Le Kazakhstan mise sur le transport aérien

L’ancienne république soviétique du Kazakhstan est engagée dans la mutation vers une organisation occidentale de son transport aérien. Air Astana et la future Qazaq Air vont recevoir de nouveaux avions. Les infrastructures aéroportuaires ont un besoin urgent de remise à niveau.

Début juillet 2015, le constructeur canadien Bombardier a annoncé au cours d’une conférence de presse à Astana, que Qazaq Air, filiale de Samruk Kazyna, fonds souverain du Kazakhstan, allait ouvrir des lignes intérieures au Kazakhstan avec trois avions Q400 loués de Falcon Aviation Services LLC d’Abu Dhabi. C’est ce même fonds souverain qui détient la majorité du capital de la compagnie nationale Air Astana.

Qazaq Air sera basée dans les aéroports d’Almaty et Astana, d’où une douzaine de routes intérieures sont prévues, plusieurs des destinations n’étant pas encore desservies. Elle aura notamment pour vocation d’approvisionner le réseau international d’Air Astana qui en juin a commandé 7 Airbus de la famille A320 pour renouveler et étendre sa flotte.

 

La future compagnie régionale pour sa part, devrait ouvrir des bases à Aktau et Atyrau et inaugurer des liaisons régionales, la flotte devant compter jusqu’à dix Q400. Aucune date de lancement des opérations n’a toutefois été communiquée. Qazaq Air pourrait venir concurrencer la petite compagnie SCAT qui exploite 3 avions sur des lignes intérieures et qui figure toujours sur la liste noire.

Le Kazakhstan a d’importantes ressources naturelles et le transport aérien est un outil de valorisation de ses richesses. L’économie du pays repose sur les exportations de pétrole qui représentent 55% des ressources de l’Etat. Il possède le plus grand champ pétrolier découvert dans les 30 dernières années à Kachagan, et les travaux le concernant constituent actuellement le plus grand projet industriel au monde (150 milliards de dollars). Par ailleurs le pays détient 8% des réserves mondiales de minerai de fer. Il est au second rang pour les réserves de manganèse, et possède un tiers de celles de chrome. Enfin, il est devenu le premier producteur mondial d’uranium, et dispose de 17% des réserves mondiales.

Autrement dit ce vaste pays (4 fois et demie la superficie française), peu peuplé (18 millions d’habitants) dépense sans compter pour se placer à la fois dans la cour des grands et pour s’affirmer comme la charnière entre deux mondes : l’Europe et la Russie, d’une part, et la Chine et l’Asie d’autre part.

Pour réussir le pari d’une croissance tout azimut, le pays a besoin d’être relié au reste du monde. Le faible coût local du carburant est un élément facilitateur. Le prix du carburant avion au Kazakhstan est la moitié de celui vendu à Roissy. Comme la compagnie Air Astana assure principalement des vols inférieurs ou égaux à 6 heures, elle peut s’approvisionner majoritairement en pétrole local.

Le Kazakhstan qui a décidé de développer ses compagnies aériennes est confronté à la saturation de ses aéroports d’Astana et d’Almaty. Le trafic d’Astana est passé de 1,5 millions de passagers en 2006, à 3,8 en 2014. 7 millions sont attendus en 2017. Aéroport de Paris a remporté le contrat de création de la nouvelle aérogare.

L’aéroport d’Almaty représente la moitié du trafic des voyageurs du Kazakhstan et 68 % du trafic de marchandises. En 2006, il a traité 2 millions de passagers et le double en 2012. Cette plaque tournante du transporteur national Air Astana, est également l’un des principaux aéroports d’Asie centrale concernant le fret et les avions cargos. L’actuel terminal est saturé. Il a été conçu pour 1.500 passagers heure, il en reçoit 1.800. Ses 4 passerelles ne suffisent plus. Il est prévu de construire un nouveau terminal passagers pour les vols internationaux (six passerelles) d’une capacité qui pourra aller jusqu’à 2.500 passagers par heure.

Le développement du trafic aérien passe aussi par le recrutement de pilotes de ligne. Air Astana a mis en place, en 2009, une formation ab-initio pour augmenter le nombre de pilotes nationaux. 15% environ des effectifs sont des étrangers (anglais, hollandais, australiens, … on ne se souvient que d’un copilote français), en général des commandants de bord.

La formation est organisée soit à l’Atlantic Flight Training Academy à Cork en Irlande, soit au Flight Training Europe à Jeres de la Frontera en Espagne. 207 pilotes au total ont débuté le parcours, et 162 l’ont terminé : 46 pour les Boeing 757/767, 75 pour l’Airbus A320, 25 pour l’Embraer et 16 restent en attente de qualification. Il semble que le rythme des ab-initio se ralentisse, puisque l’avant-dernière promotion rassemblait 9 pilotes, la dernière 4, et actuellement aucun n’est en formation.

Au dernier salon du Bourget, Air Astana a commandé sept A320neo. L’icône du Kazakhstan, Toty Amirova, sera l’un des futurs commandants de bord de ces nouveaux avions qui entreront en service à partir de 2016. La compagnie compte également 5 femmes copilotes sur un total de 350 pilotes.

Jean Ponsignon