Le vol Qantas QF32 est devenu l’exemple-type de la catastrophe évitée de justesse grâce au professionnalisme de l’équipage. Le rapport final du BEA australien vient de sortir et suggère au monde de l’aéronautique – Airbus, Rolls-Royce et l’AESA en tête – de tirer les leçons de l’incident.
Le Bureau australien pour la sécurité des transports (ATSB) a publié le 27 juin son rapport final sur l’incident grave qui a affecté un Airbus A380 de la compagnie Qantas le 4 novembre 2010. Ce jour-là, peu après le décollage de Singapour, au-dessus de l’île de Batam en Indonésie, une explosion non contenue dans le moteur numéro 2 (intérieur gauche) avait endommagé l’aile, les réservoirs et plusieurs circuits électriques et hydrauliques. L’équivalent du BEA français confirme que tout a commencé dans le moteur Rolls-Royce Trent 900 avec la rupture, par fatigue, d’un conduit d’huile. Surtout, il tire les enseignements de l’incident.
Il souligne ainsi plusieurs occasions manquées de détecter un défaut de fabrication sur le conduit d’alimentation en lubrifiant. L’une de ces occasions manquées a été l’utilisation de dessins de fabrication – erronés – au lieu de dessins de conception, lors de l’inspection. L’inspecteur qualité n’a donc pu se rendre compte que la pièce n’était pas conforme.
Une autre leçon tirée de l’incident est que le corps haute pression (HP) d’un Trent peut récupérer spontanément d’un pompage. Jusqu’alors, l’expérience et les calculs avaient montré que, dans ce cas de dysfonctionnement aérodynamique, le corps HP devait ralentir. Au contraire, dans l’incident du QF32, le corps HP a pu transmettre une grande quantité d’énergie à un disque de turbine dans le corps intermédiaire. Ce disque, qui venait de se désolidariser de l’arbre sous l’effet du feu, a alors accéléré sa rotation. Tant et si bien qu’il est entré en survitesse et a fini par éclater, transperçant le carter. Ce sont ses fragments qui ont causé de sérieux dégâts.
En outre, l’ATSB note que certains modèles de prévision utilisés par les autorités de certification étaient trop optimistes. L’AESA, la FAA et leurs homologues s’efforcent, lors de l’homologation, de prédire les avaries que peut causer un éclatement non contenu. Or celles-ci ont été bien plus importantes qu’imaginé. Ainsi, les débris, projetés à grande vitesse sur différentes trajectoires, ont réussi à toucher des circuits redondants. C’est le cas, sur le QF32, d’une vanne du circuit hydraulique sur le moteur numéro 2.
Depuis l’incident, les mesures prises par Airbus, Rolls-Royce et l’AESA ont satisfait l’ATSB, qui n’émet donc pas de nouvelle recommandation.
Reste le rôle clé de l’équipage de Qantas. Lors d’une récente intervention en marge du salon du Bourget, le commandant de bord, Richard de Crespigny, avait souligné combien « inverser la logique » avait permis à l’équipage d’envisager la situation avec sang-froid. « On aurait pu voir l’avion avec un moteur en panne et une fuite majeure de carburant, mais nous l’avons considéré comme ayant trois moteurs en état de marche et deux heures et demie d’autonomie », avait-il expliqué en substance. Les 29 membres d’équipage – Richard de Crespigny insiste sur le rôle de chacun, y compris en cabine – avaient pu ramener sains et saufs les 440 passagers à Singapour.
Thierry Dubois
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Vol QF32 : les Australiens tirent les leçons de l'incident de l'A380
l'homme à toute sa place en aviation, ne jamais l'oublier, et trop d'assistance avec les nouvelles technologies n'est pas la panacée. je me permets de renouveler à l'équipage
toute mes félicitations, pour cet incident!!!!!!!
Vol QF32 : les Australiens tirent les leçons de l'incident de l'A380
Le rapport complet, disponible sur le site de l'ATSB est très bien écrit / illustré, de façon très claire ; vraiment très intéressant.
Un point soulevé par ce rapport qui a eu mon attention : malgré une interdiction formelle et une situation d'urgence, les gens ont continué à se servir d'appareils électroniques.
Outre les éventuelles interférences, se prendre dans la tête un iPhone qui vole 300 km/h pendant un atterrissage d'urgence doit faire assez mal.
Vol QF32 : les Australiens tirent les leçons de l'incident de l'A380
Après une tentative, peut être louable, de standardisation à outrance, de protocoles de plus en plus rigides, de mise en retrait de l'humain (par peur du fameux "facteur humain") par rapport aux automatismes.....les deux derniers incidents majeurs (celui ci et le posé sur l'Hudson) ne se sont pas transformés en catastrophe parce que l'humain est redevenu Pilote au lieu de surveillant de système.
Continuez à piloter "aux fesses", a présenter en meeting et à aimer ce que vous faites avant d'y voir un métier !
Fred
Vol QF32 : les Australiens tirent les leçons de l'incident de l'A380
Encore bravo à l'équipage et au Commandant pour son son froid.
La démarche positive de l'équipage a été le facteur chance des plus favorables dans cette expérience.
Cet accident prouvera au moins que malgré tous les efforts fantastiques des ingénieurs et techniciens que l'on peut saluer il n'en restera pas moins que les modélisations aussi magnifiques soient elles sont parfois éloignées de la réalité.
L'humain doit rester modeste.
Vol QF32 : les australiens tirent les leçons de l'incident de l'A380
Je conseille à tous de lire son livre (même édition que la "dénonciation" de Ryanair). On en apprend plus sur l'aviation, sur lui-même, et sur la crise qu'il a du gérer. C'est un beau livre que l'on déguste quand on est amateur d'aviation.