Chaque nouvelle révélation de la presse sur les circonstances du crash de l’A320 de Germanwings met un peu plus le Bureau d’enquêtes et d’analyses en porte-à-faux. Le BEA ne peut plus faire comme si les chaines d’information en continu et les réseaux sociaux n’existaient pas.
« Ouvre cette foutue porte ! ». Ce cri de désespoir du commandant de bord de l’A320 de Germanwings est étalé en gros caractères à la une de Bild du 29 mars 2015. Le quotidien allemand s’est procuré la retranscription des dernières minutes de l’enregistrement de la boîte noire. Après le New York Times qui a très tôt révélé que le crash était délibéré, force est de constater que les personnes impliquées dans l’enquête ne partagent pas toutes la même notion du devoir de réserve. Difficile d’imaginer que ces révélations dont bénéficient les intouchables fleurons de la presse internationale ne s’inscrivent pas dans une stratégie délibérée. Ces fuites profitent à ceux qui estiment venu le moment de remettre en question la gestion de l’information du Bureau d’enquêtes et d’analyses.
La preuve est faite, une fois de plus, qu’il est impossible aujourd’hui de garder secret une information capitale plus de 24 heures. A force de répéter que le temps des enquêteurs n’est pas celui des médias, on n’a pas vu arriver les réseaux sociaux. A l’heure de Twitter et de Facebook, celui qui détient un début de réponse, n’a plus le droit, aux yeux de l’opinion publique, de le garder pour lui. Il n’y a pas intérêt non plus, s’il ne veut pas être accusé de cacher « la vérité », pire de l’arranger.
Cette situation dépasse évidemment le BEA. Ce n’est pas à des enquêteurs techniques de trancher un phénomène de société. Ces fonctionnaires appartiennent à un système et c’est ce système qui doit être réformé. Protégeons-les au contraire. Permettons-leur de travailler sereinement. Ce sont les recommandations du BEA, du NTSB, et des autres bureaux étrangers qui participent au fait que l’avion soit aujourd’hui le plus sûr moyen de transport. Ce ne sont surement pas des mesures prises dans l’urgence, avant même d’en avoir évalué toutes les conséquences. Juste pour rassurer les passagers…
Ne croyons pas non plus que le problème ne relève que du registre de la communication. Il est beaucoup plus complexe… Avant même que les demandes d’informations des enquêteurs du BEA chargés de retracer le parcours professionnel des pilotes et de reconstituer leurs antécédents médicaux et psychiatriques n’aient été prises en compte par l’employeur, les écoles de pilotage et les centres médicaux, le passé psychiatrique du jeune copilote était décortiqué à longueur d’émissions spéciales. Le temps de la presse n’est pas celui de l’enquête, les moyens de collecter les informations non plus.
Il est urgent que l’administration de l’aviation civile et le pouvoir politique prennent en compte ces évolutions. Nous ne sommes plus au temps du Malabar Princess. Les procédures du BEA doivent être repensées. Il en va de la sérénité des futures enquêtes, mais aussi du bon fonctionnement du transport aérien. En attendant, pour calmer l’hystérie médiatique et faire retomber la pression, nous serions tentés de tweeter au BEA : « Publiez cette foutue transcription ! ».
Gil Roy
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Le BEA enfermé dans le silence
"Ce sont les recommandations du BEA, du NTSB, et des autres bureaux étrangers qui participent au fait que l’avion soit aujourd’hui le plus sûr moyen de transport."
Avez-vous vu une recommandation quelconque du BEA concernant les minimanches non conjugués de tous les Airbus? Pourtant une telle conjugaison aurait fortement aidé l'OPL de "gauche" à voir et comprendre ce que faisait l'OPL de "droite" sur l'AF447. Avez-vous une recommandation de BEA sur la fixité des auto throttles?
Malheureusement le BEA, totalement dépendant du ministère des transports, fait de la politique, pas de la sécurité des vols, pour cela il lui manque l'indépendance du NTSB...
Le BEA enfermé dans le silence
Salut,
Une chose est sure..
Le BEA n'est pas un organisme d'information destiné au grand public
Quel est le pourcentage des français qui lisent les rapports du BEA comparé a ceux qui lisent la presse ?
La presse ne fait que son devoir .. c'est a dire informer le grand public
Le BEA ne fait que son devoir .. informer les instances responsables de la sécurité de l'aviation civile et aussi le monde judiciaire (puisque en France lorsqu'il y a victime humaine une instruction est automatiquement ouverte et le judiciaire est présent au BEA)
La responsabilité des fuites incombe au BEA et non a la presse ..
La presse investigue avec tous les moyens dont elle dispose et même des lois protègent l'anonymat de ses sources ..
A chacun son métier ...
Dans ce cas - ci .. la presse a bien fait son métier ... comme Gil Roy fait le sien ...mais on ne peut en dire autant du BEA !
Le BEA enfermé dans le silence
Bonjour,
Il est incompréhensible de voir que le New York Times ait pu informer très tôt sur l'origine du crash de la GermanWings. Il est incompréhensible que le président de la République puisse conclure et informer les médias sans concertation avec la prudence nécessaire avant les premiers éléments de l'enquête en cours par le procureur de la république....De mon point de vue, le suicide du pilote est une solution de facilité médiatique. Quelles sont les informations enregistrées sur le pilotage et les écrans radars ? - Je doute personnellement, vu le caractère strict des contrôles médicaux en Allemagne opérées par les compagnies, que l'on puisse laisser voler un pilote en arrêt de maladie. (Cela change presque tout !) Ensuite il est compréhensible que le patron d'airbus soit scandalisé, parce que des conclusions s'exposent sans même laisser le soin aux experts de aéronautique faire leur travail. A qui profite le crime ? Certainement pas aux familles, pourquoi un Airbus ? Y a t-il un passager important dans l'avion qui avait des informations embarrassantes ? Comment se fait-il que la CNN et le New York Times soient les tous premiers à informer les médias internationaux alors que cela se passait en Europe vers 11h et qu'il y a un décalage ? Veut-on remettre en cause les avions Airbus vs Boeing ??
Posons-nous les vrais questions de fond avant d'aller raconter des histoires sur un co-pilote ! Cela ne tient pas, et cela n'est pas très sérieux de choisir un bouc émissaire facile.
Le BEA enfermé dans le silence
"Posons-nous les vrais questions de fond avant d’aller raconter des histoires sur un co-pilote ! Cela ne tient pas, et cela n’est pas très sérieux de choisir un bouc émissaire facile."
Salut,
Je pense que ce 2 Avril vous avez eu réponse a vos questions sur les "histoires" d'un co-pilore !
Le BEA enfermé dans le silence
Bonjour,
Gil Roy a pris le risque de déplaire à une petite minorité, tout en informant la grande majorité sur le fonctionnement du BEA.
On ne va pas lui reprocher l'autocensure!
La France est à la 38ème position pour la liberté de la presse
http://www.numerama.com/magazine/32198-liberte-de-la-presse-la-france-38eme-au-classement-rsf-2014.html
Christophe
Le BEA enfermé dans le silence
Oui il faut aller lire le lien de Numérama sur la liberté de la presse !
Et la lecture "recadre" méchamment les a priori qu'on pourrait avoir en lisant ce classement... qui dit autre chose que ce qu'on pense spontanément. Par exemple, les agressions contre les journalistes font parti du score dégradé de la France. Comme les attentats contre Charlie. A force de french bashing, on fini par écrire n'importe quoi ^^
Le BEA enfermé dans le silence
Avec un tout petit peu de recul, on peut faire la différence entre l'information cachée (donc manipulée) par certains qui se donnent des droits, et la bêtise mediatique que l'on subit quotidiennement. Quand certains prétendent avoir le droit de retenir les informations, il n'y a plus de limite à leur censure, aucun rapport avec la moralité de la "grande" presse ou le voyeurisme... des voyeurs.
Tout le monde a le droit de savoir.
Le BEA enfermé dans le silence
Et pourquoi tout le monde aurait-il droit de savoir tout de suite ?
Le BEA enfermé dans le silence
Je voudrais ajouter et dire à tous ceux qui ont des doutes sur les qualités de Gil, qu'il est un excellent" journaliste aéronautique", mais "journaliste" avant tout ...
Cette dernière phrase reflète bien la mentalité des journalistes en général, lui également, à la recherche du sensationnelle, et voudraient avoir la première place à divulguer du "n'importe quoi", au détriment du respect des travaux de tous les spécialistes de l'aéronautique...
Le BEA enfermé dans le silence
S'il y a bien quelqu'un que l'on ne peut pas accuser de sensationnalisme, c'est bien Gil, je vous trouve bien injuste"
Et comme je l'ai dit précédemment, si vous aviez lu attentivement TOUT l'article, vous auriez compris que sa dernière phrase exprime plutôt un ras le bol invitant à vider une bonne fois l'abcès de cette histoire et calmer les médias.
Le BEA enfermé dans le silence
Dans la piece jointe ci dessous, deux Pilotes de Ligne s'expriment sur Pprune (de façon modérée et intelligente... comme Gil Roy). Peace and Fly safe.
Le BEA enfermé dans le silence
Bonjour, je trouve votre "analyse" très déplacée. Le travail du BEA doit être le plus réfléchi, minutieux, véridique, et sans appel autant que possible, ce qui n'est pas le cas de la presse, dont la motivation est de vendre du scoop par n'importe quel moyen. Ce n'est pas le BEA qui doit changer (en tout cas pas sur ce point) mais bien la presse et les lecteurs qui se doivent d'être plus prudents et moins avides d'information de ce type. Ce n'est pas le progrès!
Le travail du BEA peut durer encore longtemps car les bandes peuvent ne pas avoir tout dit, voire leurs premières ecoutes s' averer trompeuses ou pas tout à fait comme ce qui est présenté sur le moment. Eh oui, il faut savoir ronger son frein, mais c'est sans doute l'une des grandes maladies de l'homme moderne... même si Confucius devait déjà nous mettre en garde à son époque...
Le BEA enfermé dans le silence
ARTICLE COPIE COLLE DE l' HEBDOMADAIRE LE POINT/ De NOTRE CORRESPONDANTE À BERLIN, PASCALE HUGUES
C'est Thomas Enders, PDG d'Airbus, qui tire la sonnette d'alarme. Et ce n'est pas un hasard si ce patron très en vue choisit les colonnes de Bams, le Bild am Sonntag, l'édition du dimanche du premier tirage de la presse européenne, pour s'exprimer. Il veut que son message soit entendu. Il veut aussi défendre la réputation des pilotes de ligne "qui, comme avant, méritent notre confiance". Thomas Enders ne peut plus supporter les commentaires des experts autoproclamés qui donnent leur avis à longueur de talk-shows.
Chaque jour depuis la catastrophe, la télévision allemande programme éditions spéciales et débats à n'en plus finir. Rarement un événement n'a suscité un tel déchaînement médiatique... et un appétit aussi vorace de la part des Allemands. Spécialistes en aéronautique, experts en sécurité, anciens pilotes de ligne, médecins agréés en médecine aéronautique, psychologues et psychiatres, ophtalmologues depuis qu'est tombée la nouvelle qu'Andreas Lubitz aurait eu des problèmes de vision se succèdent sur les plateaux de télé, à l'antenne des radios et sur la Toile pour tenter d'élucider les circonstances de la catastrophe de l'Airbus. "Ce que l'on devrait remettre en question, dit le patron d'Airbus en colère, ce sont les sottises que disent certains "experts" sur les plateaux des talk-shows. Ce ne sont parfois que de pures spéculations qui ne s'appuient sur aucun fait, des fantaisies et des mensonges. Souvent des absurdités qui dépassent toutes les bornes. C'est une insulte pour les victimes."
Et Thomas Enders n'est pas le seul à s'insurger. Margot Kässmann, ancienne chef de l'Église évangélique, une autorité morale de poids en Allemagne toujours très présente dans les médias, essaie dans un éditorial de Bams de rappeler les Allemands à la raison et les incite au recueillement silencieux : "Je ne peux plus supporter les commentaires de tous ceux qui savent mieux que tout le monde après un accident. Durant la semaine qui vient de s'écouler, que n'a-t-on pas entendu de spéculations et d'interprétations, de critiques, de commentaires et de blogs ? On a tout entendu : que les compagnies aériennes bon marché sont coupables, que les avions étaient trop vieux, qu'il s'est agi d'une défaillance humaine. Et, pour terminer un choc supplémentaire, c'était un acte perpétré en toute conscience... Tout cela est irresponsable... Nous avons besoin de calme. Plus de photos. Plus d'éditions spéciales à la télévision. Plus de reproches. Plus de tentatives d'explications. Plus de réponses à tout." Margot Kässmann prêche pour le recueillement : "Rester silencieux un moment et penser à ceux qui nous ont quittés."
"Pourquoi est-ce que nous nous y mettons tous ?"
Le public, aussi, sature. "J'ai l'impression que l'expert en aéronautique de l'ARD est installé dans mon salon, se plaint un auditeur à la radio. Pardonnez-moi, mais je ne peux plus voir sa gueule !" Un journaliste allemand sur place dans les Alpes françaises dit avoir assisté à de véritables scènes de chasse pour arriver à photographier les parents des victimes, "transformés en gibier de choix", commente-t-il sèchement. Plusieurs grands journaux allemands se livrent à une sévère autocrititique. L'envoyé spécial du journal Die Zeit raconte dans son reportage comment, dans le train qui l'amène à Montabaur, la petite ville où Andreas Lubitz a passé son enfance et où ses parents vivent toujours, il a presque honte de faire ce métier. Il raconte son errance à travers les rues de la petite vide, le ridicule de la situation : ceux - la famille, les amis, les proches - qui auraient quelque chose à dire sont barricadés chez eux et gardent le silence. Ceux qui ne connaissaient le pilote que de vue ou, pire encore, qui ne l'avaient même jamais aperçu sont pendus aux micros des reporters venus du monde entier.
"Pourquoi est-ce que nous nous y mettons tous ?" titre en grosses lettres rouges le très respectable FAZ, le Frankfurter Allgemeine Zeitung : "On a l'impression que les médias ont perdu la tête, dit-il, et on a envie de leur poser ces questions : Pourquoi embêtez-vous les voisins, la famille, les connaissances ? Pourquoi fouillez-vous les sites internet et les profils dans les médias sociaux ? Pourquoi publiez-vous des photos et des noms, des spéculations et des rumeurs ?" Une question que se posent même les deux rédacteurs en chef de Bild qui ont cru bon, sur Facebook, de justifier la couverture qu'ils font de cet événement tragique. Spiegel Online explique à ses lecteurs que si la rédaction a décidé de citer dans son intégralité le nom d'Andreas Lubitz, elle s'engage néanmoins à ne pas publier de photos de sa famille : "Cela n'est pas nécessaire, à moins que les personnes en question ne souhaitent ouvertement s'exprimer dans les médias. Nous respectons leur sphère privée."
Le BEA enfermé dans le silence
Très décevant de la part Monsieur Gill Roy qui nous avait habitué à beaucoup plus de tempérance...
Il semble avoir "oublié" que le BEA (Bureau ENQUETE ANALYSE!) n'est pas un média lui (et n'a pas toujours beaucoup de marge de manœuvre vu les enjeux!) contrairement à AEROBUZZ?
Et "BUZZ" ne signifie-t-il pas "bourdonnement, vibration, sonnerie...", bref du bruit?!?
Je suis triste de constater que ce site participe pleinement à cet emballement médiatique dans ces conditions dramatiques...
Imaginez vous seulement une seconde à la place des enquêteurs sur ce charnier!
Mais ceci nous éloigne (à dessin?) du fond du problème qui est visiblement le suivi médical des navigants.
Celui-ci bizarrement depuis une demi douzaine d'année (Cela coïncide avec la montée en puissance du low cost dans l'industrie aéronautique!) a tendance à très fortement s'alléger ?!? (visite du travail un an sur deux, aptitude médicale tout les 6 mois au dela de 60 ans et non plus 40, prise de sang facultative,j'en passe et des meilleures!).
Sans parler de l'excellente initiative de faire venir dans les cockpits pour surveiller les pilotes, des PNC qui sont une population encore plus homogène et surveillée médicalement comme chacun sait!
Merveilleuse époque où l'émotion prime sur la réflexion...
Le BEA enfermé dans le silence
Je comprends le message de Gil Roy différemment de vous ; dans pratiquement chacun des articles sur le sujet, y compris la présente publication, Gil dénonce les excès des médias mainstream.
Évidemment, je ne peux pas parler à la place de Gil, mais j'imagine que sa dernière phrase qui fait tant polémique est plutôt l'expression d'un ras le bol, qui veut dire que puisque le mal est fait, videz l'abcès pour qu'on en finisse plus vite et que les médias passent à autre chose.
Là-dessus, je le rejoins, même si j'estime que l'on devrait fiche la paix aux enquêteurs/procureurs/familles/...