C’est une étude prospective pour le moins surréaliste que vient de publier, en date du 1er mars 2022, l’Association internationale du transport aérien (IATA). Elle table sur 4 milliards de passagers aériens en 2024, soit plus qu’en 2019. Le conflit ukrainien ne semble pas inquiéter l’IATA.
A la différence des journalistes qui manifestent une propension à surréagir aux événements, les économistes savent relativiser. Quand les uns ont tendance à en faire toujours un peu trop, les autres restent droits dans leurs bottes. Les prévisions de redressement du trafic aérien mondial que vient de rendre public l’IATA offrent une illustration de ce décalage.
Fidèle à ses rendez-vous trimestriels, l’IATA annonce sa couleur pour les années à venir. Elle voit les passagers revenir en nombre jusqu’à effacer le plongeon de 2020. Selon ses économistes, la barre des 4 milliards sera atteinte en 2024. Le trafic sera alors supérieur de 103% à ce qu’il a été en 2019.
« La trajectoire de la reprise du nombre de passagers depuis le COVID-19 n’a pas été modifiée par le variant Omicron. Les gens veulent voyager. Et lorsque les restrictions de voyage sont levées, ils retournent dans les cieux. Le chemin est encore long avant d’arriver à un état normal des choses, mais les prévisions d’évolution du nombre de passagers donnent de bonnes raisons d’être optimiste« , a déclaré Willie Walsh, directeur général de l’IATA.
Et l’IATA de dérouler son scénario de reprise : « En 2021, le nombre global de voyageurs représentait 47 % du niveau de 2019. Ce chiffre devrait passer à 83 % en 2022, 94 % en 2023, 103 % en 2024 et 111 % en 2025. En 2021, le nombre de voyageurs internationaux représentait 27 % du niveau de 2019. Ce chiffre devrait passer à 69 % en 2022, 82 % en 2023, 92 % en 2024 et 101 % en 2025. »
Et IATA de préciser : « Il s’agit d’un scénario de reprise internationale à court terme légèrement plus optimiste par rapport à novembre 2021, basé sur l’assouplissement ou l’élimination progressive des restrictions de voyage sur de nombreux marchés. Des améliorations ont été constatées sur les principaux marchés de l’Atlantique Nord et intra-européens, ce qui renforce la base de la reprise. L’Asie-Pacifique devrait rester à la traîne de la reprise, le plus grand marché de la région, la Chine, ne montrant aucun signe d’assouplissement de ses mesures frontalières sévères dans un avenir proche. »
Le plus étonnant est peut-être cette affirmation : « Si les marchés intérieurs américain et russe se sont redressés, il n’en va pas de même pour les autres grands marchés intérieurs que sont la Chine, le Canada, le Japon et l’Australie. »
Pour l’IATA, dans l’immédiat, ce sont les restrictions que les gouvernements imposent aux voyages, qui impactent le plus la reprise. Et elle le dit. Une fois de plus, Willie Walsh réclame la levée de ces restrictions.
En toute fin de son étude, l’IATA précise que « Les prévisions ne tiennent pas compte de l’impact du conflit Russie-Ukraine. » Et d’ajouter : « En général, le transport aérien résiste bien aux chocs et il est peu probable que ce conflit ait un impact sur la croissance à long terme du transport aérien. » Reste à définir « long terme ». Et de conclure : « Il est trop tôt pour estimer quelles seront les conséquences à court terme pour l’aviation, mais il est clair qu’il existe des risques de baisse, en particulier sur les marchés exposés au conflit. » Un journaliste n’aurait pas dit mieux !
Dans ces conditions, on peut se demander pourquoi l’IATA a tenu à rendre public une telle étude.
Gil Roy
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Bonjour. Voici une démonstration charpentée... mais qui demeure une construction. Ainsi, vous remontez à la Grenade, et évoquez la Syrie... où sont particulièrement implantés les Russes. Avec de tels raisonnements, fort courants en France, on imaginerait bien que la Première et la Seconde guerres mondiales ont été voulues par les Etats-Unis, non? En tout cas, à la France et l'Europe de se renforcer. D'autant que les USA, nous le savons depuis un certain temps, sont préoccupés par la montée en puissance de la Chine de Pékin. Alors? Amicalement
@François h.
Vous avez raison, mais la présence Russe à Grenade ou même en Syrie ne constitue pas vraiment une menace militaire pour les Etats Unis. (Tout au plus une influence irritante..)
Je ne fais juste que constater que, depuis la fin de la guerre froide (disons la chute du mur de Berlin) l'Europe avait tout intérêt à se rapprocher de la Russie avec laquelle elle partage le continent et cela dans un partenariat "gagnant-gagnant" où chacun trouvait bénéfice.
Ça ne veut pas dire qu'il fallait offrir un blanc-sein aux Russes (surtout avec Poutine aux commandes) mais clairement la puissance Européenne s'en serait trouvée renforcée.
C'est cela que les stratèges Américains redoutent depuis 1989 !
Ils ont donc (selon moi, mais avouez que cette version que vous dites partagée en France n'est pas trop médiatisée...) créé habilement tout un tas d'entraves à ce rapprochement en jouant sur des émotions auxquelles les peuples Européens sont forcément sensibles (les méchants Serbes pro Russes massacrant les gentils kosovars Turcophiles....) et en les amenant systématiquement à s'éloigner de la Russie.
Je vous rappelle que John Kerry (Démocrate US) avait pris position (au nom de qui ?) pour une adhésion de la Turquie à l'UE !
Le "bordel" que les Américains ont mis au moyen orient (Irak, Syrie, etc...) a eu la conséquence (à mon avis calculée) d'affaiblir l'Europe en y favorisant l'islamisme.
Pour moi, tous les moyens (directs ou détournés) sont bons pour affaiblir la construction d'une Europe qui ne leur est assujettie "QUE" parce qu'ils la protègent (selon eux) de la Russie.
Pour l'Ukraine, évidemment, "il n'y a pas photo" sur la brutalité de l'attitude Russe.
Mais, encore une fois, l'émotion nous masque la réalité de la genèse du conflit ; l'Europe est majoritairement dans l'OTAN. L'Ukraine, depuis Porochenko, veut adhérer à l'Europe et toutes ses pleurnicheries de l'époque pour obtenir cette adhésion avec les subventions à la clef ont donné aux Américains des arguments pour l'y inciter...il est normal que les Russes en soient inquiets.
Je viens de relire la plupart des documents disponibles sur le drame du MH017 abattu par les séparatistes pro-Russe ; il y manque juste un élément crucial : les transcriptions des échanges radio entre l'équipage Malaysien et le contrôle aérien Ukrainien ....pour expliquer pourquoi cet avion a été guidé (par hasard ?) vers une zone de guerre où plusieurs avions militaires avaient été abattus dans les jours précédents par les mêmes séparatistes (qui ont effectivement fait la connerie..)
Bon, Gil va sûrement me freiner dans cette argumentation qui nous éloigne du thème initial (les prévisions IATA).
Mais je reste convaincu que, même si (et surtout si...)Poutine est une brute et même s'il est impossible de rester insensible au sort des Ukrainiens qu'il bombarde, cette guerre n'aurait jamais eu lieu si les Etats Unis n'avaient pas , visiblement ou en sous-main, manipulé les Européens pour leur faire croire qu'envisager l' adhésion de l'Ukraine à l'UE, puis à l'OTAN, n'aurait pas de conséquence.
Bien à vous,
Jean-Baptiste Berger
J'adhère, sans restrictions !
@PO GREGOIRE
Vous n'avez lu (et cru comprendre) que la partie de ce que j'ai écrit qui vous arrange et vous permet (comme nombre d'intellos cherchant à "briller" comme vous dites) de démontrer votre sensibilité face à ce drame ; je n'insulte personne et, puisque vous m'obligez à préciser ce qui me paraissait aller de soi, mon soutien va sans condition aux Ukrainiens face à cette ignoble agression de Poutine.
Je disais juste (je le répète sous une autre forme, donc) que Poutine est le chef brutal qu'ont les Russes parce que les Américains ont tout fait pour que, la guerre froide terminée, la normalisation de la Russie, notamment par un rapprochement positif avec l'Europe, ne se fasse pas.
Dans un contexte où la Russie n'aurait pas été artificiellement désignée comme ennemie alors qu'elle avait perdu sa puissance et que l'affrontement "est ouest" relevait du passé, l'Ukraine aurait tout naturellement pu prétendre rejoindre l'UE, la Russie devenant elle-même un composant important de l'Europe, ce que les USA ne voulaient surtout pas !
Et pour être encore plus précis, j'en veux moins aux Américains d'avoir maintenu ce clivage est/ouest qu'aux dirigeants mous et naïfs Européens pour les avoir suivis.
Avec cette guerre, l'histoire fait un pas en arrière de trois quarts de siècle (un siècle entier si on considère que l'Allemagne va maintenant avoir une armée forte ), les USA ont retrouvé à moindre coût leur rôle auto-proclamé de police du monde, et l'UE, comme la Russie, vont avoir beaucoup de mal à s'en remettre (et, pour vous éviter un commentaire aimable à mon endroit, ce sont bien sûr les Ukrainiens qui en payent injustement le prix fort !).
Jean-Baptiste Berger
M. Berger, votre commentaire est une insulte au peuple Ukrainien. Sous pretexte que leur voisin est belliqueux et puissament armé, alors ils devraient ne pas pouvoir décider de leur sort ?
L'adhésion d'un pays à l'UE ne devrait jamais être la cause d'une agression telle que l'Ukraine subit actuellement.
A vous lire, il semble plus important de chercher de potentielles théories plus ou moins prouvées impliquant les Etats-Unis, qui permettent plus ou moins de briller en société en prenant le contrepied de la réalité sanglante actuelle d'une jeune démocratie qui devrait avoir le droit de se gérer elle même, sans subir la menace et l'invasion de son voisin fou furieux et notoirement anti-démocratique ...
La photo illustrant l'article est un symbole criant du dilemme que le conflit en Ukraine crée pour certains pays occidentaux et leur industrie.
Sans bien sûr avaliser les décisions belliqueuses du Tsar actuel, on peut toutefois se demander si elles n'ont pas été habilement provoquées (et de longue date) par son homologue Américain et ses prédécesseurs, profitant justement de la personnalité intransigeante de Poutine.
Suis-je le seul à constater que :
-Ce conflit n'affecte économiquement "que" le noyau fort de l'Europe (France, Allemagne, Italie, Espagne) ? (qui ont des relations commerciales fortes avec la Russie) ?
-Les USA n'ont strictement rien à y perdre, au contraire ! (Qui va nous vendre, et à quel prix, les denrées qui pourraient nous manquer et les armes qu'on prétend envoyer en Ukraine, ainsi que celles pour éventuellement nous défendre (OTAN) ?
-Une des principales décisions de l'Allemagne est de "se réarmer" (auprès de qui ?) et ça n'inquiète personne ?
Je l'écrivais il y a peu sur ce blog, les brillants politiciens Européens sont "à la remorque" des Américains depuis longtemps, on est en train de nous refaire le coup du Kosovo où on a d'ailleurs eu assez peu de scrupules à bombarder la Serbie avec autant de douceur que la Russie aujourd'hui pour l'Ukraine et sensiblement pour les mêmes prétextes (sous prétexte de s'interposer dans une guerre cessessioniste on a délibérément choisi de protéger un camp qui n'avait pourtant rien à envier à Milocevic en matière d'atrocités perpétrées...)
On m'a reproché de faire de l'anti-Américanisme, certes, mais je n'ai rien contre les Américains (je possède avec bonheur un avion de chez eux...) c'est plutôt contre leur politique interventionniste (Irak, Kosovo, Grenade, Syrie, etc...) endroits loin de chez eux où ils ont pourtant très démocratiquement largué des bombes sans pour autant en avoir reçu une seule sur le nez, et où ils ont entrainé des pays Européens à leur botte à les imiter ! (A part peut-être en Libye, où des intérêts d'une autre nature ont entrainé la France à s'engager en solo....)
Poutine joue un jeu très dangereux, on va le payer cher, mais lui et son pays encore plus !
Dans une Europe (des mots) soudainement très unie un pays (la France) va perdre son influence au profit des Allemands qui sont justement très fortement aidés par les Américains dans cette optique !
(Si on nous oblige, sous prétexte de défense Européenne, à partager la bombinette avec eux, on est foutus....)
...Et je ne serais pas surpris que Lufthansa obtienne beaucoup plus facilement qu'AirFrance les lignes vers l'Asie passant par l'Alaska indispensables à la réalisation du scénario optimiste de l'IATA !
Comme j'aimerais avoir tort !
Jean-Baptiste Berger
Jean-Baptiste Berger, toujours un tel régal que de lire vos interventions, pour lesquelles je suis à quasi 100% en accord... et j'espère que nous soyons des plus nombreux en cela. Les évènements tardent à le confirmer... nos élections ne vont pas tarder à le confirmer malheureusement.
Voilà une analyse très pertinente, Mr Berger! Elle mérite réflexion.
J'espère que nos dirigeants ont aussi envisagé ce scenario lors de leurs conseils de défense...