Le Bureau d’Enquêtes et d’analyse (BEA) vient de publier ses premières conclusions sur l’incident « grave » du vol AF011 survenu le 5 avril 2022 peu avant l’atterrissage à CDG. Le Boeing 777 est mis hors de cause. En revanche, la gestion de la remise de gaz hyper médiatisée pose question et ne va pas manquer d’ouvrir un nouveau débat.
« Aucune alarme de dysfonctionnement n’a été déclenchée lors de l’événement » et « aucune anomalie n‘a été constatée sur l’avion » précise sans équivoque le communiqué du BEA publié ce mercredi 27 avril 2021. Il ajoute qu’à ce stade, l’analyse des paramètres ne met pas en évidence d’incohérences, notamment entre les mouvements des commandes et les mouvements de l’avion. Cet incident classé « grave », dont les conversations ATC avaient été dévoilée sur les réseaux sociaux le jour même, avait enflammé les médias il y a moins d’un mois…
L’appareil, un Boeing 777 immatriculé F-GSQJ, effectuait sa rotation retour de New-York JFK pour se poser à CDG (AF011) avec 15 membres d’équipage (dont les 2 pilotes) et 177 passagers. L’appareil était en finale en approche ILS pour la piste 26L (sur le doublet sud de l’aéroport, face à l‘Ouest) avec « un vent de 230° pour 8 kt, une visibilité́ de 3 000 m et un plafond de nuages à 300 ft, une température 9 °C et QNH 1013. »
Le copilote était en fonction lorsque l’avion est établi sur les faisceaux ILS puis après avoir déconnecté le pilote automatique (AP) à une altitude de 1670 ft (500 mètres) il poursuit son approche en manuel assisté de l’auto-manette (AT) et des directeurs de vol FD) qui restent donc activés.
Jusque-là, l’avion reste établi sur l’axe ILS, le roulis (rotation autour de l’axe longitudinal de l’avion) limité de moins de 2° à droite et à gauche.
Sans en expliquer clairement les raisons à ce stade, le BEA détaille qu’à 07 h 51 min 06 de vol le copilote exprime son étonnement concernant l’inclinaison de l’avion. Les actions en roulis sont amplifiées et l’appareil finit par se retrouver incliné à gauche de 7°, avec le volant orienté à gauche de 16°. Le CDB exprime sa surprise concernant l’écart de trajectoire.
Bien que « la trajectoire (soit) restée dans les critères de stabilisation de l’exploitant », l’équipage procède à une remise de gaz. Selon le BEA, « les paramètres enregistrés montrent que les deux pilotes agissent ensuite simultanément sur les commandes ». La seconde suivante, la position du volant atteint un maximum de 27° à gauche. Une seconde après, le roulis atteint un maximum de 15° à gauche et l’assiette (angle entre l’axe longitudinal de l’avion et l’horizon) est de 12° à cabrer.
C’est à ce moment précis que le commandant de bord déclare » il part à gauche ! »
Le BEA pointe des actions contraires du commandant de bord et du copilote sur les commandes avant la remise de gaz. Alors que l’un a maintenu une action légèrement à piquer, l’autre appliquait à plusieurs reprises des actions plus marquées à cabrer » précise le communiqué…
S’en suit la remise des gaz initiée par le copilote, qui fait passer « la poussée au maximum disponible », l’assiette atteint un maximum de 24°…
« Le copilote annonce « positive climb » et rentre le train d’atterrissage. L’alarme de configuration (déclenché par les volets restés en position d’atterrissage) s’affiche et l’alarme sonore associée (Siren) retentit. Les deux pilotes continuent d’agir simultanément sur les commandes. Le CDB applique pendant quelques secondes des actions à piquer plus marquées. »
Selon le BEA, l’équipage n’aurait pas perçu les actions antagonistes sur les commandes, avant de considérer qu’il pouvait réutiliser l’AP et effectuer une nouvelle approche. Après avoir demandé la piste 27R en priorité, l’approche et l’atterrissage se déroulent sans nouvel incident.
Jérôme Bonnard
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Alors que les séquences de pilotage simultané ou double pilotage sont innombrables sur Airbus les Boeing étaient jusque là épargnés.
Voilà que cet incident fait exception à la règle.
Transparent sur Airbus le pilotage simultané sur Boeing entraine des retours sensoriels dès la moindre pression sur la commande opposée.
Il semble que l'intervention du pilote non au commande ait été perçu par celui que tenait le volant comme un défaut dans le système des commandes de vol, entrainant des réactions antagonistes.
Au final c'est le plus musclé qui gagne !
Les explications des pilotes seront difficiles ...