L’aéroport Lyon-Saint Exupéry explore les richesses naturelles de son environnement pour mieux les protéger. La démarche d’une entreprise citoyenne consciente de la fragilité de la Terre.
La prise de conscience de la fragilité des espèces vivantes date des années 80 seulement quand, preuves à l’appui, scientifiques et écologistes ont tiré le signal d’alarme en affirmant que les activités humaines faisaient peser un risque sur un grand nombre d’animaux, d’insectes et de végétaux. Les insecticides qui détruisent le système nerveux des abeilles, le réchauffement de la planète qui réduit le terrain de chasse des ours blancs, la pêche intensive qui anéantit de espèces entières de poissons… Les exemples de mise en danger par l’Homme, d’espèces animales, mais aussi végétales, ne manquent pas en effet.
Prise de conscience environnementale
L’urgence de la situation a été déclarée à la Conférence sur la Terre de Rio de Janeiro, en juin 1992. L’idée de développement durable commençait alors à faire son chemin dans les consciences. C’est à cette époque que les experts parlent pour la première fois de biodiversité, un néologisme construit à partir des mots biologie et diversité, pour évoquer la grande richesse du monde vivant, au sein de la nature. Le mot d’ordre est de sauver les espèces vivantes les plus vulnérables et de protéger l’ensemble des autres. Et pour cela, outre les changements d’attitudes, il est urgent aussi de définir les moyens de mesurer objectivement l’impact des activités à risque sur l’environnement, ce qui n’est pas en soi, le plus facile de la démarche. La tentative de Lafarge en témoigne.
En 2002, le cimentier a en effet cherché à mettre en place un indice de biodiversité à long terme autour d’une partie de ses 900 carrières en exploitation à travers le monde. Il a expérimenté une technique en Autriche, puis l’a étendu à six autres sites, avant de reculer devant la complexité et le coùt. L’idée était de créer un indice de biodiversité permettant de mesurer l’efficacité des plans de réaménagement. Sans pour autant renoncer, Lafarge s’oriente aujourd’hui vers une méthode plus simple. Cofiroute, de son côté, finance actuellement une étude sur la biodiversité des bords de routes, étape préalable à la mise en œuvre de tout plan d’action.
Si ces entrepreneurs font figure de précurseurs, les aéroports comptent toutefois parmi les premiers à s’être engagés dans cette voie avec succès. Ils ne font pourtant pas partie du peloton de tête des activités les plus polluantes, mais ce sont, de toute évidence, les entreprises parmi celles qui se préoccupent le plus de leur impact sur l’environnement. Développement durable et biodiversité vont de pair, ils font partie de la culture aéroportuaire. Néanmoins, si toutes les grandes plates-formes animent une politique proactive de développement durable, elles sont encore peu nombreuses à orienter leurs actions en faveur de la biodiversité.
Genève fait partie des pionniers en la matière. La plate-forme aéroportuaire regroupe environ 200 hectares d’espaces verts et de prairies naturelles. » Les études de la faune et de la flore montrent que l’exploitation de l’Aéroport a un impact sur l’état de ces milieux. Cela nous incite à prendre des mesures de protection appropriées « , précise Philippe Roy, porte-parole de l’aéroport genevois. » Au fil des ans, les connaissances sur la faune du site aéroportuaire se sont étendues grâce à un suivi régulier. Des données sur l’avifaune (oiseaux), les mammifères (lièvres, renards, musaraignes), les batraciens et les insectes sont répertoriées. Divers recensements botaniques ont permis de suivre l’évolution des espèces inventoriées selon les milieux (secs ou humides) dans lesquels elles se développent « . En 2004, plus de 90 espèces d’oiseaux ont été observées en présence continue, lors de visite occasionnelle ou d’un passage rare. Cette même année, un recensement a fait état de quelque 210 espèces floristiques, dont certaines comptent au nombre des espèces rares, voire en voie de disparition. » La biodiversité est favorisée par l’absence d’engrais dans les prairies. Toutefois, le but recherché n’est pas de faire du site aéroportuaire une zone de protection particulière « .
L’Aéroport Nice Côte d’Azur, dans ses engagements en faveur de l’environnement, a signé en avril dernier, une charte de l’arbre. » Partant du principe que tout arbre prélevé doit être remplacé, cette charte est un outil de communication sur les bienfaits de la végétation et les engagements formels du gestionnaire en sa faveur » explique Isabelle Vandrot, chef du service environnement. Sur 62 hectares de la zone publique, 6 hectares sont valorisés en espaces verts. Ils rassemblent plus de 2000 arbres de 52 essences différentes ; 70% des arbres ont plus de 30 ans. » Outre ces engagements sur le long terme, une aire d’agrément botanique en face du terminal 1 permet à tous de se promener et de se reposer au milieu d’essences méditerranéennes. »
Le recours aux bio-indicateurs
Lyon-Saint Exupéry est également engagé dans une démarche environnementale depuis une dizaine années. La réduction des nuisances sonores, la préservation des ressources en eau et le souci de la qualité de l’air ont guidé ses actions. Avec la signature d’une deuxième série d’engagements pour l’environnement portant sur la période 2005-2008, l’aéroport a élargi le spectre de ses moyens de contrôle et de surveillance en lançant une nouvelle étude visant à améliorer la connaissance de la qualité de l’air et de l’impact de ses activités sur l’environnement. C’est à ce niveau que Lyon-Saint Exupéry a décidé de recourir aux bio-indicateurs, en l’occurrence à des abeilles.
L’installation des ruches en bordure des pistes n’est pas passée inaperçue. Elle a suscité un véritable engouement médiatique. Les abeilles ont même » fait le 20 Heures de TF1 » !
Ce bio-indicateur s’inscrit dans une démarche d’ensemble. Il vient en fait en complément des moyens physico-chimiques mis en œuvre depuis 2002 et des études faites en continu grâce à la station de mesure fixe située à Pusignan. Il va permettre d’étudier les éventuels impacts de la pollution sur les écosystèmes. » De ce point de vue, les abeilles peuvent être considérées comme des intégrateurs de la qualité environnementale d’un site » précise Lionel Lassagne, directeur du développement durable de l’aéroport. Les abeilles butinent en effet dans un rayon de 500 mètres à 2 kilomètres autour de leurs ruches. Cela offre donc la possibilité de placer sous surveillance une plus grande zone et donc de recueillir des informations encore larges. Il est en effet possible de mesurer la concentration en plomb, en zinc et en cadmium, ainsi que les traces d’hydrocarbures dans le pollen récupéré en entrée des ruches par les trappes et dans le miel. Les abeilles sont de véritables » sentinelles de la qualité de l’air « . Elles vont aussi participer à la pollinisation des végétaux. Les analyses polliniques des miels permettront en effet de définir l’ensemble des plantes environnantes butinées et ainsi de suivre l’évolution de la flore année après année. L’implantation des 10 ruches s’inscrit, ici, dans une démarche » verte » qui démontre une prise en compte renforcée de la biodiversité, » une richesse qu’il faut étudier et préserver » déclare Lionel Lassagne.
L’étude réalisée par l’association Naturama en 2005 et 2006 a démontré le rôle important que joue l’aéroport sur le plan écologique. » Nous avons répertorié une cinquantaine d’espèces différentes dont 33 protégées qui représentent un enjeu certain dans la préservation du patrimoine local « , reconnaissait alors Christophe Darpheuil, le directeur de Naturama. » L’aéroport est devenue une véritable réserve naturelle. La clôture empêche les prédateurs de pénétrer. C’est un havre de paix pour la plupart des espèces et une halte migratoire. C’est le signe de la qualité de l’environnement, en particulier d’une bonne gestion des pesticides « .
Si l’on peut se réjouir d’admirer une telle diversité d’espèces et parmi elles, plusieurs protégées, il ne faut pas perdre de vue non plus que, sur un aéroport, les oiseaux constituent d’abord un danger. La lutte contre le péril aviaire dans le respect de la biodiversité implique d’envisager une nouvelle approche et de mettre en œuvre des moyens nouveaux, complémentaires des techniques traditionnelles d’effarouchement et d’éloignement des oiseaux qui s’approchent des pistes. D’où la nécessité dans un premier temps de recenser les espèces pour connaître leurs habitudes.
état des lieux de la flore
Après avoir mené une étude ornithologique l’année dernière, Naturama achève, à son initiative, un inventaire floristique de l’aéroport afin de mettre en évidence les éléments attractifs pour les oiseaux et éventuellement des essences végétales rares. La flore est un facteur essentiel à prendre en compte. Elle offre des refuges et des ressources alimentaires pour l’avifaune mais également pour les mammifères ou encore les insectes dont les oiseaux se nourrissent.
Les objectifs de cette étude menée au printemps étaient d’une part d’identifier la végétation présente sur le site pour une mise en relation avec l’avifaune et d’autre part de mettre en évidence d’éventuelles espèces rares. Christophe Darpheuil ne cache pas qu’il souhaite que cette étude lui réserve les mêmes surprises que celle qui la menée sur les oiseaux. Il espère trouver des espèces rares, voire exotiques. Il est bien évident que la superficie très étendue de l’aéroport (1100 hectares), ne permet pas de réaliser un inventaire exhaustif. Cette étude donnera néanmoins un premier aperçu de la flore présente qu’il restera à approfondir par la suite.
D’ores et déjà, Naturama a encouragé l’aéroport à fleurir des jachères pour favoriser la biodiversité d’insectes. Ces fleurs multicolores apportent un complément de nourriture pour les abeilles. Elles attirent aussi des papillons et contribuent à embellir le paysage. Il y a de la poésie dans cette démarche.
Gil Roy. Aeropresse N°111. Juin 2007
BONUS
La biodiversité dans toute sa beauté
Impossible de ne pas avoir le regard attiré par ces milliers de fleurs multicolores qui poussent dans les champs au bord de la RN 517 au nord de l’aéroport. Centaurées, cosmos, sulfureux et lin rouge ont été sélectionnés en mélange haut de 100 cm. Ces différentes variétés couvrent un peu plus de cinq hectares. Ces jachères fleuries s’intègrent naturellement dans le milieu steppique et agricole céréalier du site. Elles ont été ensemencées à l’initiative de l’aéroport et en accord avec un agriculteur et la Chambre d’agriculture du Rhône. Outre l’embellissement, elles ont pour objectif d’apporter un complément de nourriture pour les abeilles et de participer à la sauvegarde de la biodiversité sur Lyon-Saint Exupéry. Il faut savoir aussi, que l’ambroisie prolifère sur les champs non cultivés. Les jachères fleuries permettent indirectement de lutter contre ses plantes allergisantes qui constitue un véritable fléau pour une grande partie de la population.
Gil Roy. Aeropresse N°111. Juin 2007
Les sentinelles de la qualité de l’air
La présence de cultures de blé, d’orge et de colza sur l’aéroport a rendu possible l’implantation d’une dizaine de ruches, soit environ 800.000 abeilles, pour surveiller la qualité de l’air. Les abeilles constituent un excellent bio-indicateur. Les prélèvements de matrices apicoles pour analyses seront effectués tous les trimestres par l’apiculteur, et transmis à un laboratoire pour rechercher les traceurs sélectionnés de la qualité de l’air. De son côté Coparly, l’agence de la qualité de l’air de l’agglomération lyonnaise, réalisera des études en été, automne et printemps prochains pour la caractérisation des pollens. La production de miel est estimée à 20 kilogrammes maximum par ruche. Compte tenu des prélèvements réalisés à fins d’études, c’est un peu moins que les quantités habituellement récoltées. La production de miel n’étant toutefois pas ici une finalité. Il n’en demeure pas moins que l’Aéroport Lyon-Saint Exupéry réfléchit à un achat partiel de la production de miel, propriété de l’apiculteur qui exploite 450 ruches dans la région.
Gil Roy. Aeropresse N°111. Juin 2007
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