Le transport aérien français est à la traine de l’Europe. Les Assises Nationales du Transport Aérien sont présentées comme une opportunité de refaire ce retard. Le gouvernement donne six mois aux acteurs de la filière pour s’entendre sur des solutions qui pourraient permettre au secteur d’améliorer sa performance.
Il y a eu le rapport Le Roux du nom d’un député qui avait pris le temps d’écouter les professionnels du transport aérien. Il avait fait un état des lieux alarmant et proposé une série d’actions concrètes pour redonner du souffle à un secteur.
L’espoir suscité par la remise de ces travaux au premier ministre de l’époque avait fait naître un grand espoir chez les professionnels qui, l’espace d’un instant, avaient refusé d’imaginer que le rapport Le Roux puisse connaître le sort de tous les rapports qui l’avaient précédé. C’était en novembre 2014 et depuis, la situation de la France a continué à se dégrader.
« Le pavillon français a perdu 17 points de part de marché depuis 2000 et ne capte que 10 % de la croissance annuelle du marché domestique. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de cette situation qui, certes, s’explique en partie par des facteurs conjoncturels mais à laquelle chacun a aussi une part de responsabilité. », a déclaré Elisabeth Borne, ministre des Transports, à la tribune des Assises Nationales du Transport Aérien. L’époque n’étant plus aux rapports, le transport aérien comme l’alimentation juste avant lui, a donc droit à ses Assises. Six mois pour mettre à plat les problèmes et trouver un point d’accord entre tous les intervenants.
Le coup d’envoi des Assises a été donné, le 20 mars 2018, par la ministre des Transports, en personne. Ce lancement a pris la forme d’une grand messe organisée au parc des expositions de la porte de Versailles où le hall 7 avait été rebaptisé « Terminal 7« . Un peu plus de 500 invités y ont pris part. Toutes les fédérations, syndicats et associations diverses étaient représentés au plus haut niveau. C’était le rendez-vous qu’il ne fallait pas manquer.
Cet élan illustre la forte attente que suscitent ces Assises organisées par le gouvernement. Le transport aérien français est englué dans un enchevêtrement réglementaire qui le pénalise vis-à-vis de la concurrence étrangère. « L’Etat doit donner une plus grande cohérence à l’ensemble des objectifs de politique publique qu’il fixe. », reconnaît la ministre des Transports. « Pour ne citer qu’un exemple, les coûts liés à la sûreté ont été multipliés pratiquement par 10 depuis les attentats du 11 septembre 2001 et demeurent à la charge exclusive des compagnies aériennes. Les Assises sont l’occasion de ré-analyser les coûts de la sûreté. »
Il est évident que sur un sujet comme celui-ci, il sera facile d’obtenir l’adhésion des professionnels, à commencer par celui des aéroports et des compagnies aériennes. Mais à échanger avec les uns et les autres, il apparaît que les points de divergences sont plus nombreux que les points de convergence.
La FNAM (Fédération nationale de l’aviation marchande) va profiter de ces Assises pour demander à nouveau l’application de la réglementation européenne sur les temps de repos des pilotes (Flight Time Limitations) que rejette catégoriquement le SNPL (Syndicat national des pilotes de ligne). Et les exemples de ce type peuvent être multipliés à l’infini. Même si la ministre a tenu à préciser qu’aucun sujet ne devrait être tabou, la remise en question des quotas qui plafonnent l’activité à Orly n’est apparemment pas d’actualité.
Plus globalement, pour le gouvernement français, il a trois défis à relever. Les Assises doivent permettre au transport aérien de réussir la transition écologique et de s’inscrire dans un développement durable, de rendre le pavillon français plus compétitif dans la concurrence mondiale et de préparer les nouvelles ruptures technologiques et le transport aérien du 21ème siècle . Trois immenses chantiers qui doivent être menés de front, et c’est là, en particulier, que réside une partie du problème. L’autre aspect de la problématique est évidemment lié au fait que tous les acteurs n’ont pas les mêmes priorités, ni les mêmes intérêts.
Contrairement à un rapport classique dont les gouvernements précédents ont été friands pendant des décennies et des décennies, et pour lequel le rapporteur recueillait les différents points de vue et proposait sa synthèse personnelle, les Assises vont réunir autour de la même table tous les points de vue, avec pour finalité de faire émerger des points de convergence.
Pour rationnaliser les échanges, cinq thèmes ont été identifiés, et les travaux vont s’articuler autour de ceux-ci. Ils portent sur l’économie, la desserte des territoires, l’environnement, l’innovation au service des passagers et enfin le social. Ils seront tous abordés sous l’angle de la performance, le mot d’ordre des Assises.
Les travaux se dérouleront sur six mois pour une clôture en septembre. L’essentiel des ateliers, colloques et groupes de travail qui abriteront les débats se termineront début juillet. L’été sera un temps de synthèse et de préparation des décisions du gouvernement. Les ateliers se sont mis au travail le jour même du coup d’envoi des Assises.
Il est évident que ces Assises feront des déçus. Les problèmes accumulés depuis des temps immémoriaux par le transport aérien ne pourront pas tous être résolus en six mois. Personne n’imagine le contraire. En revanche, la volonté des professionnels, de quelques bords qu’ils soient, de faire bouger les lignes est palpable. Et c’est sur ce besoin vital de changement que mise le gouvernement.
Si les acteurs de ces Assises parviennent à trouver des points d’accord, le mouvement sera enclenché. Le transport aérien aura alors fait la démonstration qu’il est capable de se prendre en main, et l’Etat qu’il a la volonté de laisser aux professionnels plus d’autonomie. Nous voulons y croire…
Gil Roy
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Tant que les avis des principaux intéressés, les consommateurs Français, ne seront pas pris en compte, le marché échappera aux compagnies nationales. Notamment en ce qui concerne l'échelle des prix pratiqués. Tout en tenant compte du fait que la France est davantage de dimension comme de tradition ferroviaire.
Si Alan EACH est affilié à l'USAC-CGT, alors je trouve regrettable qu'Aérobuzz se fasse le porte-voix d'un syndicat, peu importe lequel par ailleurs, et se transforme en tribune politique. Il y a, quand même, à ses assises nationales, des personnes qui travaillent, partagent, discutent, s'affrontent aussi (verbalement), et ont en ligne de mire le redressement du pavillon Français.
L'USAC-CGT, premier syndicat de la DGAC, a refusé d'assister au lancement des assises : "Sous couvert d’état des lieux et d’amélioration de la performance, le
Gouvernement, qui a préparé ces assises avec les seules compagnies
aériennes, excluant des acteurs aussi peu importants à ses yeux que
les passagers et les salariés, s’apprête à liquider la politique publique du
transport aérien.
En faisant siens les projets des compagnies qui se résument à toujours
moins, moins de services aux passagers, moins de dessertes jugées
non rentables, moins de salariés, moins de taxes et donc moins de
sécurité et de sureté des vols… en même temps qu’il organise la casse
du ferroviaire, le Gouvernement met en scène la grande braderie du
transport aérien."
Il est à espérer que les acteurs sauront voir la réalité en face, sortir de leurs postures historiques.
Perdre 90% de la progression devrait alerter, devrait être lu avec distance et objectivité. Peut-être faut-il faire le deuil des anciens modèles ...
Sans conteste le low-cost et les nouveaux modèles économiques sont de toutes les manières plus efficaces.
Il faut s'interroger pourquoi la concurrence gagne ces parts.
Ou alors nous souhaitons les leur offrir ? (Quel panache nous aurions en France !)
Nous avons amené le Fly by Wire au commercial, mais c'est de la technique, il faudrait montrer que l'on sait également comment franchir une étape structurelle.