Décryptage d’une remise de gaz interprétée par Johnny Hallyday

Le chanteur a cru « mourir » lors d’une remise de gaz standard par temps de brouillard. Contrairement à ce qu’affirment les titres de la presse, Johnny Hallyday n’a pas failli mourir à Rennes. Les pilotes ont fait leur job !

Les déclarations de Johnny Hallyday, ce week-end, font pleurer dans les chaumières. Le chanteur a cru mourir à l’occasion d’une manœuvre classique par temps de brouillard lors d’un atterrissage à Rennes jeudi dernier au soir. Les titres de la presse, quelle soit imprimée ou en ligne, dramatisent à souhait : Johnny Hallyday : il a frôlé le crash d’avion à Rennes, Johnny Hallyday échappe à un crash d’avion !, Johnny Hallyday frôle la mort en avion avant un concert, Johnny Hallyday échappe de peu à un accident d’avion, Grosse frayeur pour Johnny Hallyday après un atterrissage, Le jour où Johnny Hallyday a failli mourir… Et ce sont souvent les articles enregistrés comme les plus lus ce week-end sur les sites internet qui les ont publiés.

En bref, avant son show au MusikHall de Rennes, Johnny Hallyday a, de son propre aveu, « eu peur de mourir ». Son avion, en effet, a dû atterrir en plein brouillard en Bretagne. Celui-ci aurait même raté une tentative d’atterrissage et aurait été contraint de remonter en urgence après avoir quasiment touché le sol. « On a eu une grosse frayeur en arrivant à Rennes », a expliqué Johnny à Ouest-France. « Avec le brouillard, on ne voyait rien. Mon avion a atterri en bout de piste, mais heureusement, le pilote s’en est rendu compte à la dernière seconde et il a remis les gaz. »

Ce serait un beau scénario pour quelque documentaire à sensation sur le transport aérien comme il en fleurit ces temps-ci sur les chaînes télévision en mal d’audience.

La réalité est tout autre. Ces derniers jours, avec l’anticyclone et le brouillard, des milliers de passagers connaissent des circonstances assez proches de celles imaginées par le chanteur. Examinons ce qui s’est passé à partir des informations relevées par la DGAC auprès de ses services en Bretagne.

Vers 18h50 (heure locale), le Falcon 50 de Darta Aviation transportant Johnny Hallyday, en phase d’approche, arrive du Bourget. Le METAR automatique est le suivant datant de 18h30 : LFRN 151730Z AUTO 09006KT 0300 R28/1100V1800D FG VV/// 06/06 Q1019 qui observe du brouillard et 300 mètres de visibilité avec des RVR mesurés sur la piste 28, fluctuant de 1100 à 1800 mètres. On note que température et point de rosée ont la même valeur, montrant une situation peu susceptible d’évoluer.

L’éclairage de la piste est en haute intensité. Le triréacteur arrivant en courte finale, la tour transmet un dernier élément météo avec OVC 100 pieds. L’équipage applique les procédures et n’ayant plus les minimas, remet les gaz au niveau du seuil d’une piste longue de 2 100 mètres. Le Falcon refait un tour. Comme les stratus bas ont quitté la piste, l’avion atterrit alors normalement. Pour les pilotes, la tour de contrôle et les autorités aéronautiques, c’est un non-événement qui n’est même pas évoqué lors du passage de l’équipage au bureau des opérations de l’aérodrome de Rennes.

Vu de la cabine du Falcon, il semble en être tout autre. La remise de gaz aurait eu lieu à la dernière extrémité et, heureusement, au deuxième essai, la tour de contrôle aurait augmenté l’éclairage de la piste. Et pour cause, cette fois, les passagers l’ont vu… Attribuons à l’émotion cette interprétation des événements. Une remise des gaz en Falcon 50, il est vrai, avec la prise d’assiette, le bruit et la poussée des trois réacteurs qui colle au siège d’autant plus que l’avion était léger avec le carburant d’un trajet court, peut impressionner.

En guise de clin d’œil, laissons au magazine Gala la conclusion de ce que le milieu aéronautique considère comme un cas-type de bonne décision : Que le dieu des tours de contrôle soit loué, Johnny Hallyday ne connaîtra pas le tragique destin de ses pairs Buddy Holly, Ritchie Valens, Otis Redding et Ricky Nelson… La nécrologie de Johnny était pourtant prête à être mise en page dans les rédactions de journaux people. Les rotatives attendront.

Thierry Vigoureux