Travaux à venir, changement d’exploitant et inquiétudes à Beauvais-Tillé

Le SMABT, propriétaire de l’aéroport de Beauvais-Tillé, passe à la vitesse supérieure. 190 millions d’euros vont être investis pour adapter les infrastructures au volume de trafic et tirer profit de la croissance du nombre de passagers. Les ambitions affichées de la SMABT et du groupement Bellova, nouveau gestionnaire de la plateforme inquiètent les riverains.

Beauvais-Tillé qui se présente comme le troisième aéroport parisien s’est hissé dans le Top 10 des aéroports français en l’espace de quelques années. Il tire sa spectaculaire croissance de Ryanair qui très tôt, dès 1997, en a fait sa tête de pont en région parisienne. Il a néanmoins fallu attendre 2020 pour que la compagnie irlandaise décide d’implanter à Beauvais une base. Même si aujourd’hui, sept compagnies sont présentes à Beauvais, Ryanair demeure l’acteur principal de la croissance, avec 80 % du trafic total de la plateforme.

Aéroport 100% low cost, Beauvais affiche depuis plusieurs années la meilleure progression de trafic parmi les aéroports millionnaires. Il est aussi celui qui a le plus fortement rebondi après la pandémie. En 2023, alors que l’ensemble des aéroports français se situaient encore en dessous de leur niveau de 2019 (94,5%), Beauvais était à 141,3% avec 5.637.661 passagers. A fin août 2024, alors que l’ensemble des aéroports français n’avaient toujours pas retrouvé le niveau d’avant la crise, Beauvais qui talonne désormais Bordeaux et Nantes, affichait 166,2%.

Cette éclatante santé encourage aujourd’hui le SMABT (syndicat mixte de l’aéroport Beauvais Tillé), propriétaire de la plate-forme, a lancé un ambitieux projet de modernisation de la plate-forme et de ses infrastructures qui depuis longtemps ne sont plus adaptées au niveau actuel de trafic. Cette décision coïncide avec la reprise de l’exploitation, depuis le 1er octobre 2024, par la société Bellova constituée par Egis, Serena Industrial Partners, Bouygues Construction, Aéroports de la côte d’Azur et TIIC. 

Les plans d’agrandissement de l’aéroport prévoient la création d’un troisième bâtiment, qui permettra la jonction des deux aérogares existants. L’un étant aujourd’hui réservé aux départs et le deuxième aux arrivées. Une doctrine qui ne répond plus aux besoins actuels. « Ce nouveau bâtiment devrait voir le jour sous 4 ans. Il va permettre d’améliorer l’expérience client au sein de cet aéroport dépassé par sa croissance » explique Tristan Gaillot du groupe EGIS. « La construction de 2.000 places de parkings supplémentaires sont également prévues en parallèle de l’agrandissement de 1000m2 de la surface commerciale. » précise Philippe Trubert, le directeur du Syndicat mixte de l’aéroport.

L’extension de l’aérogare va également permettre la création de 1.000 m² de surfaces commerciales supplémentaires. Avec un trafic qui devrait avoisiner les 6 millions de passagers dès 2024, et logiquement plus dans les années à venir, Beauvais se doit d’offrir à ses clients un vaste espace commercial. C’est devenu une passage obligé pour les gestionnaires d’aéroports dont les salles d’embarquement sont transformées progressivement en vastes centres commerciaux. Les passagers des compagnies low cost sont des consommateurs à part entière.

Le plan de trafic de l’aéroport prévoit un cap à plus de 45.000 mouvements annuels, qui a été fixé comme le seuil d’équilibre économique de ce projet de modernisation par Bellova.  Ce chiffre est à rapprocher des 33.745 mouvements et 5,6 millions de passagers en 2023. En 2024 l’activité devrait s’élever à 37.000 mouvements et 6 millions de passagers. A terme, Beauvais pourrait atteindre plus de 53.000 mouvements par an.

Le projet de modernisation de l’aéroport de Beauvais porte également sur la création de nouveaux taxiways, l’agrandissement des parkings avions, avec une capacité de stationnement qui passera de 12 à 18 appareils. Des extensions qui ne sont pas sans inquiéter les communes aux alentours. « Nous constatons une augmentation des nuisances, la détérioration de la qualité de l’air. Vivre dans Tillé sans avoir les odeurs de kérosène est un défi aujourd’hui ! Et pour demain, ce sera notre quotidien ? «  s’interroge Dominique Lazarski, de l’association ADERA pour la protection des riverains de l’aéroport de Beauvais-Tillé. « Nous souhaiterions un plafonnement du nombre de mouvements, sans remettre en cause la viabilité du terrain. Cette dérégulation nous inquiète. » ajoute t’elle.

Le projet se décompose en une phase étude de 22 mois et une phase travaux de 38 mois, avec une mise en service progressive des nouvelles infrastructures. Les investissements s’élèvent à près de 190 millions d’euros et sont confiés à un groupement de concepteurs-constructeurs dont le mandataire est Bouygues Bâtiment Grand Ouest.