Le transport aérien européen mise sur les SAF

Le coup d’envoi des Connecting Europe Days (28,29 et 30 juin 2022), évènement sur les transports et la mobilité organisé par la Commission européenne en collaboration avec la présidence française du Conseil de l’Union européenne a été donné à l’aéroport Lyon-Saint Exupéry. A cette occasion, ce sont 11 vols, opérés par Air France, KLM, Easyjet, Wizz Air, Transavia, Vueling et Lufthansa, qui ont été avitaillés en carburant d’aviation durable par TotalEnergies.

Les SAF (Sustainable Aviation Fuels) ou carburants d’aviation durables ne sont évidemment pas le seul levier pour atteindre la décarbonation du transport aérien à l’horizon 2050, mais c’est à ce stade l’un de ceux disponibles immédiatement ou à court terme. Dans l’immédiat, le carburant qui émet le moins de CO2 est celui que l’on ne consomme pas a rappelé Joel Navaron, Directeur Aviation de TotalEnergies à la tribune des Connecting Europe Days. Tous les regards se tournent évidemment vers la nouvelle génération d’avions qui offrent des économies de consommation de kérosène de l’ordre de 15 à 20% par rapport à la précédente, soit 15 à 20% de rejet de CO2 en moins, à trafic équivalent évidemment…

L’autre levier de réduction des émissions de CO2 est le carburant d’aviation durable. Pour l’heure, il coule au compte-goutte et chaque vol avec un mélange de SAF est largement médiatisé. La Commission européenne ne pouvait pas rater l’occasion de mettre en scène l’amorçage de la pompe qui doit mener à une consommation minimale de 2% en 2025, soit 5 milliards de litres. En 2021, la production mondiale de SAF a été de 125 millions de litres, soit 0,1% de la consommation.

Le 28 juin 2022, 11 vols, opérés par Air France, KLM, Easyjet, Wizz Air, Transavia, Vueling et Lufthansa ont été avitaillés en SAF par TotalEnergies. Ce biocomposant aérien durable est produit par TotalEnergies, en France, dans sa bioraffinerie de La Mède (Bouches-du-Rhône) et son usine d’Oudalle (Seine-Maritime), à partir d’huiles de cuisson usagées et mélangé à hauteur de 30% avec du carburant traditionnel (Jet-A1). « Grâce à ce taux d’incorporation, ce SAF a permis de réduire de près de 27 % les émissions de CO2 de ces vols. », affirme TotalEnergies.

La veille de cet événement, IAG Cargo, la division cargo d’International Airlines Group (IAG), a annoncé l’achat d’un million de litres de carburant aéronautique éco-responsable (SAF) pour les besoins de son client Bolloré Logistics. Les deux livraisons de SAF (l’une en juillet et l’autre en novembre 2022) permettront de réduire d’environ 2.400 tonnes les émissions de CO2 sur la base du cycle de vie. La fabrication de SAF se fera à partir de matières premières et de déchets durables dans la raffinerie Humber de Phillips 66, située dans le North Lincolnshire (Royaume-Uni).

En avril 2021, IAG (British Airways) est devenu le premier groupe aérien européen à s’engager à utiliser 10 % de SAF pour l’ensemble de sa flotte d’ici 2030. C’est le double de l’objectif fixé par l’OACI au transport aérien.

Le 27 juin 2022 également, les députés européens ont modifié la proposition de définition concernant les carburants durables pour l’aviation, un terme qui couvre les carburants de synthèse ou certains biocarburants issus de résidus agricoles et sylvicoles, d’algues, de biomasse ou d’huile de cuisson usagée.
Ils ont ajouté à cette définition les carburants de carbone recyclable produits à partir du traitement du gaz et de gaz d’échappement dérivant de processus de production dans les installations industrielles. Les eurodéputés souhaitent également que certains biocarburants, issus de graisses animales ou de distillats, soient utilisés dans le mix énergétique du secteur de l’aviation pour une durée limitée (jusqu’en 2034). Toutefois, ils excluent les carburants produits à partir de cultures destinées à l’alimentation humaine ou animale et ceux dérivés de l’huile de palme, car ceux-ci ne sont pas conformes aux critères de durabilité.

Les députés européens ont proposé la création d’un fonds pour l’aviation durable de 2023 à 2050 pour accélérer la décarbonation dans le secteur et soutenir les investissements dans les carburants durables, les technologies innovantes de propulsion d’aéronefs ou la recherche. Il faut maintenant que le Parlement européen approuve ce projet de position de négociation lors de la session plénière de juillet 2022. Les députés européens seront alors prêts à entamer les négociations avec les gouvernements de l’UE sur la forme finale de la législation. L’objectif est de réduire l’écart tarifaire entre le kérosène et les SAF. Le rapport est de l’ordre de 1 à 4 voire 5.

Il va se passer encore plusieurs mois avant que les SAF commencent à être disponibles sur un nombre significatif d’aéroports. On doit donc s’attendre à la multiplication des opérations promotionnelles. Il semble bien néanmoins que la pompe est amorcée.

Gil Roy