Les contrôleurs du Sud-Ouest abandonnent le strip

Le Centre de contrôle en Route de la Navigation Aérienne (CRNA) Sud Ouest bascule cette semaine sur un système 100% électronique de contrôle en route. Avec comme conséquence la plus visible pour les contrôleurs aériens, l’abandon du strip papier…

Le CRNA de Bordeaux est l’un des cinq en France et sa zone de compétence s’étend de la façade Atlantique à Perpignan et des Pyrénées au sud de l’Ile de France. Un immense terrain d’action qui voit passer environ 910.000 mouvements par an, avec une augmentation régulière et puissante (+7% entre 2015 et 2016).

Erato ou la fin du papier

« Nous arrivions aux limites de notre système actuel note Olivier Chansou, chef du CRNA Sud-Ouest. Pour faire à l’augmentation du trafic dans de bonnes conditions de sécurité, il était nécessaire de s’engager dans une refonte complète du système de contrôle du trafic aérien ». Cette refonte est portée par un système informatique de nouvelle génération dit « Environnement Electronique ERATO » (ERATO pour En Route Air Traffic Organizer). Avec ce système, on estime au CRNA Sud Ouest pouvoir faire face à une augmentation de trafic de plusieurs dizaines de pour-cent dans les années à venir.

Pour les contrôleurs, la mise en place d’ERATO se traduit par l’abandon du « strip papier » remplacé par un affichage sur un écran secondaire dit « tête basse ». L’informatisation du strip autorise la gestion d’un plus grand nombre d’informations, mais aussi leur partage et l’instauration de nouvelles sécurités. « ERATO va soulager le contrôleur sur de nombreuses tâches tout en lui apportant de nouveaux outils d’aide au contrôle : détection de conflit, filtrage des avions, extrapolation des positions etc. Bien assisté par l’outil informatique, le contrôleur pourra alors mieux se consacrer aux actions de contrôle essentielles dans son secteur » résume-t-on au CRNA Sud Ouest.

Transition prudente

Le CRNA de Brest avait été le premier à basculer sur ERATO il y a tout juste un an, essuyant au passage quelques bugs… Fort de ce retour d’expérience et d’une préparation minutieuse, on explique à Bordeaux être très serein quant au passage sur ce nouveau système qui a débuté dans la nuit de mercredi 16 à jeudi 17 novembre et va se poursuivre pendant une semaine.

Dans la nuit du 16 au 17, douze des positions de contrôle sont donc passées sur ERATO, les six autres restant avec l’équipement traditionnel, « au cas où… » Au bout de six jours, ces dernières consoles seront à leur tour transformées et dès lors le CRNA Sud Ouest sera en mode « stripless ».

Trafic aérien aménagé

« Pour réaliser cette bascule en toute sécurité, nous allons abaisser temporairement la capacité du Centre » explique Olivier Chansou. Cette réduction de capacité (d’environ 20 à 25%) ne durera que quinze jours (contre un mois dans le cas de Brest l’an dernier) et elle a été étroitement négociée depuis plusieurs mois avec les utilisateurs des espaces aériens supérieurs et les centre de contrôle en route voisins, en France mais aussi en Espagne et en Italie.

L’armée de l’Air s’est engagée à limiter ses entrainements. D’autre part, de 400 à 500 vols commerciaux contourneront la zone sud-ouest par l’ouest ou par l’est. Des vols seront également maintenus sous le niveau 145, sous la responsabilité donc des contrôles d’approche. Globalement, ces aménagements devraient se traduire par quelques retards pour des vols desservant le sud-ouest. Aucune annulation n’a toutefois été demandée aux compagnies aériennes explique la DGAC.

ERATO est vu comme une étape essentielle de la modernisation des systèmes de gestion du trafic aérien. Mais déjà se profile l’étape suivante avec le système « 4-Flight » développé par Thales. « 4-Flight » équipera les CNRA de Paris, Aix et Reims à la fin 2018. Brest et Bordeaux seront ensuite mis à niveau, à une échéance de quatre ou cinq ans. « De nombreuses fonctionnalités de 4-Flight sont déjà présentes dans ERATO et l’interface graphique sera la même explique un contrôleur de Bordeaux. L’essentiel de l’évolution portera sur le changement du cœur logiciel. Si on prend la métaphore d’une voiture, c’est un peu comme si nous avions changé de carrosserie et de tableau de bord avec ERATO, avant de changer de moteur avec 4-Flight ».

Frédéric Lert