Le soir du 28 novembre 2016, le vol LMI 2933 de la compagnie Lamia Bolivia et deux autres vols étaient prévus pour une arrivée à Medellin. A cet instant, un quatrième vol demande à s’y dérouter, invoquant un problème d’indication de niveau de carburant. Alors qu’il gérait ces quatre arrivées (dont deux en situation de difficultés techniques), le contrôle aérien de Medellin a perdu le contact avec le quadriréacteur RJ85 de Lamia ; le pilote venait de se déclarer en panne totale de carburant et d’électricité. Sans oublier la dimension humaine de cette tragédie, nous avons voulu essayer de reconstituer pour vous l’enchainement des évènements et circonstances qui ont conduit au crash du vol LMI 2933.
Le récit ci-dessous ne prétend pas constituer une investigation, pas plus qu’il n’analyse ou porte un jugement sur l’ensemble des faits et des actions des divers acteurs. Il ne prétend pas non plus être parfaitement précis et complet ; notre but étant simplement de présenter les faits connus à ce jour dans une perspective dynamique et opérationnelle.
Les remarques et interrogations entre parenthèses ( … ? ) indiquent les aspects que nous n’avons pu clarifier ou interpréter.
Le trafic
Le soir du 28 Novembre 2016, trois vols étaient prévus pour une arrivée à Medellin entre 21h30 et 21h45 (heure locale) :
Un quatrième vol, le vol régulier VivaColombia FC 8170 faisait route, au FL360, de Bogota vers l’ile de San Andres, située dans la mer des Caraïbes, au large du Nicaragua.
Le contexte opérationnel
L’aéroport Jose Maria Cordova de Medellin – Rionegro est situé à 7025 ft ; suivant les secteurs, l’altitude minimum de sécurité (MSA) varie de 12,100 à 13,100 ft.
Le 28 Novembre au soir, la piste en service était la 01 et l’approche associée était l’ILS Z 01, ancré sur le VOR-DME RNG (Rionegro). Le temps était couvert avec de la bruine et une première couche nuageuse fractionnée à 1,500 ft.
Volant au niveau FL300, le vol Lamia arrivait au terme d’un vol représentant pratiquement son rayon d’action (range) maximum.
En effet, suivant les sources, le RJ-85 est donné pour un range de 1600 à 1700 nm alors que le trajet prévu, via les airways haute-altitude et une arrivée relativement directe (probablement via les STAR NIRSO 1A ou RNOS 1A), représente 1620-1630 nm (distance sans vent).
Premier acte
Après avoir largement dépassé la région de Medellin, d’environ 150 nm, le vol FC 8170 demande et obtient un déroutement vers Medellin – Rionegro ; la raison invoquée est une indication anormale de niveau carburant dans l’un des réservoirs.
Un communiqué de presse, sur le site de la compagnie, précise qu’il s’agissait là d’un déroutement « de précaution », en l’absence de toute évidence de fuite ou autre anomalie. Le communiqué souligne également que le vol FC 8170 ne s’est donc pas déclaré en « Emergency », rien ne le justifiant. L’appareil sera d’ailleurs remis en service dès le lendemain après des vérifications dont le détail n’est pas spécifié.
Deuxième acte
Les deux vols LMI 2933 et FC 8170 se présentent respectivement dans les secteurs Sud-est et Sud-ouest du VOR-DME RNG pour entamer leur approche. Bien qu’ayant débuté sa descente à 80 nm de sa destination, le vol LMI 2933 atteindra le VOR-DME au FL230 alors que l’entrée dans le circuit d’attente pouvait se faire à une altitude minimum de 13,100 ft (MSA du secteur Sud-est).
Le vol FC 8170 est sensiblement plus bas (FL160) et le contrôleur lui donne un guidage radar vers le localizer, l’appareil se pose à 21h51 après une approche et un atterrissage de routine (uneventful).
Le vol LMI 2933 poursuit sa descente vers … puis dans le circuit d’attente de RNG.
Le vol AV 9771 est également mis en attente (sur quel fix ?).
A ce stade, le vol LMI 2933 n’a pas encore fait état de problèmes de carburant ou électriques, il ne le fera que lorsqu’il souhaitera une priorité d’atterrissage par rapport aux vols LAN Colombia 3020 et Avianca 9771.
Troisième acte
A partir de ce moment, il devient plus difficile de reconstituer la situation globale car les trois vols LMI 2933, LAN Colombia 3020 et Avianca 9771 semblent être en conflit potentiel, obligeant le contrôleur à assigner un cap 090 au vol LAN Colombia 320 et un cap 270 au vol Avianca 9771, afin de libérer l’axe d’approche finale que le vol LMI 2933 cherche désespérément à rejoindre, demandant à plusieurs reprises des vecteurs radar.
Atteignant le « FL210 / inbound » (descendant sur la branche retour du circuit d’attente), le vol LMI 2933 demande pour la première fois une priorité pour l’approche et l’atterrissage, invoquant des problèmes de carburant mais – apparemment – ne se déclarant pas formellement en « Emergency ».
En effet, le contrôleur apportera par la suite toute l’aide possible au vol LMI 2933 mais sans lui donner pour autant une priorité absolue sur les vols LAN Colombia et Avianca (interprétation de l’auteur).
Le contrôleur accuse donc réception tout en annonçant une attente de 7 minutes (comprise comme incluant l’approche et l’atterrissage du vol LAN Colombia 3020 ainsi qu’une inspection de piste, soit systématique soit consécutive à l’atterrissage du vol VivaColombia FC 8170).
Le vol LAN Colombia 3020 est alors autorisé pour l’approche … jusqu’à ce que cette autorisation soit annulée et qu’un cap 010 puis 090 lui soit assigné (comme indiqué plus haut) vers une altitude de 13,000 ft.
Le vol Avianca 9771 est, lui, régulé radar en fonction des positions du vol LAN 3020 et du vol LMI 2933.
Quatrième acte
Le vol LMI 2933, qui continue sa descente dans le circuit d’attente, demande des vecteurs radar vers le localizer et déclare « être sur emergency fuel » (est-ce là une déclaration d’urgence ou une référence à un mode d’alimentation en carburant ?), le contrôleur ne semble pas juger la situation comme étant d’extrême urgence. Il demande néanmoins au vol LMI 2933 de préciser sa marge de manœuvre (son autonomie restante), question à laquelle le vol LMI 2933 ne répond pas.
Le mot MAYDAY (répété trois fois, phraséologie internationale définissant une situation de détresse) n’a pas été prononcé et ne le sera jamais … pas plus que le mot PAN (répété trois fois, phraséologie internationale pour indiquer une situation de difficulté technique).
Le vol LMI 2933 insiste alors pour obtenir une descente immédiate.
On sent dans les échanges de transmissions que le vol LMI 2933 perd progressivement sa conscience de la situation en termes de trajectoire pour rejoindre l’axe du localizer et que le contrôleur a des difficultés croissantes à se représenter la position, l’altitude et le cap du vol LMI.
Le vol Avianca 9771 est alors redirigé sur un cap 270.
Un deuxième vol Avianca ( vol 9356 ) intervient sur la fréquence et est dirigé sur un cap 290.
L’espace aérien devant le vol LMI 2933 étant maintenant dégagé, le vol LMI – qui est maintenant à 18,000 ft – est autorisé à continuer son approche. Le contrôleur lui précise l’état de la piste (humide) et lui demande le niveau de secours désiré après l’atterrissage.
Le vol LMI 2933 se déclare à ce moment en condition de perte totale de carburant et d’électricité (quadruple extinction réacteurs simultanée ?) et demande à nouveau des vecteurs.
Le contrôleur lui indique avoir perdu le contact radar (ou transpondeur ?) mais continue à donner des caps et préciser des distances DME (sur la base de … ?).
Le dernier retour transpondeur est reçu à 15,000 ft / 11 nm de la piste.
La dernière communication situe le vol LMI 2933 à 9000 ft / 8.2 nm de la piste …
Michel Trémaud
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Il semblerait qu'une employé aéroportuaire Bolivienne de Santa Cruz avait essayé de dissuader le CDB faire le vol d'une traite vers la Colombie, sans escale pour re-fueler. Elle se dit menacée pour avoir fait état de ce fait (... suite au crash) et c'est réfugiée au Brésil. http://www.wsj.com/articles/bolivian-airport-official-flees-to-brazil-seeks-asylum-after-plane-crash-1481034678?mod=e2fb
A vrai dire, Patrouille, pour y avoir travaille dans ce pays, ca ne m etonne pas vraiment.
Je pense que le pilote etait pleinement conscient des le depart que c etait "juste"..
Il avait informe de possibles escales, qu il n a pas faites, pensant pouvoir y arriver..
Comme d autres que j ai connus la bas, il a passe les limites avec des passagers..
Depassement de charge, depassement d autonomie, c est frequent la bas, helas.
Si cette employee fait couler la boite par son temoignage, elle risque pour sa vie oui.
L argent dans ces pays , a souvent bien plus de pouvoir que du cote de chez nous..
Chorus, je me suis mal exprime, je voulais dire que la bas ca se passe a un bien plus petit niveau et de maniere bien plus radicale..Si vous voyez ce que je veux dire..
Sinon, bien sur que le pouvoir et l argent dirige ce monde, c est une evidence helas.
"L argent dans ces pays , a souvent bien plus de pouvoir que du cote de chez nous.."
J'aimerais vous croire.
D apres les medias Colombiens et Argentins,
Le Plan de Vol Indiquait une duree de vol de 4h22 pour une autonomie de 4h22..
Le commandant de bord savait (a priori) qu il n avait pas le combustible reglementairement necessaire avec la securite des 45 min et du degagement.
Ce qui expliquerait pourquoi il n aurait jamais declare sa situation d urgence en annoncant un "Mayday" , il informe simplement d un probleme de combustible qu en rapprochement, en se sachant numero deux derriere un autre vol..
Il annonce alors brievement une panne electrique totale et etre sans combustible..
Puis il demande "des caps, des caps" a la tour, celle ci lui donne un cap 350 pour une distance de 13km par rapport a la piste..
L aeroport de Medellin Cordova est sur un plateau de 6000 ft entoure de montagnes.
Apparemment il a percute le haut d une colline vers 8000ft.
Le pilote etait l un des patrons et actionaires de la compagnie, et le copilote etait une tres jolie jeune femme (ancienne top modele), devenue recemment pilote.
Ce qui est sur, c est qu il y a eu toute une sur-mediatisation autour de ce vol au depart de Santa Cruz, surement a des fins promotionelles pour la jeune compagnie.
Et comme on le sait tous bien, la rentabilite et la productivite sont les pires enemis de la securite dans ce metier... Rip
Video tres emouvante qui laisse malheureusement plus de questions que de reponses.