C’est un échec cuisant pour Aéroports de Montréal (ADM) et les autorités de l’aviation civile canadiennes : l’immense aérogare passagers de Mirabel va être démolie. L’appel d’offres a été envoyé aux entreprises susceptibles de mener à bien ce travail sans précédent dans l’histoire du transport aérien contemporain.
Abandonné par les compagnies aériennes, charters compris, l’aérogare passagers de Mirabel coûtait cher en entretien alors qu’il restait désespérément vide. Toutes les tentatives de lui trouver une nouvelle raison d’être ont échoué, le coup fatal étant venu en 1996 du groupe I-Parks-Roger International qui avait envisagé de créer un parc de loisirs dont l’aérogare aurait constitué la clef de voûte. Depuis lors, le désintérêt avait été confirmé, en même temps que l’erreur de stratégie commise à la fin des années soixante, tout à la fois par les stratèges d’Ottawa et ceux d’ADM.
A cette époque, c’est-à-dire avant le premier choc pétrolier de 1973, les Canadiens croyaient ferme à la poursuite dans la durée d’une croissance à deux chiffres du transport aérien. Ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls à croire à un avenir radieux mais ils attribuaient aussi à Montréal un rôle majeur de « gateway » nord-américain, de point d’entrée qui aurait rivalisé, notamment, avec New York et Los Angeles. Ce fut l’erreur fondamentale sur laquelle fut construit le projet de très vaste plate-forme internationale, à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Montréal.
Deuxième erreur, sans doute inspirée de la complémentarité Orly/Roissy-en-France, l’idée de base était de consacrer l’aéroport de Dorval aux vols intérieurs et à ceux à destination des Etats-Unis, Mirabel se réservant une vocation internationale. Le projet fut conçu, en effet, au moment où, en France, naissait le projet Paris-Nord, futur Roissy-en-France, plus tard CDG. A la différence près que les caractéristiques du marché aérien, au cœur de l’Europe d’une part, au Canada d’autre part, étaient fondamentalement différentes.
Qui plus est, les possibilités de développement de Dorval avaient visiblement été sous-estimées. L’année dernière, cet aéroport proche du centre ville a en effet enregistré 14 millions de passagers, dont plus de 5 millions pour le trafic intérieur, géré par des compagnies très dynamiques. Le nombre de mouvements, 264.000, indique que Dorval a tout l’avenir devant lui. Cela sans la moindre difficulté et sans risque de saturation. Aussi peut-on comprendre qu’en 1975, année de l’inauguration de Mirabel, c’est sans conviction qu’Air Canada et d’autres ont transféré leurs vols long-courriers à Mirabel, dont la capacité, après extensions successives, devait atteindre 50 millions de passagers annuels.
Aussitôt, nombre de voyageurs ont exprimé de sérieuses critiques : absence de liaison terrestre efficace entre les deux aéroports, pas de train vers Montréal, réseau autoroutier très incomplet. Ce qui n’atténua pas l’optimisme d’Ottawa, encore moins celui d’ADM, le ton étant donné par la cérémonie d’inauguration marquée, symboliquement, par l’arrivée d’un Concorde (commandant de bord : André Turcat), symbole de modernité et d’avenir prometteur.
Aujourd’hui, Mirabel, bientôt sans aérogare mais fort de deux pistes de 3.650 mètres, survit grâce à une solide vocation industrielle. Il accueille une nouvelle usine de Bombardier dévolue au C.Series et des installations de Pratt & Whitney Canada, Bell Textron, Messier Dowty, Aerolia, etc. Reste le fait que le géant déchu montre clairement la gravité des errements qui peuvent naître de décisions purement technocratiques. Ailleurs, les décideurs, politiques en tête, furent capables d’une prudente marche arrière, l’exemple le plus spectaculaire de l’époque étant celui de l’abandon de Maplin Sands, projet de grand aéroport international qui aurait été implanté dans l’estuaire de la Tamise et aurait donné à Londres les moyens de ses ambitions. Ce qui n’est toujours pas le cas, quarante ans plus tard.
Dorval, créé en 1941 pour succéder à l’aéroport de Saint-Hubert, rebaptisé aéroport Pierre-Elliott Trudeau, réputé pour l’excellence de ses installations de déneigement et de dégivrage, a tout l’avenir devant lui. Mais le dossier montréalais nous rappelle que le transport aérien est aussi capable du pire.
Pierre Sparaco (à Ottawa)
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L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Bonjour,
Simplement vous informer que l'aérogare de Mirabel est loin d'être démolie. La décision de ADM sera annonçée seulement le 16 septembre prochain. Mais toute une mobilisation se fait actuellement dans la grande région de Montréal pour sauver cet immeuble et lui trouver une nouvelle vocation.
Nous sommes très confiants d'arriver à une entente avec ADM d'ici le 16 septembre prohain.
Pour toute autre information, n'hésitez à me contacter.
Jean Bouchard
Maire de Mirabel
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
hé oui, c'est le Concorde F-WTSA (pré-série français) actuellement à Athis-Mons, le long de l'aéroport d'Orly, qui a fait l'inauguration de Mirabelle. Aéroport qui a servi d'accueil pour les jeux olympiques d'hiver de Montréal.
Il y a d'ailleurs à l'avant gauche de l'appareil les anneaux olympiques de ces jeux.
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Bonjour M. Marais-Hayer,
Juste pour votre information, les jeux olympiques de Montréal étaient des jeux d'été, pas d'hiver...
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Si le fédéral et le québec n'avaient pas tiré la couverture à eux chacun de son coté ...
Les routes qui s'arrete en ras campagne, le réseau ferré pas étendu depuis 1976 ...
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Désolé, mais il y a un contre-sens.
Je cite :
"montre clairement la gravité des errements qui peuvent naître de décisions purement technocratiques"
Il aurait fallu écrire "la gravité des erreurs"
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Nous aurons bientôt notre Mirabel en France étant suffisamment stupide pour faire les erreurs des autres, 40 ans plus tard ; avec le contestable projet Nantes Grand Ouest à Notre Dame-des-Landes.
Sur fond de crise abyssale, engouffrer autant d'argent dans la réalisation d'un aéroport inutile alors que des dizaines de plateformes ferment régulièrement (récemment Dijon, relié par TGV à Paris, Lyon, Mulhouse et Lausanne)… où est la logique ?
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Une page se tourne.
Souvenir de mon arrivée à Mirabelle en février 91, et 1h30 de route sous une tempête de neige pour aller dans Montréal.
Dorval est presque au coeur de la ville, je m'y suis posé plusieurs fois pendant ma formation, aussi je suis assez surpris du volume de trafic passager : sans doute les contraintes imposées par les riverains ne sont-elles pas les mêmes que chez nous où il est devenu sport national de bâtir sa maison près des pistes et de fonder l'ACNUSA ensuite à grand renfort de manifs ...
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Aeroclub?peut-^tre au Canada mais pas chez nous en France(heu pardon en Europe)ici, on fait tout notre possible pour détruire l'aviation de tourisme.Vive l 'ATO avec son futur cortége d'aéroclubs moribonds.Vive l'Europe(De gaulle doit se retourner dans sa tombe)
L’aérogare de Montréal-Mirabel va être démolie
Je suis content de pouvoir lire cette phrase qui nous montre une fois de plus la pure vérité de ces gens bêtes et méchants qui n'ont d'autre chose à faire que de s'allier à l'inintelligence :
" où il est devenu sport national de bâtir sa maison près des pistes et de fonder l’ACNUSA ensuite à grand renfort de manifs ... " et pour en revenir à Mirabel il est vrai que c'est toujours bien dommage d'avoir construit grand sans penser sérieusement pour ensuite démolir et parfois je me demande pourquoi ne pas chercher plutôt à s'orienter vers des structures d'écoles aéronautiques, des aéro-clubs et autres musés relatif à l'aviation afin de garder tout ces ensembles neufs et surtout un superbe terrain d'envol, c'est vrai que tout cela est un coût mais pourquoi démolir pour reconstruire.