps de rédiger un article sur un nouveau produit multimedia ou sur un jeu.

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